Intervention de Yves Fréville

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 10 février 2010 : 1ère réunion
Table ronde sur la péréquation

Photo de Yves FrévilleYves Fréville :

a estimé que, en matière de péréquation, il convient de distinguer le domaine social des autres domaines de compétence des collectivités territoriales, l'attribution de revenus spécifiques dans le champ social ayant un effet redistributif par individu, plus efficace que de nombreux mécanismes de péréquation appliqués aux collectivités territoriales.

A l'aide d'un graphique, il a montré la dispersion de la répartition de la dotation nationale de péréquation basée sur le potentiel fiscal de la TP par rapport à la population communale. Il a rappelé que la réforme de la TP prévue par la loi de finances pour 2010 rend ce système de péréquation obsolète, ainsi que la notion même de potentiel fiscal. Il a insisté sur la nécessité qu'il y aura à définir un nouveau concept servant de base à la péréquation.

a ensuite caractérisé la dispersion des richesses entre les communes et les EPCI, démontrant que le remplacement de la TP par la CVAE n'a pas réduit les écarts et a même créé de nouvelles inégalités. Il a expliqué que cette évolution tient à la façon dont la composante foncière de la valeur ajoutée est désormais prise en compte, le nouvel impôt réduisant les ressources pour les communes hébergeant des industries dont la valeur ajoutée comprend une forte composante foncière, en faveur des communes comptant sur leur territoire des activités du secteur tertiaire.

Il s'est ensuite demandé quel doit être le niveau optimum de péréquation, rappelant qu'un arbitrage doit être rendu entre, d'une part, le maintien du niveau de ressources de chaque collectivité territoriale, c'est-à-dire la garantie donnée que ses recettes ne diminueront pas, quelle que soit la réforme fiscale ou financière mise en oeuvre, et, d'autre part, la péréquation. Il a observé que le maintien d'un fort niveau de garantie des ressources obère les possibilités futures de mise en oeuvre de mécanismes péréquateurs et que la volonté de ne pas réduire les dotations allouées aux collectivités territoriales à l'issue du recensement accentue le choix en faveur des mécanismes de garantie. Par conséquence, l'enveloppe consacrée à la péréquation est moins importante, et le comité des finances locales peine à trouver les dotations dont la croissance pourrait au moins être ralentie, sans opposition majeure des collectivités territoriales concernées.

a indiqué que la mise en place d'une DGF élargie, réceptacle de dotations diverses, toutes n'étant pas à visée péréquatrice, et d'un complément de garantie, part de la dotation forfaitaire, a réduit les possibilités de péréquation. Il a rappelé que, avant 1985, l'inflation permettait de ne pas rendre d'arbitrage, en écrêtant les garanties de ressources. Depuis 1985, et la fin de facto de l'inflation, le problème se pose et n'a pas été tranché. Chaque évolution du système fiscal se traduit par la mise en place d'une nouvelle garantie qui réduit d'autant les possibilités de mettre en oeuvre la péréquation.

Il a cité l'exemple de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA), rappelant que la loi de finances pour 2010 en attribue 2,7 milliards aux départements. Il a noté que le Sénat a souhaité que cette somme soit répartie en fonction de certains critères, mais que la solution retenue revient à faire de cette ressource supplémentaire une dotation de compensation des effets de la suppression de la TP : le niveau de ressources est garanti, la possibilité de satisfaire les charges réelles n'étant pas prise en compte. Il a indiqué que le dynamisme de cette recette fiscale, soit un rythme de croissance annuel estimé à 5 % par an, rend très difficile la mise en oeuvre d'une péréquation efficace à défaut de l'adosser elle aussi à une recette ou à une dotation à forte croissance annuelle.

s'est ensuite demandé sur la base de quels indicateurs doit reposer la péréquation. Il a d'abord examiné les indicateurs de ressources, estimant que le potentiel fiscal, élément central du mécanisme de péréquation, est mis à mal par la suppression de la TP, d'une part, et par le développement des nouvelles dotations de compensations que cette suppression entraîne, d'autre part. Il a estimé que le potentiel financier devra sans doute remplacer le potentiel fiscal, tout en s'interrogeant sur le périmètre à retenir, et notamment sur l'inclusion ou non des dotations de compensations, telles que les sommes allouées au titre du fonds de garantie individuelle des ressources des collectivités territoriales. Il a indiqué que cela reviendrait à prendre en compte dans la péréquation des dotations comme si elles étaient des produits fiscaux, alors que tel n'est pas le cas. Il a montré que, sur la base d'un tel raisonnement, un département avec des bases d'imposition élevées et des taux de fiscalité bas serait pénalisé, après l'application de la réforme prévue par la loi de finances pour 2010, par rapport à un département au fort taux d'imposition et aux bases réduites. Alors que, avant la réforme, les Hauts-de-Seine recevaient moins de péréquation que les Hautes-Pyrénées, ce qui correspondait à la différence entre leurs potentiels fiscaux, l'intégration en produit des écrêtements dans le potentiel financier permettra aux Hauts-de-Seine de bénéficier d'une plus forte allocation de ressources de péréquation que les Hautes-Pyrénées.

a observé que ces distorsions des dispositifs de péréquation seront fréquentes lorsque la révision des valeurs locatives sera engagée ; car, lors de la fixation des bases locatives, des méthodes différentes ont été utilisées qui entraînent une sous-estimation de 50 % du potentiel fiscal dans le département du Nord, par exemple. Cette sous-évaluation des bases a des effets sur les mécanismes de péréquation, effets qui pourraient disparaître au moment où les valeurs locatives seront révisées.

a ensuite soulevé la question de l'évaluation des différences de charges entre collectivités territoriales éligibles à la péréquation. Il a indiqué que le système qui lui paraît le plus efficient repose sur la prise en compte de la population. Il a noté que l'existence d'autres critères, tels que ceux définis par la loi de finances pour 2010 pour le quart de CVAE destiné à la péréquation, a des effets inattendus : la population n'est pas un critère discriminant, la prise en compte des bénéficiaires des minima sociaux ne pondère la péréquation qu'au bénéfice des départements d'outre-mer, en revanche, le critère de la voirie s'avère déterminant. Il a ajouté que ceci aboutit à avantager les zones peu peuplées dotées d'un important réseau de voirie, et plus encore les zones de montagne.

Il a estimé que la problématique de globalisation des mécanismes de péréquation devra être étudiée avec attention, regrettant que la loi de finances pour 2010 n'ait pas retenu comme périmètre de péréquation celui des intercommunalités. Il a souligné que la seule péréquation verticale, passant par des dotations étatiques allouées aux collectivités territoriales, ne lui paraît pas suffisante et qu'une péréquation départementale ou intercommunale doit être mise en oeuvre. Il a envisagé la répartition du produit de certains impôts au prorata des emplois communaux, notant que le rapport entre ces emplois et la population communale pourrait n'avoir aucun lien avec le niveau constaté de TP, et qu'une correction nationale ne lui semble pas pertinente. Il s'est prononcé en faveur de l'organisation d'une nouvelle péréquation horizontale dans le cadre des bassins d'emplois.

Par ailleurs, il a indiqué que la multitude des dotations existantes rend complexe la définition d'une politique cohérente de péréquation et a remarqué que la question de la création d'une dotation générale de péréquation sera sans doute au coeur des prochains débats budgétaires. Enfin, il a souhaité rappeler que les mécanismes de péréquation tels qu'ils sont définis aujourd'hui pénalisent les collectivités territoriales dont la population croît au profit de celles dont la population stagne.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion