Après avoir souligné l'intérêt du travail de la société REES-France, notamment en raison des données nouvelles qu'elle présente sur la prise en charge actuelle des AVC, M. Jean Bardet, député, rapporteur, a indiqué que la Société française de neurologie vasculaire (SFNV), associée à la réalisation de l'étude, lui avait fait part d'un certain nombre de réserves et que globalement, l'étude n'était pas encore satisfaisante au regard de ses objectifs.
Il a regretté que la mise en place des instruments de collecte des données - interrogation des bases de données de l'assurance maladie, lancement d'une enquête de terrain auprès des services d'urgence accueillant des AVC -, ait mobilisé plus de temps que prévu.
Il a également souligné que l'accent a été parfois excessivement mis sur les problématiques médicales, au détriment des aspects organisationnels qui intéressent l'Opeps, notamment pour qu'ils puissent être pris en compte dans le cadre de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).
Ainsi, le traitement de certaines questions essentielles, telles que celle des moyens permettant d'assurer une couverture géographique de l'ensemble de la population, compte tenu des difficultés d'accès liées aux conditions géographiques et démographiques - zones urbanisées, zones rurales, zones de campagne - n'a pas pu être traitée de façon satisfaisante, faute de temps.
La première partie de l'étude, portant sur un état des lieux a recensé, grâce à une interrogation du PMSI, 137 000 séjours hospitaliers, fournissant une première photographie détaillée des causes et des modalités des hospitalisations imputées aux AVC. Toutefois, le bilan critique ne transparaît que difficilement du fait de l'abondance des données.
La deuxième partie de l'étude porte sur l'épidémiologie des AVC et conduit à souligner le retard français en la matière. En effet, le modèle épidémiologique jusqu'à présent utilisé pour calculer l'incidence nationale et ses déclinaisons régionales est construit à partir de données européennes et aboutit à des estimations nettement supérieures aux hospitalisations constatées pour les AVC. De son côté, le registre de Dijon, seul registre épidémiologique français portant sur les AVC, fournit des chiffres d'incidence divergents, plus faibles. Il en résulte que l'incidence des AVC en France n'est toujours pas précisément connue. Toutefois, il faut relever que l'estimation de l'impact du vieillissement de la population sur l'incidence des AVC est chiffrée à 13 000 cas supplémentaires annuels à l'horizon 2015.
La troisième partie de l'étude concerne les aspects organisationnels, élément stratégique de l'étude. Toutefois, les hypothèses sur lesquelles s'appuient certains raisonnements doivent être validées, ainsi que l'a relevé la Société française neurovasculaire. Les prévisions d'installation d'unités neurovasculaires, issues de la synthèse des volets AVC des SROS sont difficiles à vérifier, en raison de l'hétérogénéité des documents initiaux. Par ailleurs, la gradation des unités de soins selon la gravité des AVC, proposée par l'étude pour améliorer la couverture géographique des besoins sanitaires, ne rencontre pas l'assentiment de la Société française neurovasculaire.
La quatrième partie de l'étude, relative au coût de l'amélioration de la prise en charge précoce des AVC démontre que les coûts hospitaliers en soins aigus actuellement engagés ne représentent qu'une faible fraction des frais entraînés par les AVC, auxquels il faut ajouter les coûts de prise en charge de leurs séquelles. Ainsi, le coût des soins aigus s'élève à 520 millions d'euros, alors que la prise en charge totale atteint 4 milliards d'euros, selon une estimation de 2003. Les investissements supplémentaires que la collectivité devrait consentir pour améliorer la prise en charge précoce seraient donc largement compensés par les économies réalisées en matière de soins de suite, si les AVC étaient pris en charge de façon plus précoce.
Une première cause du surcoût lié à l'amélioration de la prise charge précoce tient à l'installation des lits de soins intensifs mais la SFNV estime qu'il faut également prendre en compte le coût des personnels supplémentaires nécessaires à ces structures, lesquels ne peuvent résulter de seuls redéploiements au sein de l'hôpital, et en particulier les besoins en médecins neurologues - que la démographie médicale de la spécialité ne semble pas à même de satisfaire.
Enfin, la partie du document relative aux propositions laisse en suspens de nombreuses questions. Comment organiser la prise en charge pour le traitement par thrombolyse, qui suppose notamment un équipement en IRM ? Ceci doit-il conduire à modifier les schémas de prise en charge hospitalière ? Quelle stratégie doit être suivie pour développer les unités de soins neurovasculaires ? Que faire dans les régions où le nombre de services de neurologie n'est pas suffisant pour assurer une prise en charge géographiquement cohérente de l'ensemble des patients ? Enfin, d'un point de vue général, l'étude s'appuie à l'excès sur des normes sanitaires d'origine réglementaire qui ne sont pas nécessairement appropriées. En particulier, les normes réglementaires relatives aux activités de soins intensifs - une infirmière et une aide soignante pour quatre malades -sont insuffisantes, notamment du fait de la lourdeur des soins de nursing.
En conclusion, le rapporteur a estimé nécessaire d'approfondir certains points pour que l'étude réponde à son objectif, qui est de présenter des propositions pour l'amélioration de la prise en charge précoce des AVC.
Le président Jean-Michel Dubernard, député, a souligné l'extrême importance, ainsi que la complexité des problèmes liés à la prise en charge précoce des AVC. En la matière, l'objectif de l'Opeps consiste effectivement à éclairer les travaux du Parlement, notamment en vue de la discussion du PLFSS. De ce point de vue, l'exploitation des données du PMSI ne semble pas constituer la méthode de travail la plus appropriée, car elle a tendance à réduire les problèmes de santé publique à une logique de moyens.
Si la société REES-France a respecté dans la forme le cahier des charges qui lui était imposé, il reste qu'au fond, certaines parties de son étude ne semblent effectivement pas rencontrer l'assentiment de la SFNV. Il est donc nécessaire que l'étude soit approfondie le plus vite possible en tenant compte de la position de la SFNV et de telle sorte que ses conclusions puissent être utilisées pour le prochain PLFSS.