Intervention de Christian Cointat

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 18 mai 2011 : 1ère réunion
Fonctionnement des institutions de la polynésie française — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Christian CointatChristian Cointat, rapporteur :

Le Parlement a adopté en 2004 un nouveau statut pour la Polynésie française, qui lui accorde une large autonomie ; mais le système électoral adopté -6 circonscriptions, c'est-à-dire une pour chaque archipel éloigné, une pour Tahiti et Moorea et une pour les îles-sous-le-Vent- n'a pas donné les résultats escomptés en matière de stabilité politique. En 2007, une première modification a donc été tentée, qui supprimait la prime majoritaire ; mais elle n'est jamais entrée en vigueur, car fin 2007 une nouvelle modification est intervenue qui conservait les six circonscriptions et remplaçait le scrutin à un tour par une élection proportionnelle à deux tours. L'instabilité a perduré.

Le gouvernement propose donc une troisième modification pour remédier enfin à une instabilité gouvernementale catastrophique pour la Polynésie, car elle y bloque les décisions d'investissement et les perspectives de développement économique. La situation est grave.

Le dispositif repose sur cinq circonscriptions : quatre pour les archipels éloignés qui auraient chacun trois sièges et une prime majoritaire d'un tiers ; et une circonscription unique pour toutes les îles de la Société, divisée en quatre sections avec également une prime majoritaire d'un tiers. Cela fait un siège de prime majoritaire pour chacun des archipels éloignés -soit 4 sièges- et 15 pour les îles de la Société, soit, au total, 19 sièges de prime majoritaire. C'est mieux que le système actuel, mais cela ne règle pas le problème de l'instabilité car les 12 sièges des archipels éloignés resteront hors de l'accord « gouvernemental », demeurant des électrons libres qui ne peuvent que recréer l'instabilité. Supposons par exemple que, dans les îles de la Société, dotées de 45 sièges, une liste atteigne au deuxième tour à peine 40 % des voix et que deux autres listes en obtiennent ensemble moins de 40 %. Cette liste aura les 15 sièges de prime majoritaire, plus seulement 13 ou 14 sièges, soit un total de 28 ou 29 sièges, et donc une très fragile majorité. C'est un peu la quadrature du cercle. Je ne vous cache pas que Mme Penchard est attachée au système qu'elle propose et que j'ai vainement tenté de la convaincre de ses inconvénients.

Comment faire pour que les archipels soient correctement représentés, comme le demande le Conseil constitutionnel dans sa décision de février 2004, tout en garantissant la stabilité institutionnelle ? Je propose de faire de l'ensemble de la Polynésie française une circonscription unique découpée en sections, en reprenant le découpage prévu par Mme Penchard, avec quatre sections pour les îles de la Société et une pour chacun des quatre archipels éloignés. Les listes de candidats porteraient sur l'ensemble de la Polynésie ; les îliens seront donc représentés, mais avec les autres polynésiens. L'intégralité de la prime majoritaire sera accordée à la liste arrivée en tête sur l'ensemble de la circonscription, de façon à lui assurer une majorité confortable. Sur ces points, la discussion a été tendue avec le ministère...

Sur la motion de défiance, deuxième facteur d'instabilité, je suis du même avis que pour la Martinique : un tiers de signataires. La ministre veut garder la proportion des trois cinquièmes pour l'adoption. Cela rend plus difficile l'adoption de la motion dite « constructive » dans la mesure où l'on doit la présenter avec un candidat pour remplacer le président de la Polynésie française et un programme. Mais si malgré tout, on présente une telle motion et qu'elle dépasse la majorité absolue sans atteindre les trois cinquièmes, comment le président peut-il continuer à gouverner ? Il ne peut qu'y avoir blocage puis dissolution, ce qu'il faut éviter. Je propose donc un dispositif qui ménage la chèvre et le chou. On conserve la possibilité qu'un tiers des membres de l'assemblée dépose une motion de défiance -une seule par an- qui devra obtenir le vote de la majorité absolue des membres de l'assemblée. En revanche, contre le budget, je propose de conserver la majorité des trois cinquièmes. C'est exactement le dispositif prévu pour la Nouvelle-Calédonie.

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