Intervention de Gérard de Pouvourville

Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale — Réunion du 5 février 2008 : 1ère réunion
Coût de l'hôpital — Audition de M. Gérard de Pouvourville professeur titulaire de la chaire essec-santé

Gérard de Pouvourville, professeur titulaire de la chaire Essec-Santé :

a indiqué que le maintien du statut de la fonction publique hospitalière n'exclut pas d'organiser le redéploiement des personnels hospitaliers avec des mécanismes de reconversion et de reclassement. Une telle action est possible, comme en témoigne la restructuration de l'hôpital psychiatrique Maison blanche dans les années quatre-vingt-dix, où ont eu lieu d'importants reclassements d'effectifs.

D'une façon générale, le secteur privé est plus réactif que le secteur public aux évolutions nécessaires pour améliorer l'efficacité des établissements de santé. Toutefois, des pistes existent pour faire progresser la situation actuelle, en particulier la formation au management des médecins hospitaliers responsables et des cadres hospitaliers. Par ailleurs, les établissements publics en déficit doivent remettre en cause leur organisation, leur utilisation des ressources médicales, les protocoles de prise en charge des patients, les prescriptions médicamenteuses ou certains protocoles thérapeutiques. Ainsi un examen détaillé des protocoles de bilan effectués à l'entrée du patient dans l'établissement font souvent apparaître des examens inutiles ou redondants. Il serait sans doute aussi intéressant de mettre en place des mécanismes d'incitation internes aux établissements avec des primes de performance pour les services les plus efficients. Enfin, outre la gestion, des pistes d'amélioration de la stratégie des établissements doivent être envisagées, comme le développement des alternatives à l'hospitalisation que sont la chirurgie ambulatoire ou les hospitalisations de jour. Dans ce domaine, les hôpitaux publics français sont en net retard.

a ensuite observé qu'il existe une certaine contradiction dans la gestion actuelle de la T2A. En effet, dans les pays où la tarification à l'activité a été mise en place, celle-ci est un outil d'incitation à la concurrence entre les établissements et donc à un plus grand dynamisme des acteurs qui sont autonomes dans leur stratégie. Ce n'est pas le modèle choisi par la France où la planification continue de jouer un rôle très structurant et limite d'autant les espaces stratégiques des établissements. Il n'y a donc pas de possibilité de développer une stratégie individuelle et concurrentielle des hôpitaux puisque le modèle est celui d'une régulation tarifaire avec un rationnement de fait. On a en effet hérité du passé un système dans lequel existe une grande interdépendance entre les établissements publics et la tutelle pour l'allocation des ressources. La méthode du budget global ne constituait pas une incitation au retour à l'équilibre, dans la mesure où les chefs d'établissement avaient la possibilité d'obtenir une « rallonge » en cas de difficulté. En sens opposé, les autorités de tutelle ont régulièrement demandé la prise en charge de politiques spécifiques de santé publique par les établissements, sans pour autant assurer leur financement. Si cette culture n'évolue pas, la T2A n'aura pas constitué un élément décisif de réforme de la gestion des établissements de santé.

La fixation d'objectifs quantifiés d'activité présente l'avantage de favoriser le service public et de contenir le développement du secteur privé, mais a aussi l'inconvénient de maintenir des rentes de situation pour les établissements peu ou pas performants.

La convergence entre les établissements publics et privés n'est pas soutenable si l'on ne donne pas les moyens aux établissements publics aujourd'hui lourdement déficitaires de revenir à l'équilibre sur une durée raisonnable, par exemple de cinq ans. L'existence d'éléments qui justifient les différences de coût de production entre les deux secteurs doit naturellement être prise en compte dans le cadre d'une politique de convergence. Par ailleurs, au sein même du secteur public, il y a une grande variété de situations économiques, justifiant des politiques spécifiques pour tenir compte des différences de coûts constatées.

Evoquant les problèmes de gouvernance, M. Gérard de Pouvourville a observé qu'aujourd'hui, l'Etat assure la planification du système, la fixation des tarifs et la définition des règles de gestion des établissements publics. L'assurance maladie est, dans les faits, un payeur relativement passif, même si elle réclame un rôle plus actif, notamment dans le contrôle de la dépense hospitalière.

S'il est légitime que l'Etat assure la responsabilité des problèmes politiques de planification et d'aménagement du territoire, il existe plusieurs options pour répartir les rôles en matière de régulation de la dépense hospitalière. D'un point de vue strictement économique et financier, l'assurance maladie pourrait exiger que les surcoûts liés à des politiques nationales, comme l'aménagement du territoire, soient financés par l'Etat, et non par elle-même.

Par ailleurs, le mode de fonctionnement actuel de la T2A ne permet pas de mise en concurrence des établissements hospitaliers entre eux. En effet, le mécanisme d'ajustement des tarifs au niveau national est confiscatoire car les résultats positifs obtenus le cas échéant sont prélevés l'année suivante, pénalisant ainsi les établissements efficients et rendant impossible l'utilisation des surplus, par exemple pour la création de nouveaux services.

Enfin, par rapport aux Etats-Unis, premier pays où a été mis en place un mode de paiement à l'activité, il n'y a pas de contrôle suffisamment rigoureux de l'accès aux soins hospitaliers, en particulier de la pertinence et de l'adéquation des soins effectués. Or, ce contrôle des pratiques hospitalières pourrait être mis en oeuvre par l'assurance maladie, sur la base de recommandations et de critères définis par la Haute Autorité de santé.

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