Il est incontestable que nous sommes à une période charnière et qu'il nous faut prendre des mesures sans tarder. C'est devenu extrêmement urgent, mais je crois que l'on peut y parvenir.
Un point auquel nous devons nous atteler porte sur l'installation du conjoint ou de la conjointe du médecin, qu'il faut aussi chercher à faciliter. Nous ne sommes plus à l'époque où le conjoint du médecin ne travaillait pas ou travaillait dans le cabinet de son mari, notamment à des tâches de secrétariat. Nous aurons toujours le plus grand mal à attirer des médecins si nous n'offrons pas, sur place, du travail à leurs conjoints. A cet égard, les territoires ne sont pas à égalité car, y compris au sein d'une même région, certaines zones sont mieux placées que d'autres : il est évident que l'agglomération de Montpellier rencontre moins de difficultés que le département de la Lozère.
Dr Elisabeth Hubert. - En effet... néanmoins, à ce jour, la Lozère n'est pas encore frappée par la désertification. C'est plus tard qu'elle le sera, si rien n'est fait, alors que d'autres départements sont d'ores et déjà touchés.
Tout à fait, mais je me plaçais dans le futur et, sous cet angle, il n'est pas douteux que les perspectives sont moins inquiétantes pour Montpellier que pour la Lozère. Je suis en plein accord avec vous dès lors que l'on observe la situation actuelle : certaines zones souffrent bel et bien déjà d'une pénurie de médecins. Il me semble d'ailleurs qu'il y a une véritable fracture entre le nord et le sud : à Lille, où je me suis rendue dans le cadre de mon rapport, il faut compter au minimum six mois pour avoir un rendez-vous avec un ophtalmologiste, contre seulement (si j'ose dire car c'est déjà beaucoup) trois mois à Montpellier.
Il faut indiscutablement accompagner les médecins, en particulier les jeunes diplômés, dans leur installation et je trouve très intéressantes les propositions que vous formulez à cette fin, en particulier sur les stages des étudiants auprès des médecins libéraux (qui doivent être formés à cet accueil).
Il y a une évolution qui m'a frappée concernant la relation du patient avec le médecin. Les clients sont de plus en plus impatients : ils veulent qu'il leur prescrive le remède qui guérira leur mal de gorge en 24 heures, ils attendent qu'il soit nuit et jour disponible pour les recevoir, ils se plaignent s'ils n'arrivent pas à le joindre... Il en résulte chez beaucoup de médecins un sentiment de dévalorisation, l'impression de ne plus être respectés autant que l'étaient leurs anciens.
En ce qui concerne les maisons de santé, elles doivent en effet être pluridisciplinaires. Je pense qu'elles doivent aussi comprendre un professeur de médecine.
Dr Elisabeth Hubert. - Tout à fait, et c'est une politique que certaines maisons de santé ont déjà mise en application.