Evoquant la « crise de la tulipe » que la Hollande avait connue au XVIIe siècle, M. Marc Touati a souligné que la spéculation, et par conséquent le phénomène de « bulle », étaient inhérents au marché. Selon lui, la crise financière constituant la sanction d'une spéculation excessive, elle devait être tenue pour un évènement économiquement sain. En particulier, à ses yeux, elle ne remettait pas en cause la légitimité de la titrisation, mais appelait à une meilleure gestion des risques. Par ailleurs, bien qu'il en reconnaisse la gravité, il a déclaré ne pas croire qu'elle affecterait durement l'économie « réelle ».
En premier lieu, il a rappelé qu'alors que la Réserve fédérale américaine, en 1929, n'avait pas pris la pleine mesure de la crise, au contraire, en 2007, elle avait réagi, quoique tardivement, en mettant en oeuvre d'importantes mesures d'urgence. Il a estimé que le point le plus grave de la crise était déjà atteint aux Etats-Unis. Selon lui, on peut s'attendre à une baisse du PIB américain au premier trimestre 2008 et à une reprise progressive de la croissance américaine à compter du troisième trimestre 2008. Il a fait part de son « optimisme » sur une reprise de cette croissance, « courant 2009 », au niveau de 3 % du PIB.
En second lieu, il a fait observer que la crise et le ralentissement de la croissance dans les pays développés n'avaient pas affecté la croissance des pays émergents. Il a rappelé qu'en 2007 ils avaient engendré 65 % de la croissance mondiale, et qu'une performance semblable était attendue pour l'année 2008. Il n'y avait donc pas de pénurie de liquidités au niveau mondial. A preuve, le cas de la Chine, dont les réserves de change pourraient dans les prochaines années dépasser le niveau du PIB français, et celui des fonds « souverains ». Il a remarqué que ces investisseurs intervenaient sur des marchés boursiers où les actifs de toutes les catégories d'entreprises, et non seulement des banques, se trouvaient sensiblement dévalorisés. Aussi, selon lui, une profonde redistribution de la détention du capital, en termes de nationalité, était en cours, dont la France serait largement absente, faute de disposer de vrais fonds d'investissements.
Dans ce contexte, il a considéré que l'explosion de la « bulle Internet », en 2001, avait constitué une crise plus grave que celle des « subprimes ». En effet, cette dernière était avant tout bancaire, alors que la crise « Internet » se trouvait liée à un surinvestissement, qu'il avait fallu amortir. Il a indiqué que l'investissement privé aux Etats-Unis poursuivait son développement, malgré la crise. Selon lui, l'abaissement de ses taux directeurs par la Réserve fédérale, la faiblesse relative du dollar et la relance budgétaire importante qui était en cours ne pouvaient que conduire à un rapide redémarrage de la croissance économique du pays.
Au contraire, il a estimé que l'économie européenne courait un risque particulier du fait de l'inversion de la courbe des taux d'intérêt à long et à court termes, le niveau des taux à 10 ans s'avérant actuellement plus bas que celui du taux interbancaire à trois mois. Il a souligné que, dans ces conditions, les banques se trouvaient empêchées de pratiquer leur métier fondamental de financement à court terme. En conséquence, d'après lui, il revenait à la Banque centrale européenne (BCE) d'abaisser ses taux de référence.
Il a indiqué qu'il anticipait pour 2008 une croissance de 1,6 % du PIB dans la zone euro, et de 1,4 % du PIB en France, avec un déficit budgétaire de 3 % du PIB, pour un redémarrage progressif, en 2009, sous la condition d'une baisse des taux d'intérêt à court terme et d'une baisse du cours de l'euro par rapport à celui du dollar.