Intervention de Michel Bouvard

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 29 juin 2011 : 1ère réunion
Audition de Mm. Michel Bouvard président de la commission de surveillance et augustin de romanet directeur général de la caisse des dépôts et consignations

Michel Bouvard, président de la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations :

La Commission de surveillance s'est réunie à vingt-deux reprises cette année. A côté d'elle et pour préparer ses travaux, je rappelle qu'il y a le comité des fonds d'épargne et le comité d'examen des comptes et des risques qui sont présidés par Arlette Grosskost, un comité de nomination et un comité d'investissement qui ont été institués dans la déclinaison des modifications apportées par la loi de modernisation de l'économie. Je voudrais brièvement revenir sur les quatre faits marquants de l'année, de mon point de vue, avant que le directeur général ne présente l'activité et les résultats du groupe d'une manière plus complète.

Premier fait marquant, la clarification des relations financières entre l'Etat et la CDC. C'est un travail que nous avons engagé à la suite de la présentation des résultats de l'exercice 2008, qui nous plaçait dans une situation qui n'avait pas été prévue par les textes alors en application. Ce travail aura abouti, au bout de plus d'un an de discussions, par une délibération prise par la Commission de surveillance le 13 octobre 2010 validant un dispositif d'ensemble établi dans la transparence démocratique et s'inscrivant dans la durée.

Le premier point qui a pu être clarifié à cette occasion a été celui de l'utilité des missions d'intérêt général, qui figurent dans la loi, je le rappelle, en leur fixant un cadre pluriannuel et en mettant un terme aux interrogations récurrentes qui existaient, de la part du Trésor, sur la pertinence et l'utilité de ces missions d'intérêt général.

Le deuxième point, sans doute le plus important, concerne la redistribution du résultat, puisque le résultat reversé au budget de l'Etat s'inscrit dorénavant dans une fraction de 50 % du résultat total, récurrent comme exceptionnel, plafonné à 75 % du résultat social permettant ainsi à la CDC - qui n'a pas d'actionnaires, et qui ne peut donc compter que sur son résultat social - de poursuivre ses investissements et de couvrir ses risques avec un niveau de fonds propres suffisant. Cette clarification constitue, bien évidemment, une étape d'autant plus importante que nous avons pu voir les uns et les autres, dans les rapports récents de la Cour des comptes, que la tentation de l'Etat d'effectuer des prélèvements importants sur les entreprises publiques s'était accrue au cours des dernières années. Par conséquent, le fait de pouvoir inscrire la CDC dans une démarche de stabilité dans sa relation financière avec l'Etat, tout en préservant ses capacités d'investissement à l'avenir, était tout à fait précieuse.

Le deuxième fait marquant que j'évoquerai est celui de l'investissement avisé dans l'ouverture du capital de La Poste. Pour mener à bien cette opération, qui représente un investissement de 1,5 milliard d'euros, c'est-à-dire quasiment une année d'investissement de la CDC, la Commission de surveillance a souhaité s'entourer de conseils extérieurs et a délégué un de ses membres, Franck Borotra, pour suivre ces travaux. Nous avons pu aboutir à une décision d'investissement validée de façon consensuelle par le comité d'investissement, sur la proposition du directeur général, qui intègre à la fois une valorisation correcte du groupe La Poste, et permet de ne pas mettre la CDC en risque d'avoir à procéder à des dépréciations. Un plan d'affaires très complet a été présenté, comprenant le développement de synergies avec l'ensemble des filiales de la CDC, à commencer bien évidemment par CNP Assurances. C'est une opération qui est maintenant engagée et le directeur général y reviendra.

Le troisième fait marquant est la mise en oeuvre des investissements d'avenir. Le Gouvernement a confié 7,5 milliards d'euros à la CDC qui est l'opérateur de huit conventions. Je veux rappeler que, dans le cadre du dispositif législatif du programme des investissements d'avenir, l'ensemble des conventions a donné lieu à une approbation par la Commission de surveillance et que, par ailleurs, un rendez-vous est prévu devant la Commission de surveillance pour l'évaluation de chacune d'entre elles. Il importe d'avoir une approche consolidée de l'action de l'Etat et de s'assurer que la Caisse des dépôts ne soit en aucun cas un outil de débudgétisation au travers de ces conventions. Pour la CDC, elles sont à la fois une chance, dans la mesure où elles interviennent dans des domaines qui sont cohérents par rapport au « Plan stratégique Elan 2020 », tel qu'il a été arrêté par le directeur général en début de mandat et avec lequel la Commission de surveillance a marqué son accord, mais aussi un défi dans la mesure où la nécessaire sélectivité dans le choix des projets créera des frustrations et que la CDC devra gérer celles-ci sans se substituer au budget de l'Etat, ni sacrifier ses propres investissements prioritaires en venant en substitution.

