Je voudrais tout d'abord apporter une précision. La direction du Budget n'est pas « leader » dans cette réflexion. En effet, c'est la direction de la législation fiscale qui est en charge de la question doctrinale de qualification de la norme de référence. Sur la question du chiffrage, la direction du budget participe aux prévisions de recettes. La direction du trésor traite plus particulièrement les dépenses fiscales associées à la TVA et à la prime pour l'emploi (PPE), tandis que la direction du financement de la sécurité sociale s'occupe des niches sociales.
Même si elle n'est pas l'acteur principal de ce travail de définition et de chiffrage, la direction du budget, en tant que maître d'ouvrage de l'élaboration des documents budgétaire, se sent évidemment concernée, puisque l'objectif ultime est de contribuer à la réduction des déficits publics. Nous travaillons donc en lien avec la direction de la législation fiscale.
Ensuite, je voudrais souligner les progrès accomplis en matière de chiffrage et d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales depuis quelques années. Le phénomène est indéniablement beaucoup plus maîtrisé aujourd'hui, à travers la création de normes de dépenses fiscales et le monopole de fait des lois de finances pour les dispositions fiscales. Des progrès de méthode ont également été réalisés. Je pense que nous franchirons une nouvelle étape avec l'exercice d'évaluation piloté par l'inspection générale des finances et Henri Guillaume, qui permettra d'éclairer des points restés obscurs.
Troisièmement, je souhaiterais faire un point de méthodologie sur la norme de référence et les méthodes de chiffrage. Concernant la première, il faut être conscient qu'il y a toujours des éléments de convention, qui doivent être explicites. Marie-Christine Lepetit et moi-même avons décidé, en préparant cette audition, de proposer au ministre de préciser, dans le fascicule des « Voies et moyens », à quelle norme déroge chaque dépense fiscale. Il faut mettre les choses sur la table. Cet exercice de transparence, qui découle de la préparation de cette audition, constituerait un vrai progrès.
En ce qui concerne les méthodes de chiffrage, il faut distinguer l'évaluation des dépenses ex ante, lorsqu'elles en sont au stade du projet, et ex post, lorsqu'elles sont instaurées et ont commencé à produire leurs effets. Nous avons deux types de méthode : l'utilisation des données fiscales existantes et les simulations. De plus, il faut être conscient que le chiffrage est plus ou moins évident selon le type de dépense fiscale. Ainsi, les exonérations, abattements et déductions sont plus difficiles à évaluer. Par exemple, en ce qui concerne les exonérations, les abattements et les déductions, il faut procéder à des reconstitutions d'assiette. A l'inverse, l'évaluation des taux réduits, crédits d'impôts ou réduction d'impôts s'avère moins problématique.
De plus, il existe aussi des conventions sur les modalités de chiffrage. En ce qui concerne les niches sociales, lorsque l'on calcule leur coût, on se base sur un taux de recouvrement à 100 %. Or, dans les faits, ce taux est inférieur. La convention a donc un effet majorant. Il s'agit également de s'interroger sur l'exhaustivité du concept de niche sociale. Nous n'évaluons pas, en effet, les niches sociales hors PLFSS. Enfin, la dépense fiscale locale n'est recensée dans le « Voies et moyens » que s'il s'agit d'allègements compensés par l'État. Mais les abattements ou exonérations votées par les collectivités locales ne sont pas chiffrés. Une telle évaluation, aussi complète, serait sans doute beaucoup plus complexe à mettre en oeuvre, et je ne peux prendre aucun engagement à ce sujet.