Intervention de Claude Le Pen

Office parlementaire d'évaluation des politiques de santé — Réunion du 30 mai 2007 : 1ère réunion
Etude sur le dépistage et le traitement du cancer de la prostate — Présentation des propositions du conseil des experts coordination : m. claude le pen

Claude Le Pen, membre du conseil d'experts :

L'office a ensuite entendu l'exposé de M. Claude Le Pen, membre du conseil d'experts. Il a indiqué que le cancer de la prostate est le cancer le plus fréquent, juste après le cancer du sein. On estime à 40 000 le nombre de nouveaux cas chaque année et il est d'autant plus prévalent que son évolution est lente. Dans un nombre important de cas, il peut rester silencieux jusqu'à la fin de la vie des patients. Si le nombre de décès imputables est en diminution, l'incidence de ce cancer est en forte augmentation. Mais cette évolution semble liée aux progrès de son dépistage. D'un point de vue de santé publique, le cancer de la prostate pose un certain nombre de questions.

D'abord, la question de l'opportunité d'un traitement des lésions cancéreuses à un stade précoce donne lieu à un débat important entre spécialistes, compte tenu de l'évolution lente et asymptomatique d'un grand nombre de cas et des effets secondaires non négligeables des traitements : la stratégie d'attente, le « watchful waiting » peut, en revanche, faire courir le risque d'un traitement trop tardif. Sur ce point il existe, en fait, peu de recommandations collectives mais plutôt des attitudes individuelles.

Ensuite, pour ce qui concerne les stratégies thérapeutiques, la Haute autorité de santé, dans son rapport de 2002, concluait qu'en fait la littérature disponible ne permettait pas d'établir de certitude sur le rapport coût/avantages des différents modes de prise en charge des patients.

Enfin, une troisième incertitude concerne l'intérêt d'un dépistage systématique du cancer de la prostate, à l'image par exemple de ce qui existe pour le cancer du sein et les cancers colorectaux, ce qui constitue un important sujet de santé publique. Les tenants d'un dépistage de masse, notamment aux Etats-Unis, estiment que la diminution du nombre de cas constatée depuis peu est liée au nombre croissant de dosages de PSA pratiqués. D'autres, notamment en France, estiment au contraire qu'un dépistage généralisé ne réduirait pas efficacement la mortalité liée au cancer de la prostate et aurait évidemment un coût important. Des études scientifiques sont en cours qui devraient apporter des éclairages nouveaux sur ce sujet : il ne semble donc pas opportun que l'Opeps s'en saisisse pour l'heure.

En revanche, le problème de l'information du patient et de sa participation aux décisions le concernant semble susciter un vif intérêt. Les incertitudes sur le dépistage, sur la décision de traiter ou de ne pas traiter au stade précoce et sur le type de traitement à mettre en oeuvre en font un sujet extrêmement sensible. Aux Etats-Unis, cette question a une implication directe en termes de responsabilité médicale et les praticiens associent de plus en plus leurs patients à leurs décisions concernant la prise en charge du problème. En France, des efforts sont également consentis pour que les décisions médicales soient partagées entre patient et praticien, mais trop souvent, on constate la pratique de dépistages « sauvages » intégrant un dosage de PSA parmi d'autres examens sanguins, sans protocole ni recommandation médicale, et parfois à l'insu du patient.

Ainsi, il convient de distinguer entre, d'une part, les questions proprement médicales, auxquelles des réponses ne peuvent être apportées qu'au prix d'investigations scientifiques poussées, d'autre part, les questions de santé publique, qui relèvent des compétences de l'Opeps. Face à la banalisation du dépistage du cancer de la prostate financé par la collectivité, plusieurs questions de santé publique se posent, relatives notamment aux dépistages spontanés, aux filières existantes, à l'orientation des patients, à la nature des examens pratiqués et aux difficultés de prise en charge rencontrées par les patients. Par ailleurs, l'information du patient et son association aux décisions médicales le concernant sont également susceptibles de justifier une étude pour mieux cerner les obstacles culturels et tarifaires.

En conclusion, M. Claude Le Pen a estimé que la question du dépistage spontané du cancer de la prostate et du rôle du patient dans le processus de prise en charge justifient une étude de l'Opeps.

Le président Jean-Michel Dubernard, député, a souligné que la question du cancer de la prostate est plus simple que celle des AVC parce que la littérature scientifique la traite abondamment, parce qu'elle n'implique à titre principal qu'une spécialité médicale et parce que l'Association française d'urologie est une société savante très active.

En matière de dépistage, on constate que les personnes bien informées bénéficient souvent d'un dépistage non seulement par PSA mais aussi par toucher rectal. La question de l'association du patient aux décisions de dépistage et de traitement est effectivement particulièrement importante dans le cadre du cancer de la prostate. Il a également souligné que l'Association nationale des malades du cancer de la prostate accomplit un travail très utile d'accompagnement des malades, ceux-ci étant d'autant plus mobilisés que le cancer de la prostate se guérit.

a indiqué qu'il a constaté, lors de la réalisation de l'étude de faisabilité, une certaine unité de vue entre les professionnels concernés par le cancer de la prostate, les urologues et les spécialistes du cancer.

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