Intervention de Christian Lage

Mission commune d'information sur l'organisation territoriale du système scolaire et sur l'évaluation des expérimentations locales en matière d'éducation — Réunion du 8 mars 2011 : 1ère réunion
Audition des représentants syndicaux de l'éducation nationale

Christian Lage, secrétaire général du Syndicat national de l'enseignement technique Action autonome (SNETAA) :

L'autonomie existe : nous l'avons rencontrée en 1985 sur les Etablissements publics locaux d'enseignement (EPLE). Il existe une tendance à entasser les choses plutôt qu'à les faire vivre. Nous en sommes aujourd'hui à la 35e réforme de l'éducation nationale depuis 70 ans.

La première question que nous nous posons est la suivante : de quelle autonomie parlons-nous ? S'agit-il de l'autonomie du chef d'établissement ou de l'autonomie de la communauté éducative ? Le débat n'est pas le même. Qui fait le choix de « sabrer » telle ou telle section ? Je vous informe que chaque établissement est supposé avoir un projet d'établissement. Qui l'a écrit ? Qui l'a fait évoluer ? Qui est partie prenante de ce projet ? Souvent, je peux vous le dire d'expérience, ce projet d'établissement a été élaboré sur un coin de table, car il fallait rendre une copie. Or nous sommes aujourd'hui dans une logique qui lie chaque établissement au rectorat par un contrat d'objectifs, qui n'est pas connu dans les établissements car il est inscrit dans la lettre de mission du chef d'établissement qui lui-même rédige la lettre de mission de ses deux adjoints. Quel est le contrat d'objectif qui lie le rectorat et la centrale ? Le rectorat discute en effet de ses moyens par contrat d'objectifs avec le ministère. Le rectorat reçoit des moyens globaux à mettre en oeuvre par rapport à tous les ordres de l'enseignement. C'est ainsi que nous nous sommes aperçus, au détour d'un rapport d'une députée, qu'une partie des moyens de l'enseignement professionnel était redirigée ailleurs : on déshabille Paul pour habiller Pierre ! Cette autonomie nous inquiète fortement car nous sommes favorables au maintien d'un cadre national, avec des règles nationales, qui respectent les statuts de tous les personnels.

Les chefs d'établissements préviennent le tribunal administratif si les programmes ne sont pas respectés car ce sont eux qui reçoivent les dotations globales en horaires bien qu'ils n'aient aucun pouvoir sur cette dotation qui leur est accordée par le rectorat. On nous dit partout que les heures ne sont pas abondées. Qui est responsable ? L'un des maillons du système est certainement responsable, mais les moyens nécessaires ne lui sont pas octroyés. Attention ! L'enseignement professionnel se trouve déjà sous une double tutelle de la région et de l'État. Cela ne fonctionne pas : nous assistons au jeu extraordinaire de la patate chaude que la région renvoie à l'État et réciproquement. Savez-vous que l'on ouvre aujourd'hui une section sans en informer la région ? Il conviendrait de mettre fin à ce type de pratiques. A chaque fois, ce sont les personnels de l'éducation nationale que l'on prend en otages.

L'autonomie pose la question de la responsabilité. Qui est bon ? Qui n'est pas bon ? Comment cela est-il évalué ? Au mérite ? Subjectivement ? Je peux définir vos mérites : ils sont à l'aulne de ceux qui vous réélisent ou pas. Le mérite d'un enseignant se définit-il au non-redoublement de ses élèves ? Il me suffit pour cela de disposer d'un tampon et de tamponner chaque bulletin du mot « Reçu » ! Est-ce notre objectif ?

La pire des publicités qui nous est faite est le classement des lycées chaque année par la presse. Ce classement met en effet les établissements en concurrence les uns par rapport aux autres. Les personnels en souffrent.

La rénovation que j'ai évoquée précédemment a prévu une certaine part d'autonomie. Nous avons souhaité qu'elle soit cadrée. 13,5 % des horaires doivent être définis par les établissements scolaires. Or aujourd'hui, aucun établissement scolaire n'en a les moyens. Il ne s'agit pas de nous faire dire que tout est question de moyens. La véritable question est de définir quels sont les besoins des établissements. Or on ne pose pas cette question. Les régions sont en train de refaçonner, dans leur contrat régional, le plan pour les formations, d'ici à juin 2011. Qui a été associé à ces travaux ? Quelle carte des formations prévoit-on ? Les rectorats, les établissements, ont-ils été associés à ces travaux pour déterminer les fermetures et ouvertures de section ? Sur quels critères ?

L'autonomie des établissements ne peut s'envisager que si une modification réelle advient, c'est-à-dire si les personnels de la communauté éducative sont tous parties prenantes du même jeu en fonction de règles clairement définies.

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