s'est réjoui tout d'abord à la fois du choix du Gouvernement, qui ne s'imposait pas juridiquement, d'une ratification de cette convention par la voie parlementaire et de la saisine pour avis de la commission, fait exceptionnel s'agissant d'une convention.
Il a rappelé que la convention sur la diversité des expressions culturelles avait été adoptée par l'UNESCO le 20 octobre dernier, après un long processus de négociations, et qu'elle concrétisait le succès des efforts conduits par la France et le Canada, à l'origine du projet, par les Etats de la francophonie, mais aussi par l'Union européenne et les pays du Sud.
Puis il a souhaité répondre à deux questions essentielles :
- pourquoi faut-il protéger et promouvoir la diversité culturelle ?
- quelles avancées représente la convention pour le droit international ?
Il a indiqué que les enjeux étaient à la fois culturels et économiques, les deux étant d'ailleurs liés. En effet, la mondialisation de l'économie et les progrès des technologies de l'information et de la communication facilitent la circulation des biens et services culturels, mais les mécanismes en vigueur ne jouent pas nécessairement en faveur de relations culturelles équilibrées. Avec la concentration des entreprises et la production de biens et services uniformisés, il existe un risque à la fois de domination et d'appauvrissement culturels. Compte tenu de la spécificité des biens et services culturels, c'est l'avenir du pluralisme culturel, y compris linguistique, qui est en jeu.
en a conclu que le défi était donc politique et économique. En effet, la part des industries créatives et culturelles dans le produit intérieur brut mondial et dans les échanges mondiaux ne cesse de croître (60 milliards de dollars en 2002), et leur impact est donc considérable sur les économies.
Le rapporteur pour avis a rappelé que le secteur audiovisuel représentait à lui seul plus d'un million d'emplois pour l'Union européenne, pour un chiffre d'affaires de 88 milliards d'euros en 2003, dont 81 % pour la télévision et 19 % pour le cinéma, cette réalité expliquant d'ailleurs le fort engagement des Américains en vue d'une libéralisation de ces échanges et, parallèlement, leur faible enthousiasme à l'occasion des négociations.
Puis il a présenté les avancées incontestables apportées par la convention, qui vient compléter et s'appuyer sur le corpus juridique des conventions existantes, notamment la convention de 1972 sur la protection du patrimoine mondial et la convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, également en cours de ratification.
a exposé, ensuite, les principaux apports de la convention :
- elle reconnaît la double nature, économique et culturelle, des activités, biens et services culturels, cette spécificité étant ainsi consacrée pour la première fois en droit positif ;
- elle concerne la diversité des « expressions culturelles » et autorise les parties à prendre des mesures appropriées telles que des aides financières publiques, l'encouragement et le soutien d'institutions ou d'artistes, la promotion de « la diversité des médias », destinées à les promouvoir ou à les protéger lorsqu'elles sont soumises à un risque d'extension ou à une menace grave. Elle vise à la fois la création, la production, la diffusion et la distribution des expressions culturelles, mais aussi la faculté pour les individus et les groupes sociaux d'avoir accès aux diverses expressions culturelles provenant de leur territoire ainsi que des autres pays du monde. Elle incite également les parties à reconnaître l'importante contribution des artistes et de tous ceux qui sont impliqués dans le processus créateur, ainsi qu'à mettre en place des programmes d'éducation, de formations et d'échanges dans le domaine des industries culturelles ;
- elle comporte un important volet en faveur de la coopération internationale. A ce titre, la conclusion d'accords de coproduction et de codistribution, par exemple, est encouragée. Le soutien financier aux actions de coopération passera également par la création d'un Fonds international pour la diversité culturelle.
s'est étonné, cependant, de ce que les mesures relatives à la langue ne figurent dans le texte que de façon incidente, alors qu'il s'agit là d'un volet essentiel du concept de diversité culturelle. Mais il a rappelé qu'il convenait de replacer ce texte dans le cadre plus général des différentes conventions existantes. Il a formé le voeu que la convention renforce la prise de conscience et la motivation des Etats, pour à la fois défendre l'usage de leur langue et encourager la diversité linguistique.
En outre, il a relevé que le texte ne reprenait pas complètement les souhaits émis par la France puisque, comme tout compromis, il comporte aussi des limites.
Il a regretté, ainsi, qu'il fixe un statut juridique en réalité peu contraignant :
- en premier lieu, en raison de la délicate articulation entre cette convention et les autres instruments juridiques internationaux. Le texte consacre le principe de non-subordination de la convention aux autres traités, mais sa rédaction sibylline n'est pas sans ambiguïté ;
- en second lieu, en raison de la faiblesse du mécanisme de règlement des différends, qui n'est assorti d'aucune clause contraignante ni de sanctions, les parties pouvant d'ailleurs choisir de ne pas y adhérer.
Le rapporteur pour avis a estimé, toutefois, qu'il ne fallait pas sous-estimer l'intérêt d'un tel mécanisme, dont le caractère incitatif n'en sera pas moins réel.
Il a indiqué que la convention venait d'ores et déjà fortifier les politiques culturelles françaises et européennes, qu'elle constituait une référence incontournable et qu'il était déjà possible de mesurer son impact concret, par exemple :
- dans le nouveau programme européen « Culture 2007-2013 », qui inclut désormais des industries culturelles non audiovisuelles ;
- dans la nouvelle proposition de directive « Télévision sans frontières » ;
- dans le secteur du cinéma, dans la mesure où il n'est pas interdit de penser que le processus d'adoption de la convention a pesé dans la récente décision de la Commission européenne d'approuver, sous conditions, le dispositif français de soutien à la production et à la diffusion cinématographique.
a appelé néanmoins à la vigilance, une volonté politique étant nécessaire pour que la convention ait un impact réel, notamment dans le cadre des négociations commerciales internationales de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Il a ajouté que les Etats-Unis poursuivaient leur stratégie de contournement, consistant à multiplier les accords bilatéraux, comportant des clauses culturelles, avec des Etats parties à la convention.
Aussi bien a-t-il jugé souhaitable d'abord d'atteindre, dès que possible -d'ici à la fin de l'année- l'objectif des 30 ratifications, condition de l'entrée en vigueur du texte, mais aussi d'aller au-delà, afin de renforcer sa portée.
Dans cette perspective, il s'est réjoui de la forte mobilisation à la fois d'institutions internationales, telles que le Conseil de l'Europe ou l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, mais aussi de la part d'organisations issues de la société civile, telles que la trentaine de « coalitions européennes pour la diversité culturelle ».
En outre, M. Jacques Legendre, rapporteur pour avis, a proposé de sensibiliser, par courrier établi au nom de la commission, les sénateurs, présidents ou membres de groupes interparlementaires d'amitié, afin qu'ils exposent à leurs collègues étrangers les enjeux de cette convention et l'intérêt qu'il y aurait pour leur pays de procéder rapidement à sa ratification.
Il s'est enfin félicité que la France soit l'un des premiers pays à déposer ses instruments de ratification, après le Canada, l'Ile Maurice et le Burkina-Faso.
A l'issue de l'exposé du rapporteur pour avis, un débat s'est engagé.