Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons vise à approuver le renouvellement de l'accord conclu en 2003 entre la France et la Communauté du Pacifique, accord qui confirme le siège de cette organisation régionale à Nouméa.
Sous l'apparence anodine d'une formalité purement technique, se cache en réalité un enjeu politique important que je souhaite vous exposer rapidement.
La Communauté du Pacifique-Secrétariat, CPS, initialement appelée Commission du Pacifique Sud, a été créée en 1947 par les États qui administraient les territoires du Pacifique, à savoir l'Australie, les États-unis, la France, la Nouvelle-Zélande, les Pays-Bas et le Royaume-Uni.
Aujourd'hui, les vingt-deux États et territoires insulaires du Pacifique, qu'ils soient indépendants ou non, sont tous membres de la CPS, de même que les quatre puissances fondatrices restantes, les Pays-Bas et le Royaume-Uni s'en étant retirés respectivement en 1962 et en 2005. Elle est donc la seule organisation majeure de la région dont sont membres à la fois la France et ses trois territoires du Pacifique que sont la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Wallis-et-Futuna.
La CPS, qui ne travaille qu'en français et en anglais, est un organisme dont les modalités de fonctionnement ont été modernisées et précisées en 1999 lors de la « déclaration de Tahiti Nui », tout comme ses grands principes, sa mission, ses objectifs et ses axes stratégiques, dans l'accomplissement de son mandat qui est celui d'une institution ayant un rôle de conseiller technique, de formation et de recherche.
Sa vocation d'aide au développement en fait donc une organisation très différente de l'autre grande instance régionale qu'est le Forum du Pacifique. Fondé en 1971, le Forum, influencé par l'Australie, visait à réduire le rôle des anciennes puissances coloniales dans la zone pacifique. Les critiques qu'il a formulées envers la France ont atteint leur apogée en 1995, lors de la reprise des essais nucléaires français.
Pour autant, la conclusion des accords de Nouméa en 1998, ainsi que l'appui financier soutenu de la France à la CPS, ont stabilisé la place de la France dans la région. Cette amélioration s'est clairement manifestée lors du Sommet France-Océanie tenu le 28 juillet 2003, lors du déplacement du Président de la République en Polynésie Française, et a sans aucun doute été réaffirmée le 26 juin, à Paris.
Plus qu'une reconnaissance, la place de la France et de ses collectivités dans le Pacifique est aujourd'hui fortement sollicitée. Les derniers voyages du ministre de l'outre-mer, M. François Baroin, l'ont bien démontré. L'ouverture du Forum aux trois collectivités pour y être membres associés ou observateurs en est une autre preuve et c'est le processus de leur intégration dans la région qui est ainsi renforcé. Il faut s'en féliciter.
Madame la ministre, vous êtes parmi les mieux placés pour comprendre la nécessité de cette intégration régionale de nos trois collectivités du Pacifique, mais le Gouvernement et les responsables locaux devront s'engager en concertation, avec intensité et vigilance, pour que cette intégration se passe dans de bonnes conditions.
Ils devront, en premier lieu, rester attentifs à l'évolution du projet de Plan Pacifique lancé par le Forum, avec le danger que ce plan fait peser sur l'existence autonome de la CPS, et, en second lieu, s'appuyer sur l'accord de partenariat économique Pacifique actuellement négocié entre les pays ACP - Afrique, Caraïbes, Pacifique - de la région, qui forment tous le Forum, et l'Union européenne. La Commission européenne tend en effet à renforcer ses relations et ses actions de soutien au Forum tandis qu'elle se montre réticente à l'égard de la CPS.
Pour ces raisons, mais aussi parce que c'est le souhait des pays de la région, il est essentiel que la France soit représentée à un niveau élevé, si possible ministériel, dans les rendez-vous importants de la Communauté du Pacifique et du Forum, ce qui n'a pas toujours été le cas ces dernières années.
Quoi qu'il en soit, et compte tenu de ce rappel à la vigilance que je tenais à exprimer, cet accord de siège doit être compris comme l'expression d'une pleine reconnaissance de la place de la France et de ses trois territoires au sein de la région Pacifique. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous recommande donc de l'adopter.