Intervention de Brice Hortefeux

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 28 octobre 2009 : 3ème réunion
Réforme des collectivités territoriales — Audition de Mm. Brice Hortefeux ministre de l'intérieur de l'outre-meret des collectivités territoriales alain marleix secrétaire d'etat à l'intérieuret aux collectivités territoriales et michel mercier ministre de l'espace ruralet de l'aménagement du territoire

Brice Hortefeux :

Ayant salué les travaux de la mission sénatoriale présidée par M. Claude Belot et rappelé qu'il s'était déjà exprimé devant le Sénat sur la réforme des collectivités territoriales à l'occasion du débat du 30 juin 2009, M. Brice Hortefeux a souligné que le Gouvernement avait été attentif aux préoccupations des élus et avait entendu les associer à l'élaboration de la présente réforme. Il a précisé que le Gouvernement avait, en conséquence, diffusé un avant-projet de texte dès le mois de juillet 2009 et mené de nombreuses concertations sur cette base.

a ainsi affirmé que les quatre projets de loi soumis au Sénat étaient marqués par :

- une volonté d'écoute et de concertation. D'une part, la réforme proposée par le Gouvernement s'inspire des principaux rapports publics relatifs aux collectivités territoriales, et notamment des rapports de M. Alain Lambert (« Les relations entre l'Etat et les collectivités locales »), de M. Jean-Luc Warsmann (« Pour un big bang territorial »), du comité présidé par M. Édouard Balladur (« Il est temps de décider ») et de la mission sénatoriale présidée par M. Claude Belot (« Faire confiance à l'intelligence territoriale »). D'autre part, les associations d'élus locaux, dans le cadre du conseil national des exécutifs, et les partis politiques nationaux, invités à se prononcer sur la question du mode de scrutin pour l'élection des conseillers territoriaux et reçus par le Gouvernement au cours du mois de juillet, ont participé à son élaboration. M. Brice Hortefeux a affirmé que ces concertations avaient poussé le Gouvernement à modifier, de manière large et substantielle, ses propositions ;

- la détermination du Gouvernement, résolu à faire aboutir la réforme des collectivités territoriales. Citant un sondage de l'institut IPSOS, rendu public à la fin du mois de juin 2009, M. Brice Hortefeux a estimé que l'opinion publique percevait la nécessité d'une réforme des collectivités territoriales : il a ainsi indiqué que 83 % des sondés considéraient que l'organisation administrative de la France était trop complexe, que 75 % jugeaient la répartition des responsabilités entre les différents niveaux d'administration confuse, que 73 % considéraient que la réforme était nécessaire et que 60 % jugeaient que les échelons de prise de décision étaient trop nombreux. M. Brice Hortefeux a affirmé que, dans ce contexte, il était indispensable de donner un nouveau souffle à la décentralisation, les modalités de mise en oeuvre de celle-ci devant être clarifiées et simplifiées ;

- le souci d'éviter les « fausses querelles » et les « polémiques artificielles ». M. Brice Hortefeux a ainsi estimé que la réforme proposée par le Gouvernement ne créait aucune opposition entre les départements et les régions, d'une part, et entre les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), d'autre part, mais qu'elle visait à l'inverse à améliorer la complémentarité entre les différentes catégories de collectivités territoriales. De même, il a affirmé que le Gouvernement, attaché à maintenir les acquis de la décentralisation, souhaitait permettre à l'Etat et aux collectivités de se réformer dans un même élan.

a ensuite déclaré que les quatre projets de loi soumis au Sénat étaient structurés par trois objectifs :

- simplifier et alléger l'architecture territoriale ;

- renforcer la démocratie locale ;

- mettre en place des structures locales mieux adaptées aux besoins de chaque territoire.

Concernant le premier de ces objectifs, M. Brice Hortefeux a fait valoir que les collectivités territoriales fonctionneraient désormais en deux pôles, l'un étant constitué par les communes et les EPCI, et l'autre par les départements et les régions. Il a indiqué que la carte de l'intercommunalité devrait être achevée à l'horizon 2013. Mme Jacqueline Gourault lui ayant fait remarquer que l'article 30 du projet de loi de réforme des collectivités territoriales prévoyait que la nouvelle carte intercommunale serait définitivement et intégralement mise en place en 2014, M. Brice Hortefeux a rappelé que les associations d'élus, et notamment l'Association des maires de France, souhaitaient que cette échéance soit déconnectée des régionales de 2014 et préconisaient, en conséquence, que la date d'achèvement de la carte de l'intercommunalité soit fixée en 2011. Il a ainsi affirmé que le Gouvernement était prêt, dans une optique de dialogue et de concertation, à tenir compte de ces remarques.

a ajouté qu'il était nécessaire de rationaliser les périmètres des EPCI et de supprimer les structures superflues, comme, par exemple, les pays et certains syndicats intercommunaux. Il a estimé, à cet égard, que le dispositif retenu par le Gouvernement était équilibré, les importants pouvoirs conférés à la commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI) contrebalançant les nouvelles prérogatives octroyées aux préfets : les préfets et les CDCI devront ainsi travailler conjointement et dans un esprit partenarial.

