Intervention de Éric Woerth

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 13 janvier 2010 : 2ème réunion
Loi de finances rectificative pour 2010 et exécution du budget de 2009 — Audition de Mme Christine Lagarde ministre de l'économie de l'industrie et de l'emploi et de M. Eric Woerth ministre du budget des comptes publics de la fonction publique et de la réforme de l'etat

Éric Woerth :

a insisté sur le fait que la crise n'a pas conduit le Gouvernement à modifier le cap de sa politique budgétaire. Hors plan de relance, les dépenses de l'Etat en valeur diminuent de 0,2 % par rapport au niveau constaté en 2008. Si le contexte favorable en matière de taux d'intérêt a permis d'enregistrer une réduction de la charge de la dette de 5,4 milliards d'euros par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2009, le Gouvernement a dû contenir la dynamique de certaines dépenses exceptionnelles ou liées à la crise, dont 1,3 milliard d'euros au titre des dotations à la sécurité sociale, 1,1 milliard d'euros au titre de la contribution française au budget européen et 500 millions d'euros pour le financement des dépenses de lutte contre la grippe A. Dans ces conditions, la baisse des dépenses hors plan de relance a été affectée au remboursement de dettes anciennement constituées auprès de la sécurité sociale (2 milliards d'euros) et à la diminution du déficit (250 millions d'euros).

S'agissant du plan de relance, le ministre a observé que son coût budgétaire est légèrement inférieur aux prévisions, soit 37 milliards d'euros contre 38,6 milliards initialement envisagés. Le calendrier du paiement de certaines dépenses connaît un léger décalage, occasionnant des décaissements en retrait de 800 millions d'euros par rapport aux prévisions. Par ailleurs, la mensualisation du remboursement des crédits de TVA pourrait s'avérer moins coûteuse que prévu, pour un total de 6 milliards d'euros contre 6,5 milliards d'euros attendus. Enfin, 200 millions d'euros de prêts aux constructeurs automobiles n'ont pu être versés en 2009, et le seront dans les prochaines semaines.

a achevé son analyse de l'exécution 2009 en indiquant que le déficit public devrait s'établir autour de 7,9 % du produit intérieur brut (PIB) en 2009, au lieu des 8,2 % attendus, grâce à la maîtrise des dépenses de l'Etat, à l'amélioration des rentrées fiscales et aux effets sur les comptes sociaux d'une moindre dégradation de la masse salariale.

Il a procédé ensuite à la présentation des principales dispositions du premier projet de loi de finances rectificative pour 2010. Dans la continuité des préconisations du rapport de la commission co-présidée par MM. Alain Juppé et Michel Rocard, le projet de loi ouvre 35 milliards d'euros de crédits complémentaires sur le budget de l'Etat, au bénéfice d'un nombre restreint de priorités stratégiques. 19 milliards d'euros seront ainsi consacrés à l'enseignement supérieur, la formation et la recherche, 6,5 milliards d'euros aux filières industrielles et aux petites et moyennes entreprises (PME), 5 milliards d'euros au développement durable et 4,5 milliards d'euros à l'économie numérique. Afin de susciter un effet de levier au profit des agents économiques, ces crédits seront associés à des financements privés ou publics pour démultiplier l'effort d'investissement. Par ailleurs, 63 % des crédits ouverts le seront sous forme de dotations non consommables, de prêts et de prises de participation, ce qui traduit la volonté du Gouvernement de favoriser la constitution d'actifs.

Les 35 milliards d'euros feront l'objet d'une seule et même ouverture, alors que le décaissement des sommes s'étalera sur plusieurs années, et sera confié à des opérateurs de l'Etat tels que l'Agence nationale de la recherche (ANR), l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) ou OSEO.

a en effet jugé dangereux de faire coexister de manière durable le financement des investissements d'avenir avec les budgets « ordinaires » des ministères, le caractère exceptionnel de ces financements interdisant tout « porosité » avec les dépenses courantes. Ainsi, l'architecture budgétaire retenue permet d'isoler les crédits du reste des budgets, les crédits ouverts étant regroupés au sein de nouveaux programmes, créés au sein des missions existantes du budget et assortis d'une justification au premier euro des dépenses et d'objectifs et indicateurs de performance. Le ministre a également souligné que l'information du Parlement sera garantie par la production d'un « jaune » budgétaire annexé au projet de loi de finances, et consacré aux conditions de mise en oeuvre et aux résultats obtenus grâce aux financements de l'emprunt national.

a fait valoir que la réalisation des investissements d'avenir implique la mise en place d'une « gouvernance exceptionnelle ». Le choix et le suivi de la mise en oeuvre des investissements seront confiés à un Commissaire général à l'investissement, chargé de coordonner les travaux interministériels sous l'autorité du Premier ministre. Par ailleurs, des conventions liant l'Etat à chacun des organismes définiront le cadre d'emploi des fonds, les indicateurs de mesure des résultats obtenus et les modalités d'instruction des dossiers qui garantiront à l'Etat un droit de décision en dernier ressort. Un comité de surveillance des investissements sera enfin créé, placé sous la co-présidence de MM. Alain Juppé et Michel Rocard, et sera chargé du suivi et de l'évaluation a posteriori des projets d'investissement.

Par ailleurs, le ministre a insisté sur le fait que la charge d'intérêt de l'emprunt national, estimée à 500 millions d'euros en 2010, sera compensée par une réduction supplémentaire des dépenses. L'impact de l'emprunt sur le déficit public devrait se limiter à 2 ou 2,5 milliards d'euros en 2010, soit 0,1 % du produit intérieur brut (PIB), en raison de la part majoritaire qu'occupent les dépenses « non maastrichtiennes » et de l'étalement sur plusieurs années du décaissement des subventions.

est revenu ensuite sur le second volet du projet de loi de finances rectificative, intéressant la réactualisation à la hausse des prévisions de recettes. Les ressources non fiscales devraient progresser d'un milliard d'euros sous l'effet de l'encaissement d'une recette exceptionnelle, consécutive à un jugement du tribunal de première instance des Communautés européennes sur le régime fiscal dérogatoire de France Télécom. Par ailleurs, les ressources fiscales devraient connaître une augmentation de 2,1 milliards d'euros. Si la décision du Conseil constitutionnel sur la contribution carbone et le régime des bénéfices non commerciaux entraîne une perte de recettes de 2,2 milliards d'euros, la révision à la hausse de la prévision de croissance pour 2010 (1,4 % contre 0,75 %) et les meilleures rentrées fiscales constatées fin 2009 devraient au contraire améliorer le solde de 3,6 milliards d'euros. Au surplus, le collectif budgétaire prend en compte les recettes attendues de la régularisation de la situation des évadés fiscaux, soit 700 millions d'euros.

Après avoir brièvement évoqué la mesure d'allègement de cotisations sociales sur l'emploi des travailleurs occasionnels dans le secteur agricole, dont le coût de 168 millions d'euros sera intégralement financé par des annulations de crédits, le ministre a conclu en annonçant un déficit budgétaire de 149,2 milliards d'euros en 2010, contre 117,4 milliards d'euros prévus en loi de finances initiale.

En revanche, le déficit public sera revu à 8,2 % du PIB contre 8,5 % prévus initialement et l'endettement public s'établira à 83,2 % du PIB au lieu des 84 % anticipés. Cette diminution, a priori paradoxale, s'explique par la révision à la hausse du montant du PIB suite à l'amélioration des prévisions de croissance, par la baisse de 0,4 % du montant de la dette publique liée à la baisse des déficits publics en 2009 et en 2010 (0,6 point de PIB) et, en sens inverse, à l'impact du financement des investissements d'avenir sur la dette publique (0,2 point de PIB).

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