En tant qu'ancien parlementaire, j'attache une importance toute particulière au contrôle de l'exécutif par le Parlement, qui est essentiel dans une démocratie. Toutes les questions des Parlementaires sont donc légitimes et nous nous efforçons d'y répondre de la meilleure manière possible.
En réponse à M. Jean-Louis Carrère, à propos du récent référé de la Cour des comptes sur la réforme des bases de défense, je me garderai bien de vouloir porter atteinte aux prérogatives de la Cour des comptes, qui est dans son rôle, même si on peut s'interroger sur le manque de recul, puisque le référé est intervenu trois mois après la généralisation de cette réforme, qui n'a été effective qu'au 1er janvier 2011. Il me semble qu'il est difficile de porter un jugement définitif sur une réforme d'une telle ampleur dans un délai aussi court. Par ailleurs, la réforme des bases de défense a permis d'économiser environ 10 000 emplois de soutien, qui pourront ainsi être recentrés sur l'opérationnel. Les résultats ne sont donc pas négligeables.
A cet égard, l'idée de la Cour des comptes de vouloir réduire la taille et le nombre des bases de défense à vingt ne me paraît pas pertinente. Certes, cela aurait sans doute permis quelques suppressions de postes supplémentaires, mais cela aurait aussi conduit, outre le mécontentement des élus locaux et des personnels, à décourager les chefs d'unité qui n'auraient plus eu d'interlocuteurs directs à proximité.
Plus globalement, la question qui est posée est celle de la conduite du changement : comment conduire une réforme d'une telle ampleur, avec humanité, pragmatisme et réalisme, sans disposer, au moins pour la phase de restructuration, d'échelons intermédiaires permettant de rapprocher la décision de ceux qui la mettent en oeuvre ? Faute d'un relai intermédiaire, les décisions ne risqueraient-elles pas d'être perçues comme irréalistes et trop éloignées du terrain ?
Il est vrai que la mise en oeuvre de cette réforme a pu provoquer parfois des inquiétudes au sein des syndicats des personnels civils de la défense. Les commandants des bases de défense sont d'ailleurs chargés du dialogue avec les représentants des personnels civils. J'ai d'ailleurs rencontré leurs représentants, ainsi que les membres du Conseil supérieur de la fonction militaire. La restructuration des forces aboutit parfois à confier provisoirement à des militaires des postes qui pourraient être confiés à des civils, dans l'attente d'un déménagement par exemple. Mais il s'agit d'une situation provisoire. Toutefois, la « civilianisation » de certaines tâches, qui étaient jusqu'à présent exercées par des militaires et qui seront dorénavant confiées progressivement à des personnels civils est aussi une forme de reconnaissance de ces personnels.
En ce qui concerne l'externalisation des tâches d'alimentation, une expérimentation a été lancée en janvier dernier par voie d'appel d'offres, et nous attendons les résultats en termes d'économies, qui sont évaluées à 20 %. Pour l'instant, l'externalisation de l'alimentation ne concerne que huit sites, ce qui correspond à 5 % des repas de l'ensemble des personnels du ministère de la défense. Pour l'habillement, une expérimentation a été lancée depuis mars. Le Royaume-Uni est très en pointe en matière d'externalisation dans le domaine de la défense. L'un des risques de cette externalisation est lié aux difficultés qu'elle soulève en opérations extérieures et au risque de contentieux juridique. Parallèlement, les personnels civils ont proposé la mise en place d'une régie rationalisée, avec moins de personnels pour le même service et nous sommes en train d'étudier cette proposition.
En réponse à M. Didier Boulaud, l'accord de défense avec les Emirats arabes unis a été déposé à l'Assemblée nationale et devrait être soumis au Sénat après son adoption par les députés.
Une actualisation du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale est prévue en 2012. Compte tenu du grand débat républicain qui doit avoir lieu à l'occasion de l'élection présidentielle en 2012, il est logique que cette révision intervienne après les résultats de l'élection présidentielle, au deuxième semestre 2012, ce qui n'empêche nullement de conduire une réflexion avant.
En ce qui concerne l'expression des militaires, je constate que les officiers s'expriment. A l'école de guerre, on apprend d'ailleurs aux jeunes officiers à s'exprimer publiquement et à communiquer dans le respect de leur devoir de réserve. Le général américain Petraeus se réfère d'ailleurs souvent aux écrits d'un militaire français, le lieutenant-colonel Galula, à propos de la stratégie de contre-insurrection en Afghanistan.
S'agissant des drones, la France a un réel retard que nous devons rattraper. Le drone n'est pas seulement un outil à usage militaire mais aussi à des fins civiles, puisqu'il s'agit de notre capacité à surveiller en temps réel le territoire à partir du ciel.
Un comité ministériel d'investissement se réunira pour prendre une décision. Mon souci est qu'un « achat sur étagère » ne doit pas condamner les efforts de nos industriels, notamment pour les drones de nouvelle génération. Mais, dans le même temps, lorsque l'on regarde les factures présentées par les industriels concernant la production d'un drone français, on a un peu le sentiment que l'Etat est traité comme une « vache à lait ». Il faudrait donc que nos industriels fassent des efforts.
Le lancement de la première commande des avions multi rôle de ravitaillement et de transport devrait intervenir en 2013 pour une livraison en 2017.
En réponse à M. Jean-Pierre Chevènement, je voudrais vous dire ma certitude que la loi de programmation militaire sera réalisée jusqu'à la fin 2013. Ainsi, le programme de lance roquettes unitaire sera bien réalisé.
Le véritable débat porte sur la période après 2013, avec l'actualisation du Livre blanc, et sur ce point ma conviction personnelle est qu'on ne pourra pas réduire nos ambitions.
Notre pays continue d'être confronté aux risques et menaces identifiés par le Livre blanc, comme le terrorisme, et à de nouveaux défis, comme la sécurité maritime.
Nous sommes au « taquet de nos engagements ».
De ce point de vue, la position de la France est assez singulière en Europe car notre pays est le seul à ne pas réduire ses dépenses militaires. Ainsi, mon homologue britannique doit faire face à une stagnation des investissements militaires sur les prochaines années, tandis que mon homologue allemand est confronté, dans le contexte de la professionnalisation de l'armée allemande, à une diminution des effectifs et des crédits de son ministère.