La mission « Immigration, asile et intégration » est probablement moins consensuelle que la mission « Régimes sociaux et de retraite » ! Toutefois, elle ne représente que 15,3 % des crédits globalement consacrés par l'Etat à la politique transversale d'immigration et d'intégration. En effet, cette politique implique d'autres ministères : affaires étrangères, affaires sociales, éducation nationale, etc. Globalement, cette politique transversale représente 4,3 milliards d'euros en crédits de paiement. Ce chiffre doit toutefois être pris avec précaution étant donné le mode de calcul de la contribution de chaque mission à la politique transversale. En effet, la contribution de la mission « Recherche et enseignement supérieur », par exemple, est calculée en rapportant le budget des universités à la proportion d'étudiants étrangers faisant leurs études en France.
Ma présentation de la mission s'articulera en trois parties :
- tout d'abord, des observations sur la disparition d'un ministère dédié à l'immigration. Je rappelle que celui-ci, créé en 2007, a été supprimé en 2010 et est aujourd'hui intégré au ministère de l'intérieur ;
- puis, les principaux éléments chiffrés du projet de loi de finances pour 2012 ;
- enfin, l'évolution de la situation financière de l'Office français pour l'immigration et l'intégration (Ofii).
A titre liminaire, je tiens à souligner qu'à la date du 10 octobre 2011, l'intérieur avait répondu à 100 % des cinquante questions adressées par votre commission des finances, ce qu'il convient de saluer.
En novembre 2010, suite au remaniement du Gouvernement, le ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire a été supprimé, trois ans après sa création. Son architecture est toutefois préservée sous la forme d'un secrétariat général à l'immigration et à l'intégration (SGII), au sein du ministère de l'intérieur.
Au regard de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), il est satisfaisant pour notre commission de constater que la maquette budgétaire n'est pas altérée par ces modifications administratives et que la mission « Immigration, asile et intégration », telle que présentée les années précédentes, est préservée. C'est la première remarque que je souhaitais formuler.
S'agissant des crédits prévus pour la mission en 2012, je relève qu'ils connaissent une forte hausse par rapport à la loi de finances initiale pour 2011 : + 12,1 % en autorisations d'engagement - ce qui porte les crédits à 561 millions d'euros - et + 12,6 % en crédits de paiement - qui atteignent donc 632 millions d'euros en 2012. Du fait de cette hausse, la mission dépasse significativement - d'environ 15 % - les plafonds fixés par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014.
Je relève par ailleurs que 65 % des crédits de paiement de la mission sont consacrés à l'accueil des demandeurs d'asile, 11 % à l'intégration des étrangers et 13,5 % à la lutte contre l'immigration irrégulière, c'est-à-dire, en pratique, au financement des centres de rétention administrative (CRA). Les 10 % restants correspondent au fonctionnement du SGII. Ces crédits n'englobent donc pas ceux consacrés à la police et à la gendarmerie, qui figurent dans la mission « Sécurité ».
L'augmentation des dotations de la mission vise à répondre aux critiques récurrentes de notre commission sur la sous-budgétisation des moyens destinés à financer l'hébergement des demandeurs d'asile et le versement, à leur profit, de l'allocation temporaire d'attente (ATA). Ces crédits augmentent de 87 millions d'euros, soit une hausse de près de 25 % sur le premier des deux programmes de la mission. Dans le détail, 51 millions d'euros supplémentaires viennent abonder l'hébergement d'urgence et 36 millions d'euros l'ATA.
On peut toutefois craindre qu'en raison de la hausse constante de la demande d'asile - encore + 9,5 % sur les six premiers mois de l'année 2011 - et du coût marginal croissant de l'hébergement des demandeurs, la majoration des crédits correspondant à la demande d'asile ne suffise pas à couvrir les besoins en 2012.
S'agissant de l'origine des demandeurs d'asile, on constate, sur les six premiers mois de l'année 2011, que le premier pays est le Rwanda, avec 3 165 demandes, suivi du Bangladesh, ce qui est plus étonnant - 2 311 demandes - du Kosovo, de la Russie, de l'Arménie, même si ce pays est une démocratie, puis de la République démocratique du Congo, du Sri Lanka, de la Guinée et, enfin, de la Mauritanie. Le problème rencontré est de pouvoir identifier les critères à partir desquels un étranger peut légitimement être considéré comme un demandeur d'asile.
Le nombre de places en centres d'accueil des demandeurs d'asile (CADA) a beaucoup augmenté depuis 2011, il est aujourd'hui de 21 700. Malheureusement, il ne suffit pas à accueillir l'ensemble des demandeurs, étant donné le rythme d'accroissement des demandes. Les demandeurs d'asile sont donc logés dans des dispositifs d'hébergement d'urgence, dont le coût marginal est croissant, ce qui explique pourquoi la hausse du coût budgétaire de la demande d'asile est plus rapide que la seule augmentation du nombre de demandeurs.
L'évolution des délais moyens de traitement des demandes d'asile par l'office français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra) est une autre source d'inquiétude. En effet, malgré un renfort de trente officiers de protection supplémentaires depuis le début de l'année 2011, le délai moyen continue d'augmenter. Il est passé de 118 jours en 2009 à 150 jours en 2011. Or, nous avons chiffré à environ 15,7 millions d'euros le coût, pour le budget de l'Etat, d'un mois supplémentaire de procédure relative à la demande d'asile. Si le délai repassait sous la barre des 100 jours, la procédure devant l'Ofpra en serait à la fois plus acceptable humainement et budgétairement plus efficace.
S'agissant du second programme de la mission, « Intégration et accès à la nationalité française », qui ne représente que 71,6 millions d'euros en crédits de paiement en 2012, ma principale remarque porte sur l'Office français pour l'immigration et l'intégration, qui met en oeuvre les actions d'intégration au profit des étrangers. Celui-ci connaît une baisse de 7,6 % de la subvention pour charge de service public versée par l'Etat. Toutefois, cette diminution est largement compensée par la hausse des recettes fiscales propres de l'office, dont la réforme se poursuit dans le présent projet de loi de finances. Les recettes fiscales qui lui sont affectées sont ainsi passées de 108 millions d'euros en 2009 à 155 millions d'euros en 2012. Il faudra que nous veillions à ce que cette ressource soit adaptée aux besoins de l'Ofii.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose d'adopter les crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ».