Enfin, la commission a entendu Mme Catherine Paulet, médecin psychiatre, du service médico-psychologique régional du centre pénitentiaire des Baumettes, M. Cyrille Canetti, médecin psychiatre du service médico-psychologique régional de la maison d'arrêt de Fleury -Mérogis, Mme Christiane de Beaurepaire, médecin psychiatre, du service médico-psychologique régional, du centre pénitentiaire de Fresnes, et M. Roland Coutanceau, médecin psychiatre, au cours d'une table ronde de médecins psychiatres.
a distingué dangerosité criminologique et dangerosité psychiatrique. Elle a précisé que la dangerosité criminologique visait à apprécier le risque de commission d'une infraction pénale. Elle a relevé à cet égard que les auteurs des crimes qui provoquaient l'émotion la plus vive au sein de l'opinion publique étaient aussi ceux qui récidivaient le moins. S'agissant de la dangerosité psychiatrique, elle a relevé qu'elle visait le risque à un moment donné de commettre un acte dangereux lié à un trouble mental en notant que plus l'on s'éloignait de ce moment déterminé, plus la prédiction apparaissait incertaine. Elle a estimé que, malgré les expériences conduites en Amérique du Nord ainsi que dans les pays d'Europe du Nord, les outils d'évaluation de la dangerosité criminologique dans le but de mieux prévenir la récidive demeuraient imparfaits et qu'il convenait de les utiliser dans le cadre strict de la recherche sans en faire des instruments de décision (ainsi un test psychologique ne pouvait jamais apporter la preuve d'une infraction).
La dangerosité psychiatrique, a poursuivi Mme Catherine Paulet, se fonde sur un examen clinique qui tient compte du contexte environnemental. Elle a jugé que l'organisation des soins psychiatriques en France constituait un modèle tout à fait pertinent sur le plan éthique et technique, pour autant que les moyens adaptés soient mis en oeuvre. Elle a relevé notamment que les secteurs psychiatriques étaient complétés par des dispositifs spécifiques, en particulier les unités pour malades difficiles, qui comptaient près de 450 places et pouvaient accueillir dans des conditions sanitaires et sécuritaires adéquates des personnes qui combinaient à la fois le critère de dangerosité psychiatrique et criminologique. Elle a souligné également les apports de la loi du 18 janvier 1994 qui avait confié la prise en charge des soins en détention au service public hospitalier et observé que cette évolution s'était traduite par une amélioration significative des prestations de soins. Elle a ajouté que les unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) viendraient compléter utilement le dispositif existant.
a également évoqué la prise en charge des délinquants sexuels, désormais encadrée par la loi du 17 juin 1998, en citant en particulier le projet de la mise en place de centres de ressources interrégionaux pour assurer le suivi de ces personnes, annoncé par une circulaire d'avril 2006. Elle a jugé inutile la création d'établissements spécialisés pour les criminels sexuels et souhaité que les dispositifs existants puissent se développer.
Revenant sur les conditions de l'articulation entre la santé et la justice, Mme Catherine Paulet a indiqué que le « risque zéro » n'existait pas en matière criminologique et, qu'en tout état de cause, le médecin psychiatre n'avait pas pour objet de traiter la délinquance, mais de conduire avec le patient un travail d'élaboration psychique qui tend à repérer son fonctionnement mental afin d'essayer de remédier aux difficultés rencontrées et peut, par surcroît, contribuer à prévenir le risque de récidive. Elle a rappelé l'opposition de la profession psychiatrique à la mise en place de centres de protection sociale fermés en estimant que les établissements de défense sociale belges ou les établissements TBS néerlandais s'apparentaient plus à des lieux de relégation qu'à des structures de soins.
Elle a jugé que, si la question de l'appréciation de la responsabilité sur la base de l'article 122-1 du code pénal continuait à soulever de délicates questions d'appréciation et pourrait justifier une intervention du législateur, pour le reste, le régime juridique visant la prise en charge des personnes atteintes de troubles mentaux ainsi que l'organisation de la psychiatrie apparaissait tout à fait satisfaisant, sous réserve de la mise en place des moyens humains et financiers nécessaires.