L'article 1er de notre Constitution affirme désormais que l'organisation de la République est décentralisée. Sont ainsi conciliés le mouvement des libertés locales, résultant d'une construction complexe et continue (grande loi municipale de 1884, décentralisation de 1982...), et l'unité comme principe fondateur de notre République.
D'une part, l'unité implique :
- l'intégration des collectivités dans une organisation institutionnelle républicaine ; une collectivité territoriale ne constitue pas un « Etat dans l'Etat » quelle que soit la majorité politique en fonction ;
- l'intégration des enjeux nationaux et internationaux dans les politiques publiques locales.
D'autre part, le développement des libertés locales engendre une reconnaissance des collectivités s'agissant :
- de la définition de l'intérêt général ;
- de l'autonomie de gestion et d'initiatives ;
- de l'efficacité du principe de subsidiarité.
La définition de l'intérêt général résulte ainsi d'une oeuvre commune. L'intérêt général n'est pas uniquement porté par l'Etat. Cette influence du national sur le local (contraintes et enjeux nationaux) et du local sur le national (expériences locales, connaissance des acteurs...) participe à la qualité du débat public et à l'efficacité des réponses apportées dans le cadre d'un véritable dialogue républicain.
Dans ce contexte institutionnel, les relations entre le Gouvernement et l'AMF reposent sur un partenariat loyal mais exigeant.
S'agissant des libertés locales, l'AMF ne peut que se féliciter du processus continu de leur développement. Ce mouvement a porté dans un premier temps sur la gestion des collectivités : élection, suppression de la tutelle. Certains aspects sont actuellement en cours d'amélioration : la rationalisation de l'intercommunalité, les règles électorales applicables aux petites communes, le statut de l'élu...
Parmi les évolutions relatives aux libertés locales, il faut aussi souligner le renforcement de la place du citoyen dans le débat public. Un mouvement législatif continu a développé de nouveaux outils : conseil de quartier, consultations, grands débats publics... L'AMF soutient ces nouvelles libertés locales dans la mesure où elles permettent l'épanouissement de la citoyenneté et non l'affirmation de la primauté des préoccupations individuelles sur l'intérêt général. Ainsi, ces nouveaux droits ne doivent pas remettre en cause la place des élus dans le processus décisionnel et se garder de favoriser des mécanismes défensifs, corporatistes ou individualistes face à des projets de développement correspondant à un intérêt général. Ces nouveaux droits ne doivent pas entraîner un allongement excessif de la phase préparatoire des projets. Il s'agit d'améliorer la qualité de ces derniers et non de contribuer à « l'impuissance publique ».
S'agissant de l'unité institutionnelle, les communes et intercommunalités revendiquent un partenariat fort avec l'Etat.
L'AMF est consciente des contraintes et des enjeux nationaux et internationaux auxquels doit faire face le Gouvernement. Ainsi, dans un cadre financier contraint, les collectivités ne peuvent s'exonérer de participer à l'effort de la Nation s'agissant du rétablissement des comptes publics. Toutefois, l'Etat doit également s'abstenir de stigmatiser la gestion des collectivités, caractérisée par un endettement faible et par des dépenses d'investissement motrices pour l'économie nationale, et surtout de leur faire supporter l'essentiel des coûts des nouvelles normes qu'il a décidées unilatéralement.
L'unité institutionnelle suppose également un dialogue permanent et constructif. C'est pourquoi j'avais appelé solennellement l'attention du Président de la République, lors du congrès des maires de novembre 2010, sur la nécessité impérative de réactiver, sur une base rénovée, la conférence nationale des exécutifs, et je me réjouis des décisions récentes prises en ce sens par le Premier ministre et le ministre chargé des collectivités territoriales.
Ce dialogue doit porter sur l'ensemble des dispositifs législatifs et réglementaires affectant les dépenses (normes, compétences, statut des fonctionnaires...) et les recettes (impôts, dotations...) des collectivités. Il doit s'organiser sur des instances rénovées, avec un ordre du jour, des travaux et documents préparatoires, un suivi des décisions.
Ce dialogue implique également une présence efficiente de l'Etat dans les territoires : un rôle actif du sous-préfet dans les territoires ruraux, des leviers efficaces en matière de rénovation urbaine...
Enfin, s'agissant de l'organisation des collectivités territoriales, l'AMF s'inscrit dans une démarche d'amélioration de l'existant. Elle n'a pas souhaité un approfondissement des compétences transférées aux communes, notamment dans le cadre de la loi relative aux libertés et responsabilités locales du 13 août 2004, alors que les départements et les régions étaient demandeurs de nouveaux transferts.
Toutefois, l'AMF a obtenu, dans la loi de 2004 et dans le cadre de la réforme territoriale, que la commune soit confirmée dans son statut de première collectivité publique de proximité et dans sa vocation généraliste (la clause générale de compétences a ainsi été maintenue pour les communes).
L'AMF souligne le rôle essentiel des élus municipaux pour gérer les territoires et conforter la cohésion sociale. Elle souhaite préserver certains pouvoirs (pouvoirs de police, pouvoirs en matière d'urbanisme...) et certains moyens financiers (impôts, dotations...) qu'ils peuvent mutualiser, uniquement s'ils le souhaitent et à l'unanimité, au sein de l'intercommunalité.