Intervention de Danièle Karniewicz

Commission des affaires sociales — Réunion du 16 septembre 2010 : 1ère réunion
Réforme des retraites — Audition de Mme Danièle Karniewicz secrétaire nationale de la confédération française de l'encadrement - confédération générale des cadres cfe-cgc et présidente du conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance vieillesse cnav

Danièle Karniewicz, présidente du conseil d'administration de la Cnav :

Il faut bien distinguer deux choses : d'une part, les conditions pour être admis au bénéfice de la retraite, qui sont les mêmes pour les femmes que pour les hommes, d'autre part, les types d'emplois. Il est bien évident que les petits salaires ne font pas les grosses retraites. Il existe cependant, dans notre système des solidarités, des mécanismes de compensation, d'autant plus nécessaires aujourd'hui que les évolutions sociales veulent que, de plus en plus souvent, les femmes ne vivent plus en couple leurs années de retraite.

J'en viens au coût des carrières longues. Deux nouvelles mesures viendront modifier le dispositif. La prise en compte du début d'activité à l'âge de dix-sept ans, pour un coût de 300 millions, et un lissage dans le temps, annoncé la semaine dernière, des effets de la mesure d'âge - un assuré né en 1955 qui prévoyait de partir à cinquante-six ans en 2011 ne se verrait contraint de reculer son départ que d'un trimestre au lieu d'un an et demi - pour un coût de 350 millions en 2018. J'insiste sur le fait que le dispositif après réforme ne permettra à personne de partir plus tôt qu'auparavant : il s'agit d'un simple lissage.

Sur la question des polypensionnés, nous n'avons pas de réponse toute faite. Il s'agit là d'un sujet très complexe. Il ne suffit pas de décider que l'on retiendra les vingt-cinq meilleures années sur toute la carrière car se pose ensuite la vraie question du choix des règles à appliquer : celles de quel régime retiendra-t-on ? La Cnav a mis en oeuvre la règle des vingt-cinq meilleures années pour la génération née en 1948, le RSI pour la génération née en 1953 : à laquelle de ces règles faire référence pour les polypensionnés ? Il faut une étude approfondie pour prendre en compte les différents parcours et les différentes législations et avoir une appréciation des coûts. Même problème pour la combinaison emploi public-emploi privé : il ne faudrait pas que le différentiel soit toujours pris en charge par le privé...

L'Assemblée nationale a prévu le remboursement des rachats de trimestres inutiles, avec un coefficient de revalorisation identique à celui des pensions de retraite. Mais rien n'est dit sur le nombre de trimestres à rembourser : leur remboursera-t-on l'intégralité, ou seulement la partie qui ne leur aura pas été utile ? Le rachat de trimestres concerne 9 000 assurés actifs du régime général, dont 3 300 ont racheté un nombre de trimestres inférieur ou égal au nombre nécessaire, et 5 700 un nombre de trimestres supérieur. Le coût du remboursement serait de 260 millions en cas de remboursement total, de l'ordre de 171 millions si n'étaient remboursés que les trimestres inutiles.

Le coût de la majoration pour conjoint à charge a été de 54 millions en 2009, pour 172 000 bénéficiaires. La suppression de l'avantage ne concerne que les futurs retraités. Sachant qu'il y a eu 12 200 bénéficiaires nouveaux en 2009, l'économie annuelle, sur le flux, serait de 3,4 millions.

Le dispositif de retraite progressive permet aux salariés d'au moins soixante ans d'arrêter leur activité en sifflet. Il n'a concerné, depuis sa création en 2006, que 2 500 personnes. Quelque 34 % des bénéficiaires ont une fraction de pension servie à 30 %, 43 % à 50 %, et 23 % à 70 %. La faiblesse de ces chiffres tient sans doute au fait que le décret d'application est sorti tardivement, que la mesure est peu connue et que la crainte demeure qu'elle puisse être remise en cause. A quoi s'ajoutent, je puis vous le dire d'expérience, les difficultés, pour le salarié, à négocier un accord, non seulement avec l'employeur, mais avec les équipes de travail.

Le recul de l'âge légal ne risque-t-il pas de transférer les coûts sur l'assurance chômage ? La question vaut d'être posée, et c'est pourquoi il nous faudra faire preuve de beaucoup de pédagogie sur un projet de société qui nous concerne tous, y compris les employeurs, dans les négociations d'entreprise... Pour l'heure, il faut tout mettre en oeuvre pour favoriser l'emploi des seniors, par des mesures incitatives.

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