Je maintiens ce que j'ai affirmé dans La Tribune, dans Le Figaro et dans Les Echos. En réalité, il n'existe pas de contradiction, mais un changement considérable de politique.
Nous avons pensé avoir résolu l'ensemble des problèmes lors du séquençage du génome. Nous savions ainsi qu'il existait 13 000 gènes et que, lorsque des gènes étaient anormaux, ils donnaient lieu à des maladies. Nous pensions que, si l'on modifiait les gènes, on pourrait lutter contre les maladies et que nous obtiendrions des médicaments correspondant à chaque maladie. Le séquençage du génome visait, en outre, à obtenir une connaissance complète de l'ensemble du fonctionnement du vivant.
Le dogme dominant associait un gène à une protéine et à une fonction. Nous nous sommes aperçus que la réalité était bien plus complexe. Un gène peut participer à la synthèse de plusieurs protéines. De même, les mécanismes de fonctionnement des tissus, des organes et donc des maladies, obéissent à des règles complexes. Des réseaux de gènes entraînent des signalisations cellulaires très compliquées, que l'on tente à présent de modéliser par la biologie des systèmes. Il existe par ailleurs des interactions essentielles entre les gènes ainsi qu'entre l'environnement et les gènes, ce qu'étudie l'épigénétique. L'espoir que nourrissaient les industriels est devenu hors de portée, d'autant plus que ceux-ci étaient structurés selon différentes spécialités en différents lieux.
Nous nous sommes aperçus que les mêmes voies de signalisation pouvaient expliquer une ischémie myocardique, une maladie d'Alzheimer ou une arthrose. Par conséquent, les laboratoires ont compris que même avec 30 000 chercheurs, ils n'avaient aucune chance de trouver une cible thérapeutique nouvelle. Qui plus est, les autorités de régulation européennes apparaissent de plus en plus exigeantes : elles demandent que les médicaments soient totalement innovants ou qu'il soit prouvé qu'ils rendent un service médical plus important.
Il est donc apparu une toute nouvelle problématique pour les industriels. Dans les milieux académiques, nous développons la recherche, de la recherche fondamentale à la recherche clinique.