a répondu partager complètement l'opinion de M. Christian Cointat sur la nécessité de gagner la bataille idéologique et spirituelle. Toutefois, il a constaté que politiquement la prévention était moins rentable et visible que la répression même si à long terme elle était la seule réponse adaptée. En outre, il a indiqué que l'Union européenne disposait de peu de leviers pour développer des actions de prévention, celles-ci étant entre les mains des Etats, notamment l'éducation, l'organisation des cultes ou l'intégration. Il a estimé que l'une des pistes à creuser était d'ouvrir des perspectives de participation à la vie publique à l'ensemble de la population, citant l'exemple de la composition actuelle du Gouvernement français.
Il a attiré l'attention sur la nécessité d'une grande cohérence de l'ensemble des politiques, notamment pour éviter que ne se développe un sentiment de deux poids deux mesures. Il a ainsi jugé primordiale la fermeture de la prison de Guantanamo qui discrédite les discours occidentaux sur la défense des droits de l'homme. Pour y parvenir, il a indiqué que les pays européens devraient être prêts à accueillir des prisonniers, y compris ressortissants de pays tiers.
Concernant la lutte contre les flux financiers alimentant le terrorisme ou la radicalisation violente, il a déclaré que la législation lui semblait désormais satisfaisante, le défi étant désormais d'intensifier les échanges d'information entre les services de renseignement et les autorités responsables des marchés financiers.
Répondant à M. Paul Girod, M. Gilles de Kerchove a estimé prudent de ne pas trop mêler la politique européenne de défense à la lutte contre le terrorisme afin de ne pas tomber dans le piège et les excès du discours de « la guerre au terrorisme ». Toutefois, il a indiqué que certains instruments de la politique européenne de défense pouvaient être utiles, notamment en matière de protection civile ou dans certaines zones extérieures.
A propos du droit de poursuite en cas de crise, il n'a pas jugé utile d'aller plus loin que les dispositions en vigueur.
Enfin, concernant la lutte contre la radicalisation dans le monde musulman, il a cité l'expérience très positive d'une ONG indonésienne qui avait associé une vedette locale de la chanson et les autorités religieuses du pays pour diffuser une lecture moderne et pacifiée du Coran.
Répondant à Mme Alima Boumediene-Thiery, M. Gilles de Kerchove a indiqué que le terrorisme basque était également une préoccupation importante, mais il a estimé qu'il n'avait pas de rôle particulier à y jouer, la coopération franco-espagnole n'ayant jamais été aussi fructueuse. Il a simplement suggéré qu'Europol et Eurojust puissent être associés aux équipes communes d'enquête de manière à partager des expériences et à développer la confiance mutuelle.
Concernant l'équilibre entre sécurité et liberté, il a indiqué que la difficulté consistait à éviter deux écueils : sous-estimer la menace et légitimer la construction d'une Europe sécuritaire.
Répondant à Mme Catherine Tasca, M. Gilles de Kerchove a confirmé les liens parfois très étroits entre terrorisme et trafics mafieux, en particulier en Afghanistan ou au Sahel.
Il a estimé que les forces de police en Europe avaient suffisamment de moyens, mais qu'il convenait en revanche de renforcer la connaissance par les responsables de police des mécanismes européens de coopération policière. Des outils existent mais ils sont insuffisamment utilisés.
A propos des relations avec le Parlement européen, il a rappelé que le traité de Lisbonne généralisait la co-décision. Toutefois, en matière de renseignement, il a indiqué que le Parlement européen n'était pas habilité à connaître d'informations classifiées ce qui limitait son expertise.
Répondant à M. Jean-René Lecerf, il a expliqué qu'à ce stade, il ne lui appartenait pas de porter une appréciation sur la proposition de M. Franco Frattini de mettre en oeuvre un contrôle des entrées et des sorties du territoire européen, cette idée paraissant néanmoins découler de l'élargissement de l'espace Schengen.
Enfin, répondant à M. Hubert Haenel, président de la délégation pour l'Union européenne, M. Gilles de Kerchove a jugé que l'association des parlements nationaux au contrôle d'Europol et à l'évaluation d'Eurojust n'aurait réellement d'utilité que le jour où elles auraient une activité plus opérationnelle. Toutefois, il s'est déclaré certain que ce contrôle des parlements nationaux serait de nature à développer et non à freiner le rôle de ces agences. Il a suggéré également un système mixte associant à la fois les parlements nationaux et le Parlement européen.