a indiqué que les dispositions de la proposition de loi, limitées à la matière civile, étaient destinées à améliorer l'exécution des décisions de justice, à redéfinir l'organisation et les compétences de juridictions et à rénover les conditions d'exercice de certaines professions réglementées : huissiers de justice, notaires et greffiers des tribunaux de commerce.
Il a relevé que les dispositions proposées puisaient à deux sources principales : une observation attentive de l'évolution des métiers de la justice et des attentes des professionnels, d'une part, les recommandations formulées par la commission sur la répartition des contentieux présidée par le recteur Serge Guinchard, dans un rapport remis en 2008 à la garde des sceaux, ministre de la justice, d'autre part.
Il a ajouté qu'elles s'ordonnaient en vingt-six articles, répartis en neuf chapitres respectivement consacrés aux frais d'exécution forcée en droit de la consommation, à la force probante des constats d'huissiers, à la signification des actes et aux procédures d'exécution, au juge de l'exécution, à la profession d'huissier de justice, à la profession de notaire, à la profession de greffier de tribunal de commerce, à l'application de la réforme outre-mer, ainsi qu'à son entrée en vigueur.
a exposé que, pour améliorer l'exécution des décisions de justice, la proposition de loi prévoyait :
- de donner au juge, saisi d'un litige en droit de la consommation, la faculté de mettre à la charge du débiteur qui refuse de s'acquitter spontanément de sa dette, s'il s'agit d'un professionnel, l'intégralité des frais de l'exécution forcée de sa décision (article 1er) ;
- de permettre aux huissiers de justice, pour l'accomplissement de leurs seules missions de signification, d'accéder aux dispositifs d'appel et aux boîtes aux lettres particulières des immeubles collectifs à usage d'habitation (article 3) ;
- d'améliorer l'accès des huissiers de justice aux informations nécessaires à l'exécution d'un titre exécutoire, décisions de justice et actes notariés essentiellement, en supprimant le filtre actuel du procureur de la République (article 4) ;
- de ratifier l'ordonnance n° 2006-461 du 21 avril 2006 réformant la saisie immobilière, prise en application de l'habilitation conférée par l'article 24 de la loi n° 2005-842 du 28 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie (article 5) ;
- de permettre au procureur de la République de requérir directement la force publique pour faire exécuter les décisions, rendues sur le fondement des instruments internationaux et communautaires, relatives au déplacement illicite international d'enfants, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État (article 6).
Présentant ensuite les dispositions destinées à redéfinir l'organisation et les compétences des juridictions, inspirées des propositions de la commission sur la répartition des contentieux, il a observé qu'elles prévoyaient :
- de regrouper le contentieux de l'exécution mobilière devant le juge de l'exécution du tribunal d'instance, qui deviendrait également compétent en matière de surendettement, et le contentieux de l'exécution immobilière ou quasi-immobilière devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance, ce dernier devant nécessairement être un juge de l'exécution du tribunal d'instance (article 7 à 11) ;
- de transférer aux huissiers de justice la compétence actuellement dévolue aux greffiers en chef des tribunaux d'instance pour la mise en oeuvre des mesures conservatoires après l'ouverture d'une succession, essentiellement l'apposition des scellés (article 12) ;
- de conférer au notaire, dont le tarif actuel est de 73 euros, une compétence exclusive pour le recueil du consentement des membres d'un couple désirant bénéficier d'une procréation médicalement assistée avec recours aux gamètes d'un tiers, alors qu'ils partagent actuellement cette compétence avec le président du tribunal de grande instance ou son délégué (article 21) ;
- de décharger les greffiers en chef des tribunaux d'instance de leur tâche de recueil du consentement à l'adoption, qu'ils partagent actuellement avec les notaires et les agents diplomatiques ou consulaires français, le tarif actuel des notaires étant de 25,55 euros (article 22).
Quant aux dispositions destinées à rénover les conditions d'exercice de certaines professions réglementées, il a observé qu'elles prévoyaient :
- de renforcer la valeur probante des constats établis par les huissiers de justice, commis par justice ou à la requête de particuliers (article 2) ;
- de soumettre les huissiers de justice et les notaires en exercice à une obligation de formation continue, qui s'impose déjà aux avocats (articles 13 et 17) ;
- de donner aux huissiers de justice et aux greffiers des tribunaux de commerce la possibilité, déjà reconnue aux notaires, d'exercer leur profession en qualité de salariés (articles 13 et 24) ;
- de permettre aux greffiers des tribunaux de commerce de créer des sociétés de participations financières de professions libérales, c'est-à-dire des holdings de sociétés d'exercice libéral (article 23) ;
- de consacrer la possibilité, pour les huissiers de justice et les notaires, de constituer des syndicats professionnels et, pour ces derniers, de participer aux négociations collectives avec les organisations représentatives des personnels des études (articles 15, 16, 19 et 20) ;
- de réformer le régime disciplinaire applicable aux huissiers de justice, sur le modèle des dispositions prévues en 2004 pour les notaires (article 14) ;
- enfin, de tirer la conséquence de la transformation en 2007 des écoles de notariat en instituts des métiers du notariat (article 18).
Il a précisé que les articles 25 et 26 de la proposition de loi concernaient l'application outre-mer et l'entrée en vigueur de la réforme.
Presque toutes ces dispositions ayant reçu l'assentiment des représentants des professions concernées, M. François Zocchetto, rapporteur, a proposé à la commission de les reprendre, sous réserve de deux suppressions et de quelques aménagements, et de les compléter pour étendre la portée de la réforme proposée.
