Intervention de Francis Delon

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 29 mars 2006 : 1ère réunion
Défense — Sécurité intérieure - livre blanc sur la sécurité intérieure face au terrorisme - Audition de M. Francis delOn secrétaire général de la défense nationale

Francis Delon, secrétaire général de la Défense nationale :

a rappelé que, sur proposition du ministre de l'intérieur, le Premier ministre avait décidé, en mai 2005, la réalisation d'un Livre blanc du gouvernement sur la sécurité intérieure face au terrorisme, fondé sur une réflexion globale de la stratégie nationale de lutte antiterroriste et ayant un triple objectif : objectif stratégique, d'abord, par la définition de la menace et des risques encourus par notre pays ; objectif opérationnel, ensuite, par l'évaluation des besoins techniques et juridiques adaptés à notre protection ; objectif pédagogique, enfin, grâce à l'information de nos concitoyens sur les risques terroristes et les moyens d'action mis en oeuvre, une politique de communication étant la base de l'indispensable adhésion des Français à la démarche antiterroriste.

Il a indiqué que le Livre blanc sur la sécurité intérieure était le fruit des réflexions d'un comité interministériel de pilotage, composé de six groupes thématiques. Le Livre blanc définit pour la première fois une doctrine française de lutte contre le terrorisme qui repose sur deux piliers : la nécessaire adaptation du dispositif actuellement en place et la mise en oeuvre d'actions de fond permettant d'agir sur l'environnement dans lequel évoluent les terroristes.

Le secrétaire général de la Défense nationale a défini l'état de la menace que constitue le « terrorisme mondial », qui, aujourd'hui, est d'inspiration islamiste ; cette menace, en premier lieu, s'inscrit dans la durée ; elle est en constante évolution, car elle s'appuie, notamment, sur les nouvelles technologies de communication ; le terrorisme mondial tente, en deuxième lieu, de fédérer tous ceux qui refusent le modèle culturel et économique occidental et qui revendiquent la « guerre des civilisations » ; il utilise enfin les zones de conflit où sont impliqués des musulmans : hier, la Bosnie, la Tchétchénie ou l'Afghanistan et, aujourd'hui, l'Irak.

a insisté sur le fait que la France, loin d'être à l'abri, constituait un objectif stratégique et ne bénéficiait pas d'un quelconque « traitement de faveur ». Si notre pays bénéficie d'une sympathie réelle au sein du monde musulman, compte tenu, en particulier, de son opposition à la guerre en Irak, deux griefs lui sont imputés : la loi sur les signes religieux à l'école et la participation des forces françaises aux opérations antiterroristes en Afghanistan.

a ensuite évoqué plusieurs facteurs d'aggravation de la menace terroriste : désormais les activistes vivent aussi dans les pays occidentaux, où ils organisent des attentats ; l'Irak est devenu un véritable centre de recrutement et d'entraînement ; les actions suicides sont devenues un mode opératoire banalisé ; enfin, la volonté de recourir à des armes non conventionnelles reste présente.

Le secrétaire général de la Défense nationale a alors défini la doctrine de lutte contre le terrorisme proposée par le Livre blanc. Il s'agit, dans un premier temps, d'adapter le dispositif actuel de lutte et les outils correspondants. Il convient à cet égard de renforcer simultanément la prévention et la répression, ce qui suppose notamment d'affermir, d'une part, nos capacités de renseignement, à la fois par un meilleur contrôle des communications électroniques, par une coopération européenne étroite dans le cadre du « centre de situation » (SITCEN) de l'Union européenne, enfin par des échanges au niveau international, en particulier, dans le domaine de la prolifération des armes de destruction massive ; cela suppose aussi d'améliorer, d'autre part, le régime juridique de la lutte antiterroriste, ainsi que l'a fait la loi du 23 janvier 2006, tout en veillant à respecter les principes de l'Etat de droit. Il convient également, a précisé M. Francis Delon, de s'appuyer sur les étapes récemment franchies dans le cadre de la coopération judiciaire européenne, tels que le mandat d'arrêt européen ou le développement d'équipes communes d'enquête.

Il importe également, a poursuivi le secrétaire général de la défense nationale, de réduire la vulnérabilité des cibles potentielles des terroristes, dans le cadre de la nouvelle réglementation relative aux secteurs d'activités d'importance vitale, de s'appuyer sur le socle de mesures existant (plan Vigipirate et plan Pirate) et de l'améliorer grâce à des systèmes de communication interopérables et sécurisés ou des systèmes informatiques de gestion de crise ; de placer enfin au centre du dispositif une politique de communication à l'adresse de la population, organisée en amont et « à froid », dans un cadre national et européen.

Dans un second temps, a précisé le secrétaire général de la défense nationale, il convient d'agir sur l'environnement dans lequel évoluent les terroristes, qui sont des criminels, et non des combattants comme ils voudraient être décrits. Ces actions sont de trois ordres et doivent permettre, d'abord, d'accroître la sensibilisation de nos concitoyens qui, par des formations appropriées, développeront des réflexes appropriés face au terrorisme ; ensuite, de mener la « bataille technologique » en élaborant une politique industrielle dans le domaine de la sécurité, en mettant l'accent sur la recherche et le développement ou l'élaboration de normes internationales en la matière ; enfin, de soutenir une « bataille des idées » destinée à isoler les terroristes, en contrant les messages de haine qu'ils délivrent et en recherchant un consensus de la population qui permette également d'écarter tout amalgame entre l'islam et le terrorisme mondial. La lutte contre le terrorisme n'est en aucune manière un combat contre l'islam.

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