Intervention de Jean-Paul Teissonnière

Mission commune d'information sur le bilan et les conséquences de la contamination par l'amiante — Réunion du 11 mai 2005 : 1ère réunion
Audition de Me Jean-Paul Teissonnière avocat

Jean-Paul Teissonnière, avocat :

La mission a tout d'abord procédé à l'audition de Me Jean-Paul Teissonnière, avocat.

a estimé que les décisions de justice avaient abouti à une indemnisation satisfaisante des victimes de l'amiante, mais qu'elles n'avaient pas permis d'améliorer la prévention des risques professionnels.

Il a rappelé que les premiers procès en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, dans des affaires de contamination par l'amiante, avaient eu lieu en 1995, à une époque où la jurisprudence en ce domaine était restrictive. Un changement important s'est produit le 28 février 2002, lorsque la Cour de cassation a modifié, par plusieurs arrêts, la définition de la faute inexcusable, ce qui a permis de reconnaître la faute des employeurs ayant exposé leurs salariés à l'amiante de manière quasi-systématique. Ces condamnations sont assorties du versement aux victimes d'une indemnisation qui est désormais d'un niveau acceptable.

Les réparations versées par le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) sont généralement d'un niveau inférieur, mais présentent l'avantage de bénéficier à l'ensemble des victimes, y compris lorsque l'origine de la contamination est difficile à déterminer, par exemple en cas de contamination environnementale.

La Cour de cassation a cependant rendu plus restrictives les conditions d'opposabilité des décisions de reconnaissance des maladies professionnelles aux employeurs, ce qui a conduit à ce que de nombreuses décisions leur soient déclarées inopposables. Dans ce cas, le coût de l'indemnisation des victimes est assumé par le compte central de la branche accidents du travail et maladies professionnelles de la sécurité sociale, c'est-à-dire par l'ensemble des employeurs. Or, cette mutualisation du coût de l'indemnisation a pour effet de déresponsabiliser les entreprises à l'origine de la contamination, ce qui n'encourage pas les employeurs à s'engager dans une démarche plus active de prévention des risques professionnels. Le faible nombre d'actions récursoires engagées par le FIVA, qui dispose de trop peu de moyens pour remplir convenablement cette mission, conduit à un résultat analogue. L'absence de condamnation des employeurs crée un sentiment d'injustice chez les victimes, ce qui explique qu'elles soient de plus en plus nombreuses à se tourner vers les juridictions pénales pour tenter d'obtenir satisfaction.

a ensuite fait part de son incompréhension devant la politique suivie par certains départements ministériels en matière pénale. Rappelant que le ministère de la défense avait été fréquemment condamné dans des affaires de contamination par l'amiante, il s'est étonné qu'il ait confié, malgré cela, le désamiantage du porte-avion Clemenceau à un chantier indien, qui n'apporte aucune garantie de sécurité à ses ouvriers. La Chancellerie, pour sa part, n'a enjoint aucun procureur d'engager des poursuites pénales à l'encontre d'employeurs à l'origine de contaminations par l'amiante, alors que les condamnations pour faute inexcusable se sont multipliées. Les plaintes déposées par les victimes, pour empoisonnement ou homicide involontaire, sont par ailleurs instruites avec une extrême lenteur.

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