Puis, M. Bruno Sido a considéré que la majorité des Etats membres de l'Union européenne n'avaient pas une conception aussi interventionniste de la politique énergétique et faisait preuve d'une foi appuyée dans les vertus du marché qui constituerait, selon eux, un outil efficace pour inciter à la réalisation des investissements, vision au demeurant partagée par la Commission européenne. Exprimant ses réserves sur ce modèle, il a relevé qu'il conduisait ces pays à fonder le développement de leurs moyens de production en très grande partie sur des cycles combinés à gaz. Jugeant inquiétante cette évolution au regard de la sécurité d'approvisionnement et de l'indépendance politique de l'Union européenne, qui importe déjà près de 57 % de son gaz -ce pourcentage devant passer à 84 % en 2030-, il a précisé que la diversification des approvisionnements gaziers permise par le développement du gaz naturel liquéfié ne serait pas suffisante pour réduire le poids dominant de la Russie en matière de livraisons gazières. Il a enfin indiqué que la plupart des pays européens refusaient tout développement des capacités nucléaires sur leur territoire mais, dans le même temps, se déclaraient favorables à l'installation de telles unités chez leurs voisins frontaliers afin d'importer de l'électricité à des prix compétitifs.
a alors fait part de la conviction de la mission d'information selon laquelle la France n'avait pas vocation à devenir le « poumon nucléaire » de l'Europe et le seul pays à devoir gérer tous les aspects sociaux et environnementaux de cette option énergétique. Pour ces raisons, il a plaidé en faveur d'une réorientation profonde de la politique communautaire de l'énergie qui s'appuierait sur la réalisation régulière, dans chaque Etat, de bilans prévisionnels d'équilibre entre l'offre et la demande et d'un document prospectif indiquant comment est garanti cet équilibre, lesquels seraient agrégés au plan communautaire, et l'instauration de normes minimales de production d'électricité afin qu'aucun Etat ne puisse fonder durablement la satisfaction de ses besoins sur les importations. Notant que cette réorientation pourrait prendre corps au sein d'un pôle européen de l'énergie, il a indiqué qu'une telle organisation devrait fonctionner sur la base d'une réelle solidarité entre pays, en tenant compte des conceptions nationales vis-à-vis du bouquet énergétique. Il a estimé que ces nouvelles fondations de l'Europe de l'énergie seraient de nature à donner naissance à de nouvelles régulations du secteur ainsi qu'à de nouvelles règles, qui n'aient pas exclusivement pour objectif la promotion de la concurrence.
Puis M. Bruno Sido a rappelé que le parc de production français s'appuyait en très grande partie sur le nucléaire et, dans une moindre mesure, sur l'hydraulique et que ce bouquet énergétique était performant au regard de la sécurité d'approvisionnement, de la sécurité du système et de la lutte contre le changement climatique. Soulignant les avantages incontestables de la production d'origine nucléaire, au nombre desquels un combustible encore abondant et bien réparti sur la planète, des prix de l'électricité très compétitifs, et des émissions réduites de CO2, il a également évoqué les points faibles de cette énergie, liés aux risques pour l'environnement et la santé et surtout à la question des déchets. Cette analyse a ainsi conduit la mission d'information à plaider en faveur du maintien du parc à son niveau de puissance actuel, 63 gigawatts, ce qui implique de prévoir le remplacement des centrales existantes par les technologies les plus performantes. Au regard des délais prévisibles de développement de la quatrième génération de centrale nucléaire, il a indiqué que le choix de l'EPR apparaissait justifié. Il a par ailleurs souligné la nécessité de rééquilibrer le bouquet électrique national par un panachage entre énergies renouvelables - éolienne et hydraulique -, gaz naturel, ainsi que charbon, en fonction des progrès des travaux de recherches sur le charbon propre.
Enfin, il a abordé la question des prix de l'électricité, part intégrante de la sécurité d'approvisionnement. Rappelant que de nombreux intervenants avaient souligné lors de leur audition que la libéralisation du secteur électrique en Europe était assez largement synonyme d'augmentation des prix, la plupart des consommateurs qui ont quitté le tarif réglementé ayant subi des hausses importantes de leur facture d'électricité, il a contesté le modèle défendu par la Commission européenne tendant à renforcer la place des marchés libres et à souhaiter la convergence des prix de l'électricité en Europe au fur et à mesure des progrès de l'unification des marchés intérieurs de l'électricité.
a alors relevé que plusieurs raisons empêchaient d'appliquer à l'électricité les règles habituelles de l'économie de marché, au nombre desquelles ses caractéristiques physiques, car il s'agit d'un bien non stockable nécessitant un équilibrage permanent entre l'offre et la demande et se transportant mal. En outre, il a noté que les diverses techniques de production présentaient des différences substantielles de coût et étaient plus ou moins émettrices de CO2, toutes raisons s'opposant à une unification du prix de l'électricité en Europe. Aussi a-t-il insisté sur le fait que la mission appelait de ses voeux le maintien du système tarifaire français, fortement contesté par la Commission européenne, qui garantit aux consommateurs des prix reflétant la réalité des coûts et les protège des fluctuations qui ne sont pas directement liées aux réalités physiques de l'électricité. Il a également souligné la nécessité, aux fins de préservation du dynamisme d'un grand nombre de secteurs industriels, de défendre des montages comme Exeltium et d'autoriser les industriels, notamment les gros consommateurs d'électricité, à contracter sur le long terme les conditions de leur approvisionnement électrique.