Intervention de Jacques Mistral

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 27 mai 2009 : 1ère réunion
Conséquences de la crise économique et financière en matière de sécurité et de défense — Audition de M. Jacques Mistral directeur des études économiques à l'institut français des relations internationales ifri

Jacques Mistral, directeur des études économiques à l'Institut français des relations internationales :

a déclaré partager l'analyse de M. Jean François-Poncet, tout en soulignant le caractère imprévisible de la variation du cours du dollar et la difficulté d'établir des pronostics.

Il a indiqué que la crise économique et financière avait introduit un facteur supplémentaire de fragilisation du dollar, en jetant un doute sur la fiabilité de la valeur des actifs américains.

Il a considéré que les fortes fluctuations du dollar sur le marché des taux de change ne tenaient pas seulement à des raisons conjoncturelles mais également à des facteurs structurels.

Il a fait référence aux inquiétudes, qu'il partage, exprimées récemment par le Premier ministre chinois au sujet de la politique économique des Etats-Unis, avec une succession de plans de relance et un déficit budgétaire de près de 1 500 milliards de dollars, et ce en dépit des déclarations rassurantes du secrétaire d'Etat au Trésor sur une sortie de crise relativement rapide.

Il a également estimé que la question de la notation des dettes souveraines serait une question centrale dans les prochaines années. A cet égard, il a rappelé qu'il y a quelques jours, une agence de notation avait mis sous surveillance négative l'économie du Royaume-Uni. Il a également mentionné la publication récente d'une étude d'une agence de notation selon laquelle la multiplication par deux ou trois du déficit budgétaire des Etats-Unis n'avait pas eu de conséquence sur son appréciation à l'égard de la politique suivie par le secrétaire au Trésor américain. Il a considéré que la publication d'une telle étude constituait par elle-même une indication puisque l'on peut penser que si la situation se dégradait davantage, le jugement de cette agence sur l'économie américaine pourrait changer. Il a estimé, à titre personnel, qu'il était probable qu'une agence de notation décide un jour de placer l'économie américaine sous surveillance négative.

Il a rappelé à cet égard que le krach boursier de 1987 avait été provoqué par une controverse entre le secrétaire d'Etat américain au Trésor et le ministre allemand des finances à propos de la politique monétaire des Etats-Unis.

Il a indiqué qu'il existait un certain scepticisme sur l'euro, véhiculé notamment par les milieux anglo-saxons, exprimé par exemple par le « Financial Times », lié à l'incapacité supposée de l'Union européenne et de l'euro à gérer les conséquences de la crise économique sur les pays d'Europe centrale et orientale. Il a estimé que ce point de vue était largement infondé, compte tenu du fait que les institutions européennes et internationales disposent de ressources suffisantes pour faire face aux conséquences de la crise en Europe centrale et orientale.

Il a rappelé que, en 2004, le rythme de la dépréciation du dollar avait été très rapide, de l'ordre d'un centime par jour, passant en trois semaines d'un taux de change de 1 euro pour 1,25 dollar à 1 euro pour 1,40 dollar, que seule la réaction de la Banque centrale européenne, dirigée par M. Jean-Claude Trichet, avait réussi à arrêter.

En évoquant ses entretiens aux Etats-Unis, il a indiqué que la faiblesse du cours du dollar n'était pas problématique aux yeux des responsables américains, qui y voyaient même un avantage.

Il a indiqué que, face à la dépréciation du dollar et au risque d'un retour à la pratique des dévaluations compétitives, une réaction de l'Union européenne était souhaitable mais qu'elle nécessitait non seulement l'accord des banques centrales européennes mais aussi un large consensus politique au niveau européen.

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