a tout d'abord exposé la philosophie de l'accord national interprofessionnel (ANI) du 5 décembre 2003, pris en compte par la loi du 4 mai 2004, étendu à la fin de l'année 2004 et décliné en 2004 et 2005 par 450 accords traitant de la formation professionnelle dans 250 branches professionnelles et au niveau interprofessionnel.
L'ANI de décembre 2003 a entrepris de permettre à chaque salarié d'être acteur de son évolution professionnelle grâce aux entretiens professionnels, aux bilans de compétences, à la validation des acquis de l'expérience (VAE). Un projet professionnel peut être aussi élaboré, a-t-il précisé, à l'aide du passeport formation, en tenant compte des travaux des observatoires prospectifs des métiers et des qualifications.
L'ANI a, par ailleurs, entendu favoriser l'acquisition d'une qualification tout au long de la vie professionnelle dans le cadre du contrat de professionnalisation et de la période de professionnalisation.
Il a enfin visé l'amélioration de l'accès des salariés à des actions de formation dans le cadre du plan de formation, du droit individuel à la formation (Dif) et du congé individuel de formation (Cif). M. Francis Da Costa a précisé à cet égard que, les premiers niveaux de qualification n'étant pas spontanément demandeurs de formation, un dispositif uniquement axé sur l'initiative individuelle ne saurait réduire les inégalités d'accès à la formation.
Il a poursuivi en indiquant que l'ANI de décembre 2003 consacre le passage d'une logique de stage à une logique de parcours de formation personnalisé.
Les huit organisations d'employeurs et de salariés représentatives au plan national et au plan interprofessionnel ont confié au comité paritaire national pour la formation professionnelle (CPNFP) la « maintenance » des accords interprofessionnels sur la formation, le soin d'en préciser les modalités d'application et celui d'assurer la liaison avec les pouvoirs publics. Les commissions paritaires nationales pour l'emploi (CPNE) au niveau des branches professionnelles et les commissions paritaires interprofessionnelles régionales de l'emploi (Copire) au niveau régional, exercent de leur côté des compétences définies.
Par ailleurs, les quatre-vingt-dix-huit organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) ont un rôle essentiel à jouer dans la collecte des contributions des entreprises et le financement des actions en faveur des salariés et des autres publics prioritaires, en fonction des décisions et des orientations des organisations signataires des accords qui les ont créés. En effet, les OPCA sont des outils de mise en oeuvre des politiques de formation décidées par les branches professionnelles et au niveau interprofessionnel.
Par ailleurs, le fonds unique de péréquation (Fup) met en oeuvre les décisions prises par le CPNFP et assure la péréquation entre les différents OPCA en matière de professionnalisation.
Après avoir estimé que ce dispositif permettait une véritable gouvernance paritaire de la formation professionnelle, ainsi que des échanges entre l'ensemble des parties prenantes dans le cadre du conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie, M. Francis Da Costa a estimé que la mise en oeuvre de l'ANI du 5 décembre 2003 et de la loi du 4 mai 2004 avait connu une montée en puissance régulière et qu'il était prématuré, et même déplacé, de proposer une nouvelle réforme du dispositif de formation professionnelle sans disposer d'une première évaluation objective de la réforme précédente.
A cet égard, les partenaires sociaux ont décidé, au début de 2007, dans le cadre du CPNFP d'avancer d'un an l'exercice d'évaluation prévue par l'ANI.
Certains éléments chiffrés sont d'ores et déjà disponibles :
- 143 000 contrats de professionnalisation ont été enregistrés en 2006, ce qui représente une progression de 50 % par rapport à 2005. Simultanément, le nombre d'apprentis en formation a augmenté de 10 %, passant ainsi à 405 000 ;
- 374 000 périodes de professionnalisation ont été conclues, ce qui représente une progression de 55 % ;
- 41 000 Cif ont été conclus en 2006, ce qui représente une montée en puissance significative ;
- 130 000 salariés ont mobilisé leur Dif en 2005. Le dispositif devrait progresser de manière importante en 2006 et plus encore en 2007, année au cours de laquelle les salariés auront capitalisé soixante heures de Dif, soit plus de huit jours de formation ;
- la VAE devrait concerner 60 000 bénéficiaires en 2007, contre 20 000 il y a deux ans.
a rappelé ensuite que le dispositif de financement de la formation professionnelle avait été sensiblement rationalisé depuis le début des années quatre-vingt-dix avec la réduction draconienne du nombre des organismes agréés. L'ensemble de ceux-ci gère actuellement 5,1 milliards d'euros et assure un service aux entreprises de toute taille, notamment en réalisant les formalités administratives et financières de la formation pour leur compte.
