...la majorité se met en grève sur l'ordre de la minorité. Tous, vous êtes favorables au droit de grève à condition qu'il ne puisse être exercé. Telle est votre conception du droit de grève, comme vous avez aussi une certaine conception des droits en général : droit au logement mais sans les moyens de le satisfaire, etc. Nous le savons et nous en avons pris acte. Vous permettrez donc à l'opposition de dire que telle n'est pas sa conception.
Mesdames, messieurs les sénateurs de l'UMP et du groupe de l'Union centriste, vous avez tous manifesté votre autosatisfaction d'avoir fait voter le projet présidentiel en l'aggravant dans le sens de la restriction du droit de grève. Ce faisant, vous avez réussi, au cours de ce débat au Sénat, à enlever toute crédibilité au discours sur le dialogue social tenu par le président de la République lors de la campagne électorale. Ce discours est d'ailleurs absolument identique au propos exprimé par Mme Parisot dans la préface du petit livre du MEDEF intitulé Besoin d'air : « L'organisation des relations dans l'entreprise relève des partenaires sociaux ».
Votre conception du dialogue social, c'est le dialogue social entre des partenaires sociaux qui sont d'accord ! Si les organisations syndicales sont d'accord avec le patronat, vous dites « oui » au dialogue social, si elles ne sont pas d'accord, vous dites « non » ! Voilà ce qu'il en est de votre conception du dialogue social.
Ce ballon d'essai estival nous laisse préjuger ce qui va se passer plus tard, c'est-à-dire à la rentrée. Après le « paquet fiscal », il y aura le « paquet social » concernant justement l'organisation des relations sociales et le droit du travail. Vous aurez à coeur de généraliser les dispositions concernant le droit de grève à l'ensemble des services publics - vous avez vendu la mèche, si je puis dire - et, plus largement, à l'ensemble des entreprises.
S'agissant des services publics, vous avez été un peu plus loin puisque l'un de vos collègues a affirmé ceci : « Ce qu'il faut avec les services publics, c'est les privatiser ; ainsi nous aurons la garantie qu'il y aura un service maximum. »
Je vous invite donc à aller revoir, le magnifique film de Ken Loach, qui présente les conséquences de la privatisation des transports périurbains britanniques : retards, accidents, dangers, bref, cela ne fonctionne pas bien du tout.
Nous attendons par conséquent la suite, et il est de notre devoir d'opposition non consensuelle - nous ne sommes pas l'opposition de Sa Majesté - de dire aux organisations syndicales, aux salariés, aux citoyens qui sont des usagers, qu'ils vont avoir affaire à la rentrée à une énorme remise en cause de leurs droits sociaux, du code du travail, du droit de grève et, bien sûr, à une absence totale de véritable dialogue social dans les entreprises.