Dernier fait marquant, les succès remportés par un certain nombre de filiales, qui représentent maintenant une part croissante du résultat, puisqu'elles contribuent à hauteur de 67 % à la formation du résultat récurrent. Je rappelle l'aboutissement de la discussion entre Transdev et Veolia sur le processus de fusion, qui est maintenant engagé dans le respect du discours que nous avons tenu, avec le directeur général, devant les élus, c'est-à-dire un engagement pérenne de la CDC ; la fusion à parité, allant de pair avec un équilibre dans les organes de direction ; et un maintien des structures déconcentrées en termes de gestion de proximité avec les collectivités territoriales clientes. La RATP a été désintéressée par des cessions d'actifs, mais remplacée par une recapitalisation permettant à Transdev, parallèlement à la fusion, de pouvoir réinvestir. Autre opération, l'alliance entre Egis et Iosis, qui permet de conforter l'ingénierie française et ouvre, en même temps, une perspective de développement de l'actionnariat salarié qui a été engagé au sein du groupe Egis. Enfin, je rappelle que CNP Assurances reste le premier centre de résultats du groupe. Toutefois, elle arrive à un moment où elle aura à s'interroger sur les stratégies de moyen et de long terme compte tenu du plafonnement du produit de l'assurance-vie dans notre pays et d'une relative dépendance au seul marché brésilien à l'étranger, malgré l'excellence des résultats apportés par l'activité de CNP Assurances dans ce pays.

Vous trouverez dans les documents qui vous ont été remis une présentation du pôle environnement tel qu'il est aujourd'hui constitué, avec différentes filiales, ainsi que les activités de Belambra et de la Compagnie des Alpes, qui ont été tout aussi satisfaisantes et, enfin, le Fonds stratégique d'investissement (FSI). Compte tenu des auditions récentes et du rapport de Jean-Pierre Fourcade, je pense qu'il n'est pas nécessaire d'y revenir à ce stade de l'intervention.

Je voudrais dire un mot des métiers historiques du groupe, notamment les mandats qui sont exercés, qui représentent la majorité des effectifs démographiques du groupe CDC, notamment tout le secteur des retraites. A cet égard, je veux souligner à la fois la grande performance de l'activité de ce secteur, qui a permis de faire face non seulement au droit à l'information sur les retraites, mais également aux demandes soutenues et aux interrogations de nos concitoyens du fait des récentes réformes. Pour ce faire, aucun poste supplémentaire n'a été créé et, en même temps, la direction des retraites a apporté une grande vigilance sur les problématiques de fraude. J'en veux pour preuve le travail que j'ai pu constater lors d'un déplacement à Bordeaux, au niveau de la gestion de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA). Pas mal de choses ont circulé sur Internet, vraisemblablement d'inspiration d'extrême droite, sur le fait qu'il y aurait des milliers de centenaires en Algérie qui toucheraient des prestations. J'ai pu constater que, grâce au dispositif législatif qui a été mis en place en 2008, il y avait un dossier sur deux qui était refusé et qu'il y avait un travail de contrôle très précis qui était mené.

Le directeur général présentera les résultats plus en détail. Ils sont très satisfaisants. Le résultat du Fonds d'épargne s'élève à 1,485 milliard d'euros, en progression de 27,5 % par rapport à 2009, notamment sous l'effet de la généralisation de la distribution du Livret A, qui a permis de consolider la marge d'intérêt du Fonds d'épargne. Les résultats de l'établissement public, dont 67 % sont apportées par les filiales, atteignent 2,158 milliards d'euros contre 1,980 milliard d'euros en 2009.

Avec la mise en oeuvre des nouvelles dispositions sur le prélèvement, telles que je les indiquais au début, la Caisse des Dépôts apporte au budget de l'Etat 839 millions d'euros, ce qui représente 39 % du résultat net consolidé et correspond au plafond de 75 % du résultat social. La contribution représentative de l'impôt sur les sociétés, qui est inchangée dans son mode de calcul, permet de dégager 369 millions d'euros au bénéfice du budget de l'Etat. Le prélèvement sur le Fonds d'épargne, enfin, est de 965 millions d'euros.

En 2011, nous devrons faire face trois enjeux qui nécessiteront la mobilisation de la Commission de surveillance :

- la consolidation de la capacité d'action du Fonds d'épargne dans le contexte des nouvelles règles de centralisation ;

- la réussite du Club des investisseurs de long terme, créé à l'initiative d'Augustin de Romanet et qui peut jouer un rôle très utile d'interface pour les contacts avec les grands fonds souverains étrangers et la mobilisation de ressources, y compris au profit du développement de notre pays ;

- et, enfin, la construction du modèle prudentiel de la CDC.

Je rappelle que, grâce à Christine Lagarde, la CDC n'a pas été soumise à la Commission bancaire, devenue l'Autorité de contrôle prudentiel (ACP). La loi a prévu que l'ACP remet son rapport à la Commission de surveillance et qu'il lui appartient alors de définir le modèle prudentiel ainsi que le niveau des fonds propres. Ceci nous a d'ailleurs amenés à modifier l'organisation de la Commission de surveillance, avec la création d'un secrétariat général, dirigé par Brigitte Gotti. La détermination du modèle prudentiel est un exercice tout à fait important dans la mesure où il faut à la fois ne pas trop s'écarter des règles communément admises par la communauté financière en matière de règles prudentielles pour les établissements bancaires et financiers, tout en intégrant la spécificité du modèle de long terme de la CDC. Le choix qui a été fait de donner cette responsabilité à la Commission de surveillance est, à mon avis, particulièrement opportun dans la mesure où l'on voit bien aujourd'hui que les contraintes créées pour les établissements financiers et les assurances par Solvabilité II d'une part, et par Bâle III d'autre part, peuvent être terribles en matière de mobilisation de ressources au service de l'investissement. Il nous faudra donc, à la fois, préserver nos marges d'investissement dans la définition de ce modèle et satisfaire aux exigences prudentielles.

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