J'ai écouté attentivement notre rapporteure, mais je vais avoir du mal à la suivre dans ses conclusions. Je crois malheureusement, sans lui faire injure, que l'enfer est pavé de très bonnes intentions. Je m'explique : elle a évoqué tout d'abord l'intervention de l'Union européenne sur le sujet du congé de maternité. Il me semble que l'Europe, dans ce domaine, est à la limite de ses compétences. Si le droit du travail la concerne, le droit de la famille outrepasse ses attributions. J'aurais aimé que les députés européens soient plus prudents car il est très facile de voter un texte quand les conséquences, notamment financières, n'ont pas à être assumées. Je suis prêt à changer d'avis sur la question si l'Europe accorde des subventions à tous les Etats membres, mais je doute que le coût de telles mesures lui permette d'y faire face.
Ensuite, il me semble qu'éloigner encore plus les femmes du monde du travail ne soit pas la bonne orientation politique à suivre. Cette démarche, qui a été communément adoptée dans le passé pour résoudre certains dysfonctionnements du marché du travail, est dangereuse. Les mères qui souhaitent travailler ne méritent pas d'être pénalisées par un éloignement croissant du monde du travail. L'allongement du congé de maternité constituera un handicap supplémentaire pour les femmes qui ont déjà du mal à trouver un emploi. Il ne faut pas renforcer la tendance déplacée qu'ont certains employeurs à voir dans les femmes avant tout de futures mères. Cette proposition de loi ne va pas dans le bon sens à cet égard.
Enfin, le problème du coût demeure. L'Union européenne a prudemment proposé que l'indemnisation du congé soit plafonnée, ce qui est déjà le cas dans la plupart des pays. La France est actuellement l'un des pays les plus généreux en la matière. L'Etat membre qui offre le plus long congé de maternité est la Bulgarie, avec cinquante-neuf semaines, mais si faiblement indemnisé qu'il n'en résulte aucun effet positif sur la natalité bulgare ; au contraire les femmes sont de cette façon réduites à la misère.
La question de l'aide aux familles ne sera pas réglée en modifiant la durée du congé de maternité. Il faudrait plutôt aider davantage les familles qui assurent l'avenir du pays, c'est-à-dire celles de trois enfants et plus. Les prestations sociales dont elles bénéficient sont nettement insuffisantes par rapport à leurs charges, comparées à celles des familles ayant peu ou pas d'enfants.
Nous n'avons pas évoqué l'estimation du coût des mesures proposées. Certaines sources avancent le chiffre de plusieurs milliards d'euros. Si c'est avéré, cela viendra s'ajouter au déficit déjà abyssal de l'assurance maladie.
Je ne vois pas non plus l'effet que vos propositions pourront avoir sur l'exercice libéral. Une femme avocate ou médecin ne peut se permettre un long congé de maternité si elle veut conserver sa clientèle. Aucune forme de protection législative ou réglementaire de cette population ne sera efficace. C'est pour toutes ces raisons que je voterai contre ce texte.