Intervention de Jean-François Humbert

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 24 mai 2011 : 1ère réunion
Éthique du sport et droits des sportifs — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Jean-François HumbertJean-François Humbert, rapporteur :

J'ai le plaisir de vous présenter une proposition de loi de M. Yvon Collin et de plusieurs de ses collègues du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, relative à l'éthique du sport et aux droits des sportifs.

L'éthique du sport : vaste débat ! Ces dernières années, les médias ont rapporté des turpitudes dignes de romans policiers : violences dans les stades, dopage de sportifs, corruption d'arbitres, paris illégaux, joueurs qui insultent leur entraîneur et d'autres qui se mettent en grève.

Si tout cela n'est probablement que la facette médiatique d'un sport français qui se porte bien, il reste que des problèmes liés aux comportements et au respect des règles doivent être réglés.

Il était donc opportun de se placer sur le terrain de l'éthique et de rappeler certaines valeurs. Le sport ne peut être porteur des valeurs positives qu'on lui prête que s'il respecte lui-même ses fondamentaux : la solidarité, l'esprit d'équipe, le respect des autres. Je suis donc en total accord avec les objectifs poursuivis par nos collègues, que je remercie pour leur initiative.

Je vous proposerai des mesures tendant à améliorer et à renforcer les dispositifs proposés, d'autres pour introduire des mesures nouvelles et enfin, plus rarement, je vous demanderai de revenir sur des propositions qui me semblent moins adaptées.

Le titre Ier vise à inciter les fédérations sportives, qui sont le bras armé de notre politique sportive, à prendre en compte l'éthique. Il s'agit plus précisément de conditionner leur agrément à la mise en place d'une charte éthique et à son application ; de prévoir que leurs missions de service public s'inscrivent dans le respect des principes et des enjeux du développement durable ; d'offrir la possibilité aux fédérations de créer des « licences clubs » en fixant aux clubs, notamment professionnels, des contraintes administratives, juridiques et financières. Les fédérations seraient à cet égard susceptibles de mettre en place des quotas de joueurs formés localement. Le titre Ier confère également aux ligues un pouvoir similaire sur l'encadrement des compétitions professionnelles, il précise le pouvoir des directions du contrôle de gestion et il permet de fixer par décret un plafond de salaires dans les clubs.

Ces axes de réflexion sont pertinents car la crédibilité du sport professionnel repose sur l'équité entre les participants aux compétitions et sur l'intégrité des sportifs et des équipes. Bref, l'esprit sportif doit être respecté et le sport spectacle ne doit pas être assimilé à une activité économique comme les autres.

Je vous proposerai néanmoins d'améliorer la force juridique des chartes éthiques et d'y inclure des éléments relatifs à la préservation de l'environnement, de préciser la répartition des compétences des fédérations et des ligues, de renforcer les dispositions relatives au contrôle de gestion, qui est l'un des éléments clés de la stabilité des clubs français. Il convient aussi de permettre aux fédérations, et non au décret, de fixer un plafond salarial pour les joueurs et pour la rémunération des agents sportifs inférieur à celui actuellement fixé par la loi.

En outre, je vous proposerai un amendement introduisant dans notre arsenal répressif une incrimination de revente illégale de billets sportifs, qui est une source de troubles à l'ordre public, dans et aux abords des stades.

J'en viens au titre II relatif à la formation des sportifs qui comporte une avancée intéressante : l'éducation nationale et les universités devront adapter les enseignements pour les jeunes dans les centres de formation. Je souhaite favoriser encore davantage la poursuite du double projet professionnel et académique des centres de formation en leur permettant de collecter la part « barème » de la taxe d'apprentissage qui est composée de deux éléments, la part barème, sur laquelle je vous propose d'agir, et la part quota.

La lutte contre le dopage fait l'objet du titre III : les auteurs de la proposition de loi considèrent que cette lutte devrait également respecter un certain nombre de principes : ils prévoient la mise en place d'une commission des sanctions à l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), afin de séparer strictement les organes d'instruction des dossiers de ceux qui prononcent les sanctions. Ils souhaitent aussi la suppression du pouvoir disciplinaire des fédérations sportives en matière de dopage, car ils estiment que sanctionner éventuellement des sportifs emblématiques tout en promouvant leur discipline est un exercice difficile, voire contradictoire. La proposition de loi confie enfin des pouvoirs propres à l'Agence en matière de prévention et de recherche comme c'était le cas du Conseil de prévention et de lutte contre le dopage (CPLD) auparavant. Je suis favorable à cette disposition qui conforterait la place du laboratoire de Chatenay-Malabry, un des points forts de la lutte française contre le dopage. En revanche, je suis plus nuancé sur la création d'une commission des sanctions au sein de l'Agence, car une telle mesure alourdirait une procédure déjà respectueuse des droits de la défense. Je vous proposerai donc un amendement de suppression.

Le retrait du pouvoir de sanction aux fédérations est également problématique. Le groupe RDSE souhaitant conserver cette disposition, je ne vous proposerai pas aujourd'hui d'amendement, mais j'en demanderai la suppression en séance publique.

Je vous proposerai cependant de permettre à l'Agence française de lutte contre le dopage d'effectuer des contrôles dans des compétitions françaises se déroulant à l'étranger, afin de combler un vide juridique. En outre, il convient d'autoriser les fédérations sportives internationales d'exercer un recours en France contre les décisions de l'Agence, afin d'éviter d'en appeler systématiquement au Tribunal arbitral du sport.

Enfin, je vous propose de ratifier l'ordonnance du 14 avril 2010 et non de l'abroger comme le prévoit la proposition de loi, ce qui entraînerait la suppression de nombreux articles.

Je tiens à revenir sur ce qui ne figure pas dans cette proposition de loi, à savoir le développement du sport, qui est inséparable de l'éthique.

Je suis évidemment favorable à l'article 6 sur la limitation de la multipropriété des clubs et je souhaite aligner sur ce régime le dispositif prévu pour les prêts entre clubs, qui est aujourd'hui archaïque et très contesté par la doctrine.

Enfin, je présenterai un amendement en séance pour permettre aux clubs professionnels de choisir le statut qu'ils souhaitent sans pour autant alléger les dispositifs contraignants qui figurent dans le code du sport.

En conclusion, et sous réserve du sort réservé à mes amendements, je suis favorable à l'adoption du présent texte. Il y aura ensuite lieu, à mon sens, de réfléchir à une réécriture complète de l'ensemble des dispositions touchant au sport et de prendre en compte le volet européen.

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