Intervention de Robert Badinter

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 14 juin 2011 : 1ère réunion
Accord de stabilisation et d'association entre la communauté européenne et la serbie — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

La Serbie a toujours entretenu des rapports affectifs complexes avec la France et je crois que les Serbes n'ont toujours pas surmonté leur ressentiment à l'égard de l'attitude de la France lors des conflits dans l'ex-Yougoslavie et pendant l'intervention de l'OTAN.

Je me souviens ainsi de l'attitude surréaliste de Slobodan Milosevic en 1991, lors de l'éclatement de l'ex-Yougoslavie, qui s'attendait à ce que la France entre en guerre aux côtés de la Serbie face à la Croatie et à la Slovénie, soutenues par l'Allemagne, en souvenir de la Première et de la Deuxième Guerre mondiale et pour empêcher une domination allemande dans les Balkans. Je lui avais alors répondu que, depuis la Deuxième Guerre mondiale, la France s'était heureusement réconcilié avec l'Allemagne, ce qui avait permis le lancement de la construction européenne, dont Sarajevo, ville multiethnique, était précisément le symbole.

Parmi les pays de la région des Balkans occidentaux, la Serbie se distingue par son poids démographique, sa taille relativement grande, son potentiel économique et la stabilité de ses institutions. Ce pays n'est pas confronté, comme d'autres, aux défis de la viabilité institutionnelle et économique.

Même s'il reste de nombreux progrès à accomplir, la Serbie a vocation à adhérer à l'Union européenne et on ne peut que se féliciter de son rapprochement avec l'Union européenne.

Il reste toutefois la question de la non-reconnaissance du Kosovo par la Serbie. La position serbe, qui continue de considérer que le Kosovo fait partie intégrante de la Serbie, ne me paraît pas tenable à long terme, car, comme dans la vie conjugale, le consentement des deux époux est un préalable pour vivre sous un même toit. Or, en raison du passé, les Kosovars ont depuis longtemps renoncé à l'idée d'un rattachement à la Serbie. Il me semble donc qu'à terme la Serbie sera contrainte de reconnaître l'indépendance du Kosovo, mais qu'elle utilisera cette carte comme contrepartie à son adhésion à l'Union européenne.

Enfin, je me félicite de l'arrestation de Ratko Mladic et de sa remise au tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie. L'histoire nous enseigne que, même plusieurs années après, tous les criminels finissent pas être jugés et doivent rendre compte de leurs actes devant la justice.

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