Intervention de Christian Cambon

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 16 juin 2010 : 1ère réunion
Orientations de la politique française de coopération et de développement — Examen du rapport d'information

Photo de Christian CambonChristian Cambon, co-rapporteur :

Je vous remercie pour cette initiative et pour l'organisation des travaux de la commission. La table ronde, l'audition du ministre conjointement avec la commission des finances, tout cela nous a permis de travailler dans les meilleures conditions.

Au préalable, nous avions procédé avec mon collègue Vantomme à de nombreuses auditions qui nous avaient permis d'approfondir le sujet.

Nous nous félicitons évidemment de la consultation du Parlement qui constitue une première dans ce domaine. Nous estimons qu'elle doit être une première étape vers l'adoption, à échéance régulière, par le Parlement, d'une loi d'orientation sur le développement, comme c'est le cas dans de nombreux pays d'Europe.

Sur le fond, le document cadre permet tout d'abord d'expliquer très concrètement ce que fait la France quand elle finance, avec d'autres, le réseau d'adduction d'eau de Bamako, quand elle intervient avec le Japon pour soutenir le programme indonésien de lutte contre la déforestation ou quand elle garantit les emprunts des banques africaines de soutien aux PME. Il s'agit surtout de définir quels sont nos objectifs, nos zones prioritaires et nos moyens d'interventions.

Très classiquement le document établit un diagnostic, définit des priorités et décrit les moyens d'y parvenir.

Le diagnostic procède à une description de l'évolution internationale qui débouche sur une vision assez novatrice de la coopération. Partant de l'idée que si le monde bouge notre coopération doit aussi bouger, le document cadre dessine un visage nouveau de la coopération. Je voudrais vous en donner quelques illustrations.

Ce document se fonde, premièrement, sur l'idée que l'aide au développement ne relève plus seulement d'une démarche caritative. Elle est aujourd'hui pensée et vécue comme un moyen de régulation de la mondialisation, comme une contribution au développement harmonieux de la planète. Les attentats de septembre 2001, la résurgence de la piraterie, le retour des pandémies, ont bien montré -comme l'a dit le président- que le sous-développement constituait un terreau favorable à des menaces qui touchent aussi bien les pays du Sud que les pays du Nord.

Il marque, deuxièmement, la fin d'une politique de développement indifférenciée. L'aide au développement n'a pas le même sens, ne poursuit pas les mêmes objectifs, n'utilise pas les mêmes instruments à Nouakchott et à Nankin. A Nouakchott, on lutte contre la pauvreté et pour la croissance afin de créer les conditions pour que ce pays soit autonome. A Nankin, on essaie de persuader les Chinois qu'il y a un chemin vers une croissance plus économe en carbone et que nous sommes prêts à les aider dans l'intérêt global de la planète.

Ce document précise, troisièmement, que notre coopération doit désormais toujours se penser sous la forme de partenariats. La France n'agit, en effet, plus jamais seule. Même dans le cadre de notre aide bilatérale, la coopération consiste à initier des actions et trouver des partenaires pour financer ensemble des projets de développement. Même dans des pays comme le Mali, la France ne représente plus que 10 % de l'aide au développement. Nos actions s'effectuent donc toujours en partenariat avec d'autres bailleurs de fonds ou avec les institutions multilatérales.

Enfin, ce document souligne la nécessité d'inventer une coopération qui dépasse le socle exclusif des souverainetés nationales pour inventer les politiques globales de demain. Avec la lutte contre le changement climatique, ou les pandémies mondiales, l'aide au développement doit trouver des modes de coopération et de gouvernance qui dépassent la coopération intergouvernementale. On l'a bien vu lors de l'échec de la conférence de Copenhague : les défis du 21ème siècle exigeront des solutions collectives pour gérer l'intérêt commun de la planète, une gouvernance internationale qu'il nous reste à inventer.

Ce document nous propose de sortir d'une vision dichotomique du monde. Fin de la dichotomie Nord-Sud avec l'essor des pays émergents, fin de l'opposition entre donateurs et récipiendaires avec des partenariats multiples, fin de la dichotomie aide publique/marché avec la multiplication des instruments hybrides.

Ce diagnostic posé par le document-cadre nous paraît juste et utile. C'était également le sentiment des intervenants de la table ronde. Il introduit une vision neuve de l'aide au développement et permet de mieux comprendre une politique complexe dont on oublie, derrière des batailles de chiffres, la signification très actuelle.

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