Intervention de René Beaumont

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 20 mai 2009 : 1ère réunion
Relations entre l'union européenne et israël — Communication

Photo de René BeaumontRené Beaumont, rapporteur :

Lors d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord entendu une communication de M. René Beaumont sur le rehaussement des relations entre l'Union européenne et Israël.

a tout d'abord rappelé que, deux propositions de résolutions relatives aux relations entre l'Union européenne et Israël ayant été déposées sur le bureau du Sénat, il était nécessaire, sans anticiper sur leur discussion, d'informer la commission du fond du dossier, de son état d'avancement et de la position française.

Il a estimé que la question fondamentale posée dans ce dossier était de savoir s'il convenait de dissocier ou au contraire d'établir un lien entre la qualité et la densité de la relation bilatérale avec l'Etat d'Israël et l'attitude de cet État dans le processus de paix.

Parmi les Etats membres, les uns, dont la France, considèrent que l'établissement d'une relation confiante avec Israël dans le cadre d'un dialogue politique plus régulier et plus étroit permettra de peser sur ses choix tandis que les autres estiment que l'intensification des relations avec l'Union européenne, souhaitée par Israël, constitue un moyen de pression dont il serait regrettable de se priver.

Il a ensuite rappelé que les relations entre l'Union européenne et Israël étaient anciennes et profondes. Elles ont été formalisées dès 1975 par un accord de coopération économique. Dans le cadre du processus de Barcelone, lancé en 1995, qui concerne les États du pourtour méditerranéen, un accord d'association a été conclu, qui est entré en vigueur le 1er juin 2000. Comme tous les accords d'association, il comprend, pour l'essentiel, un volet politique et un volet commercial.

Dans le cadre de la politique de voisinage qui concerne les Etats du sud et de l'est de l'Europe, à l'exception des pays candidats, un plan d'action a été conclu avec Israël, comme avec les autres États concernés, qui renforce la coopération avec l'Union européenne.

Si, pour Israël, la relation stratégique essentielle reste la relation avec les Etats-Unis, l'Union européenne occupe une place très importante sur le plan économique : elle est son premier débouché commercial en absorbant 11,3 milliards d'exportations israéliennes et son second fournisseur derrière les États-Unis avec 14 milliards d'euros d'importations en provenance de l'Union.

Sur le plan économique et commercial, Israël est largement tourné vers l'Union européenne. Les relations sont très développées dans tous les domaines : éducation, culture, recherche... Selon un récent sondage, 40 % des Israéliens pourraient prétendre à un passeport européen et 70 % des Israéliens de confession juive et 40 % des arabes israéliens souhaitent que leur pays rejoigne l'Union européenne.

a rappelé que, dans ce contexte, l'Etat d'Israël avait présenté, à la fin de l'année 2007, sous présidence portugaise, une demande de « rehaussement » de ses relations avec l'Union européenne. Instruit sous présidence allemande, le principe en a été accepté le 16 juin 2008, sous présidence slovène, lors du 8è conseil d'association Union européenne-Israël. Concrètement, ce rehaussement se traduirait par un nouveau « plan d'action voisinage », prévoyant :

- un renforcement du dialogue politique ;

- une harmonisation réglementaire et une coopération sectorielle accrue ;

- la participation directe d'Israël à certains programmes communautaires.

La règle de l'unanimité prévaut pour la prise de décision.

Pour ce qui concerne la partie politique, qui relève du Conseil, le Conseil affaires générales et relations extérieures a adopté, le 8 décembre 2008, sous présidence française, des lignes directrices qui prévoient la diversification des cadres et des niveaux du dialogue politique entre les parties. La partie sectorielle relève de la Commission qui doit faire des propositions.

a indiqué que, le 4 décembre 2009, le Parlement européen avait reporté sine die le vote de son avis conforme sur la participation d'Israël à certains programmes communautaires (innovation et compétitivité). Avant même l'offensive israélienne sur Gaza, il considérait qu'Israël n'avait pas fait les gestes nécessaires à l'amélioration de la situation humanitaire dans ce territoire.

A la suite de l'opération israélienne à Gaza « plomb durci », un dialogue s'est instauré entre la Commission, par la voix de Mme Benita Ferrero-Waldner, et la présidence tchèque, la première considérant que l'opération israélienne à Gaza « plomb durci » remettait en cause le processus, la seconde considérant qu'il n'en était rien.

