Intervention de Christian Estrosi

Commission des affaires économiques — Réunion du 9 octobre 2007 : 1ère réunion
Agriculture et santé — Pesticides aux antilles - Audition de M. Michel Barnier ministre de l'agriculture et de la pêche mmes roselyne bachelot-narquin ministre de la santé de la jeunesse et des sports et nathalie kosciusko-morizet secrétaire d'etat chargée de l'écologie et M. Christian Estrosi secrétaire d'etat chargé de l'outre-mer

Christian Estrosi, secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer :

a ensuite indiqué que, dès sa prise de fonctions, il a mesuré l'ampleur du problème posé par l'usage des pesticides aux Antilles, dont le secrétariat d'Etat chargé de l'outre-mer assure, depuis des années, la bonne gestion transversale par l'ensemble des administrations compétentes. Ce dossier, parfaitement connu depuis le début des années quatre-vingt-dix, est périodiquement l'objet d'une médiatisation intense, dont le dernier épisode suscite de nouvelles inquiétudes liées à la santé publique et à l'économie des Antilles. En réponse à cette situation, le secrétariat d'Etat chargé de l'outre-mer a présenté, en liaison avec les autres ministères compétents, un certain nombre de propositions.

La première prévoit l'accentuation des contrôles, coordonnés par le Grefy (groupe régional phytosanitaire Martinique) et le Grepp (groupe régional d'études sur les pollutions par les produits phytosanitaires en Guadeloupe), organismes que président les préfets et qui associent des élus, les services compétents de l'Etat, les professionnels de l'agriculture, des magistrats et même, en Martinique, des représentants des médias. Dès l'année 2000, l'Afssa a été chargée d'évaluer le niveau d'exposition de la population au chlordécone et des seuils ont été fixés. Le ministère de la santé propose de revoir ces seuils à la baisse et il a été demandé aux préfets d'appliquer le principe de précaution en renforçant les contrôles effectués par les directions départementales de la concurrence et de la consommation et de la répression des fraudes (DDCCRF).

a insisté sur sa volonté de transparence lors de son récent voyage aux Antilles et sur son souhait de rendre publiques toutes les informations reçues à cette occasion. Il a regretté le nombre insuffisant des prélèvements effectués à des fins de contrôle : ceux-ci ne dépassent pas cent quatre-vingts par an et c'est pourquoi le Premier ministre a décidé de tripler, voire de quadrupler, les moyens des DGCCRF afin de rendre possible le quadruplement de ces prélèvements. Le contrôle de la qualité des eaux destinées à l'alimentation de la population et les messages de prudence en matière d'autoconsommation vont aussi être renforcés, dans la mesure où la contamination des parcelles destinées à l'autoconsommation est moins bien connue que celle des parcelles dédiées à la culture industrielle. Il faut d'ailleurs signaler aussi l'existence de parcelles non contaminées et cesser de dire que « la » Martinique ou « la » Guadeloupe est contaminée. C'est pourquoi l'idée d'un label qualité est actuellement à l'étude afin que les produits issus de parcelles non contaminées soient reconnus comme tels.

D'autres propositions prévoient la mise en place de mesures de gestion permettant de conforter l'agriculture et de déterminer quels produits peuvent être cultivés.

En ce qui concerne l'objectif de transparence, il est nécessaire que les données publiques sur la contamination soient rapidement mises en ligne sur un site Internet sous une forme synthétique et compréhensible. Il faut aussi améliorer la communication afin de ne pas laisser le dossier prendre des dimensions irrationnelles, illustrées par le caractère dangereusement schématique des avertissements lancés dernièrement. En particulier, il n'est pas justifié d'affirmer brutalement qu'un Antillais sur deux risque d'être atteint d'un cancer de la prostate et d'établir des comparaisons avec Haïti : on sait que l'espérance de vie des hommes à la Martinique est de soixante-dix-huit ans contre cinquante-trois ans en Haïti, ce qui peut expliquer l'écart des taux de prévalence du cancer de la prostate.

Il faut aussi améliorer la gestion des dossiers judiciaires et faire la lumière sur les errements qui auraient pu se produire après l'interdiction des pesticides. De tels errements sont régulièrement dénoncés sans que des procédures juridictionnelles soient engagées pour autant. Deux appels du ministère public contestant la recevabilité de plaintes déposées ont créé le doute dans l'opinion à cet égard. De même, sur huit dossiers transférés au procureur de la République par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), six ont débouché sur un non-lieu et deux ont donné lieu à des amendes de 700 euros. M. Christian Estrosi, secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer, a indiqué avoir demandé à la ministre de la justice que les enquêtes ouvertes dans ce domaine, ou susceptibles de l'être, soient conduites de la manière la plus efficace. Il serait aussi souhaitable de confier à l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (Oclaesp) des investigations plus nombreuses. La saisie plus fréquente de cet organisme par l'autorité judiciaire serait un signe fort de l'implication de l'Etat dans le dossier du chlordécone, sans doute instrumenté en partie par certains intérêts afin de justifier la demande de lourdes indemnisations. Cet aspect non négligeable du dossier n'empêche pas de rechercher ce qui s'est passé entre 1990, moment de l'interdiction du pesticide, et 1993, date d'expiration des dérogations accordées, notamment pour la banane.

La sanction de la mise en vente de produits non conformes est une autre dimension essentielle de la démarche judiciaire, dans la perspective de donner aux acheteurs une garantie de qualité. En ce qui concerne les producteurs dont les terres sont contaminées, une reconversion doit être envisagée, sur le modèle de la Réunion où la canne à sucre sert à fabriquer de l'énergie renouvelable, dans la perspective de développer de nouvelles filières. Le contexte actuel de préparation d'une loi de programme instituant des zones franches globales est favorable à cet égard : les énergies renouvelables et le développement durable peuvent être inscrits parmi les secteurs prioritaires retenus au titre des zones franches.

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