Intervention de André Trillard

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 19 janvier 2011 : 1ère réunion
Privilèges et immunités du tribunal international du droit de la mer — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de André TrillardAndré Trillard :

Nous sommes appelés à nous prononcer sur un accord, signé en mai 1997, portant sur les privilèges et immunités du Tribunal international du droit de la mer.

Avant d'évoquer le contenu de cet accord, je souhaiterais vous présenter brièvement l'origine, les compétences et le fonctionnement de ce tribunal, dont la création est assez récente, puisqu'elle date de 1996.

Le Tribunal international du droit de la mer est un organe juridictionnel international, spécialisé dans le domaine du droit maritime, dont la création a été prévue par la convention des Nations unies sur le droit de la mer, dite convention de Montego Bay, signée en 1982 et entrée en vigueur en 1994.

Pour régler les différends auxquels pourraient donner lieu son application ou son interprétation, la convention de Montego Bay a prévu plusieurs voies différentes, dont le choix est laissé aux Etats :

- la Cour internationale de justice ;

- l'arbitrage ;

- ou encore le Tribunal international du droit de la mer.

Ainsi, pour la délimitation de leurs frontières maritimes, certains Etats choisissent de saisir la Cour internationale de justice (par exemple le Nicaragua et la Colombie ou l'Ukraine et la Moldavie), d'autres de recourir à l'arbitrage (à l'image de la Croatie et de la Slovénie), et d'autres enfin de saisir le Tribunal international du droit de la mer (le Bangladesh et le Myanmar, par exemple).

Le tribunal est également compétent pour statuer sur les règles applicables en matière de zone de pêche ou en matière de fonds marins.

Ce tribunal, qui a son siège à Hambourg, comprend 21 juges, élus pour un mandat de neuf ans par les Etats parties à la Convention.

La France compte un juge en la personne de M. Jean-Pierre Cot, ancien ministre, dont le mandat expire en septembre 2011.

Le greffe du tribunal compte 37 personnes, dont trois Français.

Son budget est de 17,5 millions d'euros sur trois ans, la contribution de la France s'élevant à hauteur de 8,2 %, soit environ 716 000 euros pour 2010.

L'activité du tribunal est assez modeste. Il n'a été saisi que de dix-huit affaires depuis sa création, dont deux ont donné lieu à un désistement et treize ont été jugées.

Parmi les trois affaires pendantes, on peut citer l'affaire du navire « Louisa ». Ce navire, battant pavillon de Saint-Vincent-et-les-Grenadines, avait été arraisonné en 2006 par la marine espagnole car les autorités espagnoles le soupçonnaient d'avoir procédé à des levés des fonds marins dans la baie de Cadix afin de repérer des indices de la présence de pétrole et de méthane et d'avoir ainsi enfreint les règles en matière de protection du patrimoine historique et du milieu marin, ce que conteste son Etat de pavillon.

L'accord qui est aujourd'hui soumis à notre examen vise à conférer aux membres du tribunal des privilèges et immunités diplomatiques dans l'exercice de leurs fonctions.

Il s'agit d'un accord très classique qui repose sur le modèle des précédentes conventions conclues par la France en la matière, notamment la convention sur les privilèges et immunités de l'Organisation des Nations unies.

En effet, toutes les organisations internationales, mais aussi les organes spécialisés des Nations unies, à l'image de l'UNESCO, par exemple, et les tribunaux internationaux, comme la Cour pénale internationale, se voient reconnaître des privilèges et immunités diplomatiques.

L'accord affirme ainsi la personnalité juridique du tribunal, ainsi que l'inviolabilité de ses locaux, de ses archives et de sa correspondance.

Il lui reconnaît aussi le droit d'arborer son drapeau et son emblème.

Il lui octroie l'immunité contre toute forme de poursuite et institue une protection de ses personnels, juges ou fonctionnaires, mais aussi des avocats et conseils ou des témoins et experts, ainsi qu'une protection de ses biens en matière de perquisition ou de saisie.

Enfin, il prévoit une exonération d'impôts et de taxes pour le tribunal, ainsi que sur les traitements et salaires des juges et des fonctionnaires du tribunal. A la demande du ministère de l'économie, la France devrait toutefois faire une réserve sur ce point afin de prendre en compte les revenus exonérés de ceux d'entre eux qui seraient résidents en France pour déterminer le taux applicable à l'ensemble de leurs revenus. Cette règle, dite du taux effectif, est particulièrement importante pour la France, parce qu'elle permet de maintenir la cohérence du système d'imposition, basé sur la progressivité de l'impôt. En tout état de cause, cette exemption fiscale ne devrait avoir qu'un impact limité compte tenu du faible nombre de personnes concernées.

A ce jour, trente-huit Etats ont ratifié cet accord.

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