Intervention de Philippe Marini

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 7 septembre 2011 : 1ère réunion
Deuxième loi de finances rectificative pour 2011 — Examen du rapport

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur général :

L'ordre de grandeur est analogue à celui que j'indiquais à notre commission des finances en avril en parlant d'une fourchette de 10 à 15 milliards d'euros, puis de 11 milliards en juin. En somme, plus la situation devient difficile, plus on écoute la commission des finances du Sénat ... Avec la révision de l'hypothèse de croissance fin août, les 20 milliards d'euros environ qu'il faut trouver pour réduire le déficit de 5,7 % à 4,5 % du PIB entre 2011 et 2012 devront provenir en totalité de l'effort structurel, puisque l'on ne peut plus rien attendre de la conjoncture. Si l'on combine les 11 milliards d'euros annoncés le 24 août aux mesures déjà prévues par la programmation, on constate que l'effort se partage, de façon équilibrée, pour moitié entre maîtrise des dépenses et amélioration des recettes. Il n'est donc pas exact d'affirmer, comme on l'entend parfois, que le Gouvernement fait porter l'effort sur la recette et non sur les dépenses. Le plan Fillon du 24 août est un additif. Il faut l'analyser en le replaçant dans la cohérence d'ensemble.

Pour finir, venons-en à la révision de l'équilibre budgétaire. Ce collectif devrait acter un surcoût de déficit de 3,4 milliards d'euros qui s'explique par la diminution des recettes de l'impôt sur les sociétés et la hausse de l'inflation, en partie compensées par de nouvelles mesures fiscales. Le dérapage des dépenses de 1 milliard n'est pas gagé car l'inflation offre une marge de manoeuvre supplémentaire de 2,8 milliards pour respecter la norme « zéro volume ». C'est toute l'ambiguïté de la situation : l'inflation est une bonne nouvelle pour les administrations dépensières. Quant à la norme « zéro valeur », nous restons dans les clous grâce à l'annulation de crédits de 460 millions d'euros pour solder l'affaire des frégates de Taiwan. Ces observations devront naturellement être révisées à la lumière de l'éventuelle augmentation des charges du secteur social en raison du surcroît d'inflation et du montant final des Opex. En attendant, ce surcoût de déficit ne remet pas en cause la trajectoire de la charge de la dette de l'État.

Quelles seront les principales variations affectant le tableau de financement de l'État ? D'abord, un besoin de financement qui croît de 1,4 milliard. Puis des ressources de trésorerie en augmentation sans qu'il soit besoin d'accroître les émissions de bons du Trésor à taux fixe et à intérêt précompté (BTF), grâce, notamment, à la prudence des collectivités territoriales. La ligne « Autres ressources de trésorerie » est majorée de 1,5 milliard, correspondant essentiellement à la hausse de la provision pour charge d'indexation incluse dans le déficit budgétaire.

Pour autant, des tensions se font jour sur la dette de l'État. J'en veux pour preuve le creusement de l'écart des taux d'intérêt à dix ans entre la France et l'Allemagne durant l'été en raison d'une aversion de plus en plus marquée pour le risque, compte tenu des incertitudes pesant sur la dette grecque qui a profité à la France mais encore plus à l'Allemagne. La dégradation de la note des Etats-Unis et la contagion de la crise à l'Espagne et à l'Italie ont concentré l'attention des investisseurs sur la France, considérée parfois comme le pays noté triple A le plus fragile en raison de son déficit et de l'exposition, supposée ou réelle, de ses banques aux pays du Sud de l'Europe. En outre, les contrats d'assurance contre le défaut de paiement ou CDS ont atteint des niveaux record pour la France durant l'été. La prime de risque sur la dette française est deux fois plus importante que celle sur la dette allemande. Notre niveau de CDS est supérieur à celui de la Finlande, des Pays-Bas, de l'Autriche, des Etats-Unis, du Royaume-Uni, du Japon, de la Norvège, du Danemark ou encore de la Suède. Une information significative ! Il est donc urgent de relativiser les considérations corporatistes dans lesquelles notre monde politique semble s'être embourbé ces derniers jours !

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