L'agence de la biomédecine a remis en avril dernier, au Gouvernement et au Parlement, un rapport d'information à caractère prospectif sur l'usage des cellules souches embryonnaires humaines. Des essais cliniques sont en cours, dans lesquels des cellules embryonnaires sont utilisées pour soigner des patients - ou plutôt des cellules adultes issues de cellules embryonnaires pluripotentes. Trois protocoles de ce genre ont été autorisés aux Etats-Unis par la Food and Drug Administration (FDA). L'un porte sur la réparation des lésions de la moelle épinière causées en général par des accidents de la route et qui peuvent occasionner une tétraplégie : on espère ainsi régénérer les cellules nerveuses détruites au point d'impact. Ce protocole en est à la phase 1, c'est-à-dire que l'on en est encore à établir son innocuité. Deux autres portent sur la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA), l'un sur une forme génétique affectant les personnes jeunes, l'autre sur la forme qui frappe les personnes âgées - c'est la première cause de cécité chez ces dernières. Là encore, on n'en est qu'à la phase 1. Des patients ont été inclus dans le premier de ces protocoles, et sont sous observation : on veut s'assurer qu'ils ne développent pas de tumeurs.
En Europe, cinq ou six protocoles pourraient arriver bientôt au stade de la recherche clinique, dont un ou deux en France. Les travaux du professeur Menasché portent sur la réparation du muscle cardiaque après un infarctus ; il a d'abord essayé d'injecter à l'endroit de la lésion des cellules adultes prélevées dans la cuisse du malade, mais ce fut un échec. Il veut donc faire la même tentative à partir de cellules embryonnaires et va bientôt déposer un dossier de recherche clinique auprès de l'Afssaps : il s'agit d'ensemencer un patch avec ces cellules pour l'implanter au lieu de la plaie. Quant au professeur Marc Peschanski, il cherche à fabriquer des cellules de peau pour les grands brûlés, et d'abord - car leur cas est plus simple - pour les personnes affectées d'un ulcère permanent à la jambe à cause d'une drépanocytose.
Les recherches ont donc un caractère scientifique et technique au début, mais elles s'inscrivent dans une chaîne, dont l'extrémité est le soin. Ce sont des projets d'ensemble qui nous sont soumis, même si chaque phase doit être autorisée. C'est parce que le professeur Menasché voulait soigner des personnes ayant subi un infarctus que Michel Pucéat a entrepris ses travaux sur la dérivation.
Les cellules souches présentent-elles des risques ? Puisqu'elles prolifèrent à l'infini, elles produisent des tératomes. Il est donc indispensable, avant de s'en servir à des fins thérapeutiques, de les faire passer au stade adulte. Des tests sont ensuite réalisés, grâce à des marqueurs fluorescents, pour vérifier qu'il ne reste aucune cellule embryonnaire mais tout test est faillible. Les chercheurs craignent aussi des réactions immunitaires, car les cellules implantées ont un système immunitaire propre. Le risque de rejet est encore plus important pour les cellules iPS, issues de cellules adultes.
Je ne crois pas en revanche que l'on puisse dire que les cellules iPS sont des OGM, car le génome n'est pas touché : on ne fait qu'activer ou désactiver certains gènes par des techniques de génie génétique, pour forcer la cellule à adopter le comportement souhaité. Il ne me semble pas que ces cellules aient encore été utilisées dans des essais cliniques. Lors du dernier congrès de la Stem Cell Society, chacun avait convenu que l'on en était encore loin. Mais le professeur Douay n'est pas du même avis : s'il réussissait à obtenir des globules rouges, tout pourrait aller très vite...
Madame Hermange, il n'y a pas de procédé de « vitrification lente ». On procède soit par congélation lente, qui ne produit pas beaucoup de naissances comme je vous l'ai indiqué ; soit par vitrification - qui se caractérise par une descente rapide en température -, et il existe des études portant sur six cents enfants nés ainsi en Italie du Nord et sur deux mille naissances au Japon, pour lesquels on ne constate pas d'anomalie majeure liée à l'utilisation du milieu gras, qui connaît d'autres emplois en biologie.