En tout état de cause, certains États membres, dont l'Espagne, le Portugal, la Belgique, ou encore la Suède, partagent l'analyse de la Commission et ont fait savoir qu'ils s'opposeraient à un tel rehaussement au sein du Conseil. L'unanimité requise au sein du Conseil n'est donc actuellement pas réunie.

Le 9è conseil d'association Union européenne-Israël, initialement prévu le 18 mai, date à laquelle le premier ministre israélien s'est rendu aux Etats-Unis, a été reporté au mois de juin et le « plan d'action voisinage » actuel devrait donc être prolongé par voie d'échanges de lettres.

a indiqué que le processus de rehaussement connaissait une phase d'interruption et d'attente. Il a rappelé que la situation sur le terrain était totalement bloquée et faisait actuellement l'objet d'une mission d'information de M. Jean François-Poncet et Mme Monique Cerisier-ben Guiga pour le compte de la commission.

Du côté israélien, c'est le fondement même du processus de paix, le principe de la terre contre la paix et la solution des deux États, qui est remis en cause par le nouveau gouvernement.

Du côté palestinien, la division entre Gaza et la Cisjordanie persiste et ne semble pas pouvoir trouver d'issue à court terme. La question palestinienne, dont l'OLP avait conquis le monopole, semble être redevenue la chambre d'écho des luttes internes au monde arabe, perturbées, de surcroît, par la réémergence de l'Iran.

Dans cette situation de blocage, la référence aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité devrait redevenir centrale pour toute relance des négociations.

a ainsi rappelé que, le 11 mai dernier, une déclaration présidentielle adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies avait réaffirmé l'irréversibilité des négociations bilatérales entre Israéliens et Palestiniens et confirmé son attachement à la solution des deux Etats.

Ce texte n'aborde cependant ni la question de la colonisation, ni celle, tout à fait cruciale, de l'accès à Gaza, ce qu'a regretté le ministre des affaires étrangères, M. Bernard Kouchner.

a souligné que l'initiative arabe de paix, formulée en 2002 et réaffirmée à plusieurs reprises, suscitait un nouvel intérêt.

Devant cette situation, tous les regards sont tournés vers les Etats-Unis et la nouvelle administration américaine. Le Président Obama prononcera, le 4 juin prochain, au Caire, un discours d'autant plus attendu que l'administration américaine s'est jusqu'à présent placée dans une phase d'écoute sans faire connaître le résultat de la « policy review » qu'elle a menée sur le Moyen-Orient. Le rapporteur a estimé qu'il était encore trop tôt pour savoir si l'administration américaine s'engagerait véritablement dans ce dossier, auquel cas il est probable que l'Union européenne, bien que très divisée, lui emboiterait le pas. Dans le cas contraire, le dossier du rehaussement illustre la grande faiblesse de l'Union européenne privée, du fait de ses divisions, de la volonté et de la capacité d'intervention suffisantes en dépit de son poids économique dans la région.

En conclusion, il a considéré que la situation d'attente de clarification des positions des différents acteurs du dossier était une situation de statu quo pour les relations Union européenne-Israël. Cette situation pouvait, d'une certaine manière, satisfaire tant les tenants que les détracteurs du processus. En effet, même si aucune conditionnalité stricte n'était établie entre le rehaussement et le processus de paix, le contexte ne se prêtait clairement pas au rehaussement envisagé.

Dans une situation très évolutive, il a estimé que la commission devait rester saisie de ce dossier, se tenir informée et prête à prendre position le moment venu.

Il a noté que la visite de M. Netanyahou à Washington permettait d'envisager une plus grande fermeté américaine face à Israël, notamment sur la question de la colonisation des territoires occupés. Cette visite a aussi confirmé la position très arrêtée du premier ministre israélien sur la question des deux Etats alors que, du côté palestinien, le dialogue du Caire entre Hamas et Fatah doit reprendre et qu'un congrès du Fatah, prévu début juillet, devrait amorcer une réforme du mouvement.

a proposé de continuer à suivre ce dossier et de faire un rapport à nouveau devant la commission à l'approche du Conseil d'association.

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