En réponse, M. Jean-Marc Sauvé a indiqué que la consultation du Conseil d'Etat sur des propositions de loi modifierait la nature de ses missions, celui-ci n'étant plus le conseiller exclusif du gouvernement. Il a souligné qu'il appartenait au pouvoir constituant de préciser les modalités de saisine et d'examen du Conseil d'Etat dans ce cadre, ainsi que les conséquences éventuelles d'un défaut de consultation par les assemblées sur la régularité de la procédure législative.
Abordant la question de la publicité des avis du Conseil d'Etat sur les projets de loi, M. Jean-Marc Sauvé a rappelé que ces avis n'étaient publics que si le gouvernement le décidait. Il s'est déclaré ouvert à une réforme législative tendant à prévoir une communication systématique des avis du Conseil d'Etat aux parlementaires, eu égard à l'exigence de loyauté du débat politique.
Partageant les inquiétudes du rapporteur pour avis sur l'inflation contentieuse susceptible d'être induite par la loi du 5 mars 2007 instituant un droit opposable au logement en vigueur depuis le 1er janvier, M. Jean-Marc Sauvé a mis en avant le volume des demandes prioritaires à satisfaire, évalué, d'après les statistiques de l'INSEE, à 600.000, soit 1,7 million de personnes au regard du -faible- nombre de logements attribués annuellement au titre du contingent préfectoral (60 à 65.000). Il a expliqué que ce décalage risquait de mettre les préfets dans l'impossibilité d'honorer près de 540.000 demandes, estimant que si seulement 10 % de ces 540.000 ménages choisissaient de saisir le juge selon une hypothèse restrictive, il était permis de redouter un afflux de près de 20.000 affaires supplémentaires par an. Ainsi, ce contentieux pourrait être à l'origine d'un afflux de requêtes annuelles de l'ordre de 10 %.
Le vice-président du Conseil d'Etat a relevé que l'activité contentieuse des tribunaux administratifs serait doublement affectée par cette réforme du fait :
- d'un surcroît de recours pour excès de pouvoirs « classiques » de la part des personnes écartées par les commissions départementales de médiation, étant précisé que ces demandes pourraient affluer dès le printemps, lorsque ces instances commenceront à trier des demandes en grand nombre ;
- de l'introduction d'actions indemnitaires des personnes déclarées prioritaires, mais n'ayant pas obtenu satisfaction après injonction du juge administratif délivrée dans le cadre de l'action spécifique du droit au logement opposable. L'activité des commissions départementales est encore faible, 7.500 dossiers ayant été déposés et 189 décisions rendues, dont 107 rejets. Une montée en puissance est toutefois à prévoir, ce qui ne permet pas encore d'évaluer finement les conséquences du nouveau dispositif.
a indiqué que le Conseil d'Etat avait pris en compte, dans ses demandes budgétaires pour la période 2009-2011, les conséquences de l'entrée en application de ce nouveau droit sur les entrées contentieuses, et donc les besoins en termes de moyens. Il a cependant ajouté que dans l'hypothèse où la progression des flux d'affaires nouvelles se révélerait supérieure aux prévisions retenues dans le cadre de la programmation budgétaire, il appartiendrait au gouvernement et au Parlement de réajuster à la hausse les moyens alloués initialement, afin d'éviter une dégradation des délais de jugement.
Il a rappelé l'origine ancienne des premiers recours administratifs préalables obligatoires, introduits dans notre droit il y a cinquante ans en matière fiscale. Il a mis en avant les avantages d'une telle procédure :
- qui permet de satisfaire tant le justiciable que l'administration ;
- qui constitue une solution efficace pour désengorger la juridiction administrative. Il a expliqué que 95 % des requêtes trouvaient une solution dans ce cadre, ce qui limitait fortement les recours contentieux.