Ces évolutions traduisent une mise en oeuvre de l'ANI d'autant plus efficace qu'il a été nécessaire d'attendre l'extension des accords de branches négociés en 2004 et en 2005 pour permettre à des dispositifs tels que la professionnalisation ou le Dif de se déployer.
Par ailleurs, les partenaires sociaux ont décidé de relever les contributions des entreprises, ce qui a provoqué des excédents de trésorerie temporaire dans la plupart des OPCA. Ces excédents ont été versés au Fup, qui a décidé d'encadrer les possibilités de péréquation intéressant le contrat de professionnalisation afin de respecter la spécificité de ce nouveau dispositif. La montée en puissance de la professionnalisation et du Dif devrait supprimer les versements au Fup dès 2007, et au plus tard en 2008. Dans l'intervalle, les fonds disponibles au Fup ont fait l'objet d'un accord entre l'Etat et le CPNFP sur des priorités telles que la VAE, les bilans de compétences, l'illettrisme, le contrat de professionnalisation en faveur des demandeurs d'emploi, les périodes de professionnalisation en faveur des seniors, la préparation aux contrats en alternance par l'association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa). A côté de cela, le Fup a été ponctionné par la loi de finances pour 2007 à hauteur de 175 millions d'euros en faveur de l'Afpa, en dépit des vives réserves des partenaires sociaux.
a ensuite rappelé la répartition entre les différentes catégories de financeurs des 24 milliards d'euros qui irriguent l'ensemble de la formation professionnelle, et l'extension progressive depuis 1983 des compétences des conseils régionaux. Il a noté que ces compétences s'inscrivent dans le cadre du plan régional de développement des formations professionnelles (PRDF), dont l'objectif est de définir des orientations à moyen terme en matière de formation professionnelle des jeunes et des adultes, et à l'élaboration duquel les organisations interprofessionnelles et professionnelles doivent être étroitement associées. Il a aussi noté que le principal champ de coopération des organisations professionnelles et interprofessionnelles avec les conseils régionaux est l'apprentissage, la taxe d'apprentissage représentant la moitié du coût de cette formation, compte non tenu des salaires des apprentis et des allégements de charges consentis par l'Etat. Cette coopération est contrastée selon les régions, certaines d'entre elles n'ayant pas suffisamment pris en compte les besoins des entreprises, les possibilités d'insertion professionnelle ou le rôle des centres de formation d'apprentis de branches (CFA) ou interprofessionnels.
a déploré à cet égard la croissance régulière de la taxation pesant sur les entreprises et la diminution corrélative de la libre affectation des fonds collectés. Il a conclu sur ce point en indiquant qu'il ne serait pas admissible que la collecte de la taxe d'apprentissage ne soit pas gérée par les organisations professionnelles ou interprofessionnelles.
Il a enfin présenté un certain nombre de prises de position sur plusieurs points évoqués au cours des précédentes auditions de la commission :
- en matière d'orientation, une suite doit être donnée au rapport récent de M. Pierre Lunel afin de limiter les sorties du système scolaire sans diplôme ni qualification ou la sortie de l'université sans diplôme ou avec un diplôme ne permettant pas une insertion professionnelle ;
- l'articulation entre la formation initiale et la formation continue devient une réalité dans le cadre de la formation tout au long de la vie professionnelle, comme le montre la mise en place du passeport formation, l'entretien biennal, le développement de la VAE, le fait que les contrats en alternance assurent une excellente transition entre la formation initiale et la formