Intervention de Frank Riboud

Mission commune d'information sur les politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion — Réunion du 28 mai 2008 : 1ère réunion
Audition de M. Franck Riboud président-directeur général du groupe danone

Frank Riboud :

a rappelé que son groupe s'est investi, depuis les années 70, dans un double projet économique et social qui, à l'origine centré sur l'intéressement, s'est ensuite diffusé pour imprégner sa culture d'entreprise. Puis son internationalisation l'a amené à investir dans des pays émergents dont une majeure partie de la population vit avec des moyens très réduits, de l'ordre de moins de deux dollars par jour. Cette évolution a poussé l'entreprise à développer une stratégie d'accessibilité visant, dans une démarche économique et non humanitaire, à permettre au plus grand nombre de consommateurs de ces pays d'acquérir les produits du groupe, bénéfiques pour leur santé. De la rencontre avec le prix Nobel Muhammad Yunus et la Grameen bank qu'il a créée a ainsi résulté la mise en place, au Bangladesh, de la Grameen Danone Foods, laquelle a permis de commercialiser un yaourt à cinq centimes d'euros. Dans ce même pays a été créée une organisation non gouvernementale réalisant des actions de marketing sur les sujets concernant la nutrition, et développant des instruments de mesure permettant de déterminer en quoi une bonne alimentation contribue au recul de la pauvreté.

Des expériences mariant démarche caritative et recherche d'un profit ont ensuite été menées avec la création, à la quasi unanimité du conseil d'administration du groupe, de Danone communities, fonds d'investissement géré par le Crédit agricole et réservant 10 % de ses financements à des projets à risque. C'est ainsi qu'a été lancée l'opération 1001 fontaines au Cambodge.

Par ailleurs, le groupe Danone a mis en place en son sein un comité de responsabilité sociale intervenant dans les domaines éthiques et sociétaux. S'agissant du marché national, Danone tente, en vue de soutenir le pouvoir d'achat des populations françaises les plus démunies, de commercialiser des produits économiquement accessibles.

D'une façon plus générale, M. Frank Riboud a appelé à une nouvelle approche du système de formation en vue d'élargir au maximum la base de sélection et de prendre en compte la diversité des compétences. Estimant qu'une multitude d'actions sectorielles, et non un programme global d'action, était aujourd'hui nécessaire pour obtenir des résultats en matière de lutte contre l'exclusion et la pauvreté, il a préconisé une revalorisation de l'apprentissage et de la formation permanente auprès des jeunes et des salariés.

A cet égard, il a fait référence au programme de formation Evoluence mis en place par son groupe. Permettant à ses salariés de repasser des examens et d'obtenir de nouveaux diplômes, il élargit leur horizon professionnel et provoque un effet d'entraînement touchant également leurs enfants. Il a également rapporté avoir demandé à ce que les établissements scolaires ou supérieurs fréquentés par les jeunes postulants à un emploi au sein de son groupe ne soient pas mentionnés auprès des responsables du recrutement. Considérant que le règlement des problèmes de pouvoir d'achat en France résidait dans une révision des politiques salariales, il a relativisé l'incidence des dépenses alimentaires à cet égard, faisant observer qu'elles ne mobilisaient que 14 % du budget des ménages et que les prix des produits agroalimentaires dans notre pays étaient parmi les plus bas d'Europe, le léger écart avec l'Allemagne s'expliquant simplement par une différence dans les structures de distribution.

Estimant que les entreprises du CAC 40 étaient prêtes à participer au financement des universités, il a nuancé l'efficacité de l'aide à la création d'entreprise en matière d'insertion du fait de l'insuffisante formation des publics visés, appelant à ce que les bénéficiaires soient davantage accompagnés dans leurs démarches par des acteurs professionnels tels que comptables, notaires, banquiers ou entrepreneurs.

Jugeant que l'intéressement était une mesure dépourvue de tout effet socialement bénéfique et à laquelle les employés préféraient en tout état de cause une revalorisation de leurs salaires, dont il a souligné la relative faiblesse de la masse totale pour une entreprise comme la sienne, il a en revanche estimé indispensable de conserver un cadre règlementaire contraignant lors de restructurations afin d'obliger les partenaires sociaux à dialoguer.

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