Première mission du budget général, la mission « Remboursements et dégrèvements » est composée de crédits évaluatifs et soustraite à la norme de dépense et à la programmation triennale. Ce traitement particulier est lié au fait que l'évolution des crédits dépend de paramètres exogènes à la mission, que sont la croissance des assiettes fiscales, les orientations de la politique fiscale du Gouvernement et les arbitrages individuels des contribuables. En somme, ces dépenses se constatent davantage qu'elles ne se pilotent.
Je persiste à croire que la maquette budgétaire et le dispositif d'évaluation de la performance sont perfectibles, en dépit de l'inertie opposée par le Gouvernement à toutes les suggestions d'amélioration formulées par le Parlement. Je vous rappelle que j'avais travaillé avec la Cour des comptes et avec mon homologue de l'Assemblée nationale, notre collègue député Jean-Yves Cousin, pour faire évoluer la maquette. Aujourd'hui encore, l'efficience socio-économique des remboursements et dégrèvements n'est pas mesurée et la maquette du programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts locaux » n'a pas fait l'objet d'ajustements majeurs à la suite de la réforme de la taxe professionnelle. Compte tenu de ces insuffisances, l'examen des crédits présente des enjeux limités et nécessitera d'être complété par des travaux de contrôle, que j'entreprendrai au début de l'année prochaine.
Qu'en est-il des crédits ? 84,9 milliards d'euros sont demandés, pour 2012, soit une progression de 3,3 % par rapport à 2011. Cette hausse ne résulte que de l'évolution spontanée des remboursements et dégrèvements, toutes les mesures nouvelles ayant un effet à la baisse. Les observations que je vais formuler sont, cette année, particulièrement sujettes à caution. En effet, elles portent sur un texte fondé sur une hypothèse de croissance périmée (+1,75 %) et ne tiennent pas compte des ajustements supplémentaires que le Gouvernement va proposer afin de respecter la trajectoire de redressement de nos comptes publics. A cet égard, il nous faudra être attentifs aux conséquences de la désindexation du barème de l'impôt sur le revenu, non seulement pour le budget de l'Etat, mais aussi pour nos populations.
Les remboursements et dégrèvements d'impôts d'Etat se chiffrent à 74,6 milliards d'euros, soit une augmentation de 5 %. Ils enregistrent, en 2012, les effets de l'abrogation du bouclier fiscal, du recentrage du crédit d'impôt « Développement durable », du « rabot » sur les dépenses fiscales et de la suppression du crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt. Compte tenu de ses modalités d'imputation, le bouclier fiscal aura néanmoins une incidence sur les crédits de la mission dont le terme n'est pas connu à ce jour, nous indique-t-on dans les réponses au questionnaire.
Le montant global de la prime pour l'emploi devrait être de l'ordre de 2,9 milliards d'euros en 2011 et 2,5 milliards en 2012, dont 2,15 milliards de part restituée. Cette baisse résulte du gel du barème et de l'imputation du RSA. Je vous rappelle que le RSA « activité » est déductible de la PPE. L'imputation du RSA devrait susciter une économie de 50 millions d'euros en 2012 et le gel diminuerait le coût de la PPE de 330 millions d'euros, dont 225 millions restitués. Au total, alors que les revalorisations du barème avaient conduit à une hausse significative du coût de la prime entre 2001 et 2008 - de 2,5 à 4,5 milliards d'euros -, la tendance s'est inversée à compter de 2009. Ce phénomène se reflète également dans le montant moyen de PPE par foyer, passé de 501 euros en 2008 à 444 euros en 2011, et sur le montant maximal de PPE individuelle, passé de 960 à 836 euros sur la même période.
Les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux représentent 10,3 milliards d'euros, soit une baisse de 12 % qui traduit la disparition progressive des dégrèvements de TP, non compensée par la montée en charge des nouveaux dégrèvements, dont le dégrèvement barémique de CVAE. Je vous renvoie au rapport, qui détaille la manière dont les dégrèvements de TP passent de 7,1 à 5,6 milliards d'euros entre 2011 et 2012. J'observe que la réforme de la taxe professionnelle fait chuter le taux de prise en charge par l'Etat des impositions directes locales, qui est de 18,8 % en 2011 contre 26 % en 2009. Cette évolution ne se traduit pas pour autant par un accroissement de l'autonomie fiscale des collectivités, qui pâtit de la part croissante, dans les ressources de ces dernières, des dotations budgétaires et de la fiscalité d'Etat transférée. J'ajoute que cette baisse de la part de fiscalité locale prise en charge par l'Etat résulte pour partie de la diminution des compensations d'exonérations opérées pour tenir l'objectif de l'enveloppe « normée ». Les dégrèvements de taxe d'habitation augmentent de 4,8 %, passant de 3,34 milliards d'euros en 2011 à 3,5 milliards en 2012. 85 % de ces crédits correspondent au plafonnement de la taxe d'habitation en fonction du revenu. La disparition des dégrèvements en faveur des titulaires du RMI semble indiquer que les bénéficiaires du RSA « socle » ne sont pas éligibles au dégrèvement, ce qui pose question.
Sous le bénéfice de ces observations, et compte tenu de la portée essentiellement technique de ce rapport, j'invite la commission à s'abstenir sur la mission.