Parallèlement, M. Brice Hortefeux a affirmé que la mise en place de liens plus étroits entre le département et la région passait par la création des conseillers territoriaux, siégeant à la fois au conseil général et au conseil régional ; cette réforme permettra, sans que cela en constitue un objectif, de diminuer le nombre d'élus locaux de moitié. Il a estimé que les élus seraient alors deux fois moins nombreux, mais deux fois plus influents, dans la mesure où ils auraient à la fois une vision de proximité, découlant de leur ancrage cantonal et départemental, et une vision stratégique au niveau de la région. Il a également mis en avant les avantages du mode de scrutin mixte proposé, en déclarant que le scrutin majoritaire permettrait aux conseillers territoriaux de représenter les territoires dont ils sont issus et que le scrutin proportionnel permettrait à tous les courants d'opinion d'être présents dans les exécutifs des collectivités territoriales. Affirmant que l'institution des conseillers territoriaux était un gage de simplicité, de pragmatisme et de lisibilité, il a jugé qu'elle mettrait fin aux débats sur une éventuelle fusion des départements et des régions.

Concernant le regroupement de collectivités territoriales, M. Brice Hortefeux a expliqué que la réforme permettrait de fusionner des communes en vue de créer des communes nouvelles, selon une procédure plus souple et plus efficace que celle prévue par la loi Marcellin de 1971, mais aussi de regrouper des départements entre eux et des régions entre elles. Dans ce cadre, il a estimé qu'il conviendrait également de prévoir un mécanisme de regroupement entre un département et une région, notamment pour répondre aux demandes des élus alsaciens.

a ensuite indiqué que la réforme permettrait de clarifier les compétences de chaque catégorie de collectivités territoriales, tout en respectant le consensus qui s'est dégagé autour du maintien de la clause générale de compétence des communes.

Il a déclaré vouloir s'inspirer de la mission sénatoriale présidée par M. Claude Belot et privilégier, comme elle, la voie de la spécialisation des compétences en reconnaissant cependant une certaine capacité d'initiative locale aux collectivités. Tout en rappelant que la question de la clarification des compétences exigeait un long débat préalable, il a jugé cependant nécessaire d'affirmer dès à présent les principes suivants :

- la loi doit attribuer au département et à la région des compétences exclusives et interdire à une autre collectivité de les exercer ;

- les départements et les régions doivent continuer à disposer d'une compétence d'initiative pour toutes les matières non réglées par la loi ;

- le partage des compétences ne doit être autorisé qu'à titre exceptionnel et organisé par convention autour d'une collectivité chef de file.

a par ailleurs indiqué que, à la suite des discussions d'ores et déjà engagées, il envisageait de permettre aux conseils régionaux comme aux conseils généraux d'intervenir directement auprès des communes.

S'agissant de l'encadrement des financements croisés, il a proposé qu'il soit fait obligation au maître d'ouvrage d'assurer une part significative de l'investissement financier.

Développant le deuxième objectif, à savoir le renforcement de la démocratie locale, il a rappelé que le projet de loi visait à permettre la désignation des conseillers communautaires par fléchage sur les listes des candidats aux élections municipales dans les communes de plus de 500 habitants, ou selon l'ordre du tableau dans les communes de moins de 500 habitants, ce qui permettrait de mieux prendre en compte la population dans la représentation communautaire. Il a souligné que l'abaissement à 500 habitants du seuil à partir duquel l'élection municipale aurait lieu au scrutin de liste améliorerait la parité au sein des conseils municipaux et que le texte prévoyait aussi un renforcement du statut de l'élu local.

Sur le troisième objectif, considérant que les métropoles sont indispensables pour garantir la compétitivité européenne des grands centres urbains, M. Brice Hortefeux a indiqué qu'elles auraient le statut d'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) et non celui de collectivité territoriale de plein exercice. Le seuil retenu pour permettre leur constitution sera de 450 000 habitants et elles ne pourront être créées que sur une base volontaire. Elles disposeront de compétences fortes en matière d'économie, de transport et de logement, ainsi que des compétences qui leur seront transférées sur une base obligatoire ou facultative par la région ou le département. La formule plus souple du pôle métropolitain permettra aux communes qui n'appartiendront pas à une métropole de mettre en place des coopérations renforcées.

Présentant le calendrier de la réforme, M. Brice Hortefeux a indiqué que seul le texte organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux ferait l'objet d'une procédure accélérée.

Enfin, tout en rappelant sa détermination à maintenir les grands principes qui structurent la réforme présentée, il s'est déclaré ouvert à la discussion sur les modalités retenues et il a émis le voeu de pouvoir bénéficier des conseils des sénateurs.

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