a d'abord insisté sur la conviction largement partagée par l'ensemble des acteurs de la nécessité de revoir l'organisation du pilotage du système de santé. Celui-ci est aujourd'hui illisible, en particulier pour les professionnels de santé et les patients, qui ne savent pas qui décide et où se situent les responsabilités. Le diagnostic de la situation actuelle fait l'objet d'un vrai consensus, de même que l'importance de retenir, pour le nouveau système de pilotage, un périmètre large comprenant à la fois les soins de ville, l'hôpital et le secteur médicosocial ainsi que la politique de santé publique. En effet, on estime aujourd'hui à cinq millions le nombre de journées d'hôpital inutiles, soit 20 % des séjours hospitaliers ou encore 2 milliards d'euros de dépenses qui pourraient être redéployés vers des structures en aval.
Par ailleurs, même si des progrès ont été enregistrés, notamment avec la loi de 2004, on constate encore beaucoup d'inégalités en matière de santé avec le creusement des déséquilibres entre des catégories privilégiées qui peuvent profiter pleinement du système et des classes défavorisées qui ont plus de difficultés à y accéder. C'est pourquoi il est impératif d'avoir une approche plus globale et plus efficace de l'ensemble des politiques et d'en assurer la régionalisation. La question de la proximité est désormais impérative pour pouvoir tenir compte de la diversité des situations de terrain. De ce point de vue, les agences régionales de santé (ARS) ne doivent pas être de simples transpositions des agences régionales de l'hospitalisation (ARH) car il faut leur confier un véritable pouvoir d'appréciation et de décision local.
La question centrale, qui fait d'ailleurs l'objet de quelques divergences avec le rapport du préfet Ritter, est celle du lien entre la mission d'organisation et la mission de régulation des dépenses au sein des ARS. Il faut en effet tenir compte de l'évolution du rôle de l'assurance maladie qui, depuis la réforme de 2004, n'est plus seulement un liquidateur mais aussi un rembourseur avisé et un gestionnaire du risque. Il serait dommage de remettre en cause cette nouvelle dynamique qui est le principal acquis de la dernière réforme.
Par ailleurs, il est très important de ne pas faire de l'organisation la seule réponse au problème actuel de la régulation du système de santé. Cela signifie que la simple réorganisation des structures ne pourra être suffisante. La création d'une administration unique de la santé, qui serait à la fois responsable du système comme employeur, organisateur et régulateur, serait un cas unique en Europe. Partout ailleurs, que ce soit en Grande-Bretagne, dans les pays nordiques ou en Allemagne, les responsabilités sont partagées, en particulier avec l'implication des échelons administratifs locaux. De même, si les moyens des Drass, des Ddass, des missions régionales de santé (MRS) et des ARH devront être regroupés, il faut avoir conscience que ce ne sera pas forcément un gage d'efficacité puisque les performances actuelles de chacune de ces administrations sont déjà insuffisantes. Il ne faudrait pas que les problèmes d'organisation deviennent prioritaires par rapport aux questions de régulation. De ce point de vue, le récent rapport de l'Igas sur les contrats de retour à l'équilibre des hôpitaux est très éclairant. Il montre bien les limites de tout exercice institutionnel si celui-ci n'est pas accompagné d'une démarche réellement vertueuse.
a ensuite souligné la nécessité de prévoir un pilotage national des ARS. Si le rapport de l'Assemblée nationale a d'emblée écarté, dans ses conclusions, un pilotage par le ministre de la santé, il a tout de même insisté sur l'importance d'un travail étroit entre les services du ministère et ceux de l'assurance maladie. C'est pourquoi il suggère la mise en place d'un secrétaire général qui aurait pour charge de piloter les ARS. Un triple enjeu se pose en effet à l'échelon national : l'organisation de l'offre de soins, la gestion des hôpitaux publics par un Etat à la fois propriétaire et employeur, enfin, la régulation des dépenses du système. La difficulté est de coordonner et de rendre cohérente cette triple mission à laquelle s'ajoutent les responsabilités de l'Etat stratège et normateur dans le domaine de la santé publique. C'est de l'efficacité de l'organisation nationale que dépendra l'efficacité des ARS. Il est donc impératif de clarifier les responsabilités à cet échelon.
Au niveau régional, il paraît essentiel de mettre de véritables outils de gestion entre les mains des ARS afin que celles-ci puissent agir dans des délais relativement brefs. Ainsi, sur l'ensemble du territoire, de graves problèmes de présence médicale vont très bientôt se poser avec des risques élevés en termes de sécurité sanitaire ; les ARS devront pouvoir les résoudre à leur niveau. Pour le pilotage de la gestion du risque, la question des conventionnements entre les ARS d'une part et les CPAM, le régime social des indépendants (RSI) et la mutualité sociale agricole (MSA) d'autre part, devra être résolue. Cela suppose une réforme préalable de l'assurance maladie et, en particulier, de ses structures régionales, Urcam et Cram. Le rapport de l'Assemblée nationale propose la création d'une direction régionale de la gestion du risque qui ferait l'interface entre la caisse nationale et les caisses primaires. Les relations entre les ARS et les directions régionales de la gestion du risque devront ensuite être formalisées. Il faut avoir conscience des grandes différences de culture entre les 11 000 fonctionnaires de l'Etat intervenant sur ces questions et les 80 000 agents de l'assurance maladie.
Un dernier élément apparaît essentiel pour la réussite de la réforme, celui de la création d'une nouvelle culture de responsabilité dans l'organisation qui sera mise en place. A l'échelon national, il est important que le Parlement ait une vision claire de ses responsabilités. Pour pouvoir assurer un pilotage fin du système de santé, il faudrait sans doute prévoir chaque année, à côté de la loi de financement de la sécurité sociale, le vote d'une loi d'organisation et d'accompagnement. Par ailleurs, les responsables du pilotage national des ARS devront disposer de feuilles de route claires permettant un contrôle et une évaluation approfondis par le Parlement. A l'échelon régional, les directeurs des ARS devront également disposer d'objectifs détaillés et bénéficier d'une rémunération en grande partie liée au mérite. Cette nouvelle culture de responsabilité devra s'étendre à chacun des acteurs sur le terrain et notamment aux directeurs d'établissement de santé.