Intervention de Béatrice Sédillot

Mission commune d'information relative à Pôle emploi — Réunion du 24 mai 2011 : 1ère réunion
Audition de M. Claude Seibel inspecteur général honoraire de l'insee et de Mme Béatrice Sédillot administrateur de l'insee auteurs du rapport « les expérimentations d'accompagnement renforcé des demandeurs d'emploi conduites par l'unedic et l'anpe en 2007 »

Béatrice Sédillot, administrateur de l'Insee :

L'évaluation que nous avons menée se basait sur un protocole novateur et cherchait à évaluer l'impact de l'accompagnement renforcé sur le retour à l'emploi. En effet, à cette époque, le débat sur le coût des différents modes d'accompagnement ne reposait sur aucun élément de comparaison solide.

Un premier résultat important est la confirmation que l'accompagnement renforcé apporte, de manière générale, une plus-value aux demandeurs d'emploi concernés. L'accroissement de la probabilité du retour vers l'emploi était, respectivement, de cinq et sept points pour les équipes des opérateurs privés et les équipes CVE.

Il a été constaté que le programme CVE avait un effet plus rapide et plus élevé sur le taux de sortie vers l'emploi. En effet, dès le troisième mois, un surcroît de sortie des listes était observable, alors que pour les opérateurs privés de placement, les effets n'étaient significatifs qu'à partir du sixième mois.

Bien sûr, les programmes n'étaient pas forcément déployés dans les mêmes zones, mais dans certains endroits cohabitaient l'accompagnement renforcé assuré par l'ANPE, celui assuré par les opérateurs privés ainsi que l'accompagnement classique. Or, lorsque les deux dispositifs de suivi renforcé étaient présents sur une même zone, il était possible d'observer une amélioration assez importante des résultats à travers un effet d'émulation et de concurrence.

Nous avons également cherché à mesurer le caractère durable de ce retour vers l'emploi. Ainsi, les demandeurs d'emploi accompagnés par les opérateurs privés de placement ou par les équipes CVE se réinscrivaient moins fréquemment sur les listes de l'ANPE au cours des six mois suivant leur sortie vers l'emploi.

Nous avons pu observer que, parmi les demandeurs d'emploi accompagnés par les opérateurs privés, l'effet positif était uniquement lié à des sorties vers des contrats de plus de six mois, ce qui est cohérent avec les objectifs qui leur avaient été assignés. Dans le programme CVE, une partie du surcroît de reclassement était liée à des sorties vers des emplois de courte durée, même si les retours vers des emplois durables étaient plus fréquents.

Nous avons procédé à la même analyse en prenant en compte les personnes qui reprenaient une activité réduite tout en continuant à être inscrites sur la liste des demandeurs d'emploi. Nous avons pu remarquer que les résultats obtenus par les opérateurs privés de placement étaient supérieurs à ceux obtenus par l'opérateur public. Ce résultat peut être expliqué, en partie, par les incitations qui étaient données aux opérateurs privés, qui valorisaient le retour vers l'emploi durable, alors que la sortie de la liste des demandeurs d'emploi était sans doute une préoccupation plus forte pour les conseillers de l'ANPE.

L'évaluation a aussi permis de comparer les méthodes d'accompagnement. De manière générale, une grande proximité entre les pratiques des opérateurs privés et celles des équipes CVE a été constatée. Cela ne veut pas dire qu'il n'y avait pas des initiatives intéressantes mises en place par les uns et par les autres, mais globalement les modalités d'accompagnement étaient similaires.

On pouvait imaginer que les opérateurs privés de placement avaient une relation plus forte avec les entreprises. Cependant, au cours de notre évaluation, il est apparu que les demandeurs d'emploi accompagnés par les équipes CVE recevaient, en général, plus d'offres d'emploi. En revanche, ceux qui étaient suivis par les opérateurs privés de placement ont bénéficié de davantage de prestations sur la méthodologie de la recherche d'emploi, par exemple pour la préparation des entretiens d'embauche.

Au niveau du pilotage du suivi des demandeurs d'emploi, celui-ci était assez hétérogène sur l'ensemble du territoire et n'était pas entièrement satisfaisant, voire insuffisant dans certains cas.

Quelques éléments importants doivent cependant être soulignés pour permettre une interprétation adéquate de ces résultats. Ainsi, le contexte de notre étude était caractérisé par un niveau de concurrence et de défiance très fort entre les équipes de l'opérateur public et celles des opérateurs privés. En effet, le demandeur d'emploi pris en charge par un opérateur privé n'étant plus suivi par l'ANPE, les deux opérations étaient vécues comme étant très distinctes. De plus, il faut rappeler que les équipes CVE étaient constituées sur la base du volontariat et elles voulaient sans doute prouver qu'elles pouvaient faire aussi bien, ou même mieux, que les opérateurs privés de placement.

Du côté des opérateurs privés, il faut avoir en tête que le marché était relativement récent. Nous étions donc en présence d'acteurs très hétérogènes en termes de taille, d'expérience et d'ancrage territorial. Or l'évaluation, qui souhaitait s'appuyer sur des résultats robustes et statistiquement significatifs, avait d'emblée exclu l'idée d'effectuer une évaluation opérateur privé par opérateur privé.

Enfin, je souhaite souligner que les performances des deux réseaux étaient cohérentes avec les objectifs qui leur avaient été assignés. Ainsi, les opérateurs privés ont rempli leurs obligations contractuelles, qui étaient un retour vers l'emploi durable même dans le cadre d'une activité réduite. De leur côté, les équipes CVE avaient également pour but le retour vers un emploi durable mais assorti d'une mise en relation avec les entreprises, ce qui peut expliquer le plus grand nombre d'offres d'emploi proposées.

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