Souscrivant aux dispositions prévoyant que les constats dressés par les huissiers de justice, s'ils sont réguliers en la forme, valent jusqu'à preuve contraire, sauf en matière pénale où ils ont la valeur de simples renseignements, il s'est opposé à l'interdiction d'apporter la preuve par témoins contre le contenu de ces actes lorsqu'ils ont été dressés contradictoirement entre les parties (article 2).
Il a en effet jugé excessif d'interdire à celui ou à celle qui, impressionné par la présence et la qualité d'officier public et ministériel de l'huissier, et privé le plus souvent de la présence d'un conseil, n'a pas osé formuler des réserves au moment de l'établissement du constat de rapporter par la suite la preuve contraire par témoin.
Il n'a pas non plus jugé souhaitable de conférer au notaire une compétence exclusive pour le recueil du consentement des membres d'un couple désirant bénéficier d'une procréation médicalement assistée avec recours aux gamètes d'un tiers (article 21).
En effet, a-t-il souligné, les compétences actuelles du juge s'inscrivent dans un cadre plus large, qui le fait intervenir également en matière de don d'organe ou d'accueil d'embryon ; le consentement à une procréation médicalement assistée emporte des conséquences lourdes en droit de la filiation qui nécessitent une information précise et solennelle ; le rôle actuel des juges est apprécié tant par les intéressés que par les couples qui se présentent devant eux.
Précisant que toutes les autres dispositions de la proposition de loi étaient reprises dans le texte qu'il soumettait à la commission, M. François Zocchetto, rapporteur, a indiqué que les principaux aménagements qu'il leur avait apportés concernaient la répartition du contentieux de l'exécution. A cet égard, il a plus particulièrement mis en exergue la nécessité, afin d'éviter de désorganiser les juridictions, de supprimer l'obligation de confier les fonctions de juge de l'exécution du tribunal de grande instance à un juge de l'exécution du tribunal d'instance : ces fonctions resteraient dévolues au président du tribunal de grande instance, qui pourrait les déléguer aux magistrats du siège de son choix, qu'ils soient ou non juge d'instance (article 9).
Enfin, évoquant les compléments apportés aux dispositions de la proposition de loi, M. François Zocchetto, rapporteur, a exposé qu'ils avaient pour objet :
- d'étendre aux sociétés d'exercice libéral d'huissiers de justice la faculté donnée aux sociétés civiles professionnelles d'avoir deux clercs habilités à procéder aux constats (article 13 du texte soumis à la commission) ;
- de favoriser la réalisation d'états des lieux amiables entre les propriétaires de logements et leurs locataires en prévoyant, d'une part, que l'état des lieux est en principe dressé par les parties contradictoirement, amiablement et sans frais pour le locataire, d'autre part, qu'en cas d'intervention de l'huissier de justice à la demande d'une seule partie sans l'accord de l'autre, le coût de l'état des lieux est intégralement supporté par le demandeur de l'acte (article 18 du texte soumis à la commission) ;
- de soumettre les greffiers des tribunaux de commerce à une obligation de formation continue, en reprenant les dispositions prévues pour les huissiers de justice et les notaires (article 25 du texte soumis à la commission) ;
- d'étendre aux commissaires-priseurs judiciaires les dispositions posant l'obligation d'une formation continue (article 27 du texte soumis à la commission) et celles concernant le champ et les acteurs de la négociation collective (articles 28, 29 et 30 du texte soumis à la commission) ;
- d'instituer un nouveau mode alternatif de règlement des conflits, la négociation assistée par avocat, suivant une procédure structurée, dite « participative » (article 31 du texte soumis à la commission) ;
- d'organiser la fusion des professions d'avocat et de conseil en propriété industrielle (articles 32 à 50 du texte soumis à la commission).
a souligné que ces deux derniers ajouts étaient indéniablement les plus substantiels.
Il a estimé que la procédure participative de négociation assistée par avocat permettrait de faciliter le règlement amiable des litiges, sous l'impulsion des avocats : pendant la négociation, la saisine de la juridiction serait impossible ; un accord même partiel pourrait être soumis à l'homologation de la juridiction ; en cas d'échec, une passerelle vers sa saisine simplifiée permettrait un traitement accéléré de l'affaire ; pour que tout justiciable puisse en bénéficier, le choix de cette procédure ouvrirait droit à l'aide juridictionnelle.
Quant à la fusion des professions d'avocat et de conseil en propriété industrielle, il a relevé qu'elle était souhaitée non seulement par le Conseil national des barreaux et par la Compagnie nationale des conseils en propriété industrielle, qui y travaillaient depuis de longs mois, mais aussi par une très large majorité des membres de ces deux professions composées respectivement de 657 conseils en propriété industrielle, travaillant dans environ 200 cabinets, pour environ 48.000 avocats en 2006. Il a ajouté que la fusion constituerait un instrument essentiel au service du renforcement de la compétitivité des professionnels français face à la concurrence étrangère, observant que la multiplicité d'intervenants aux compétences asymétriques -les conseils en propriété industrielle ne peuvent plaider- et la concurrence qu'ils se font incitent leurs clients potentiels, par exemple lorsqu'ils désirent déposer un brevet européen, à se tourner vers un conseil allemand ou britannique, dont les compétences sont plus lisibles. Enfin, il a précisé que les entreprises françaises pourraient continuer à faire appel aux services de leurs propres salariés.
En conclusion, il a estimé que cette proposition de loi s'inscrivait pleinement dans la ligne des travaux de la commission chargée de réfléchir à ce que pourrait être une « grande profession du droit », présidée par M. Jean-Michel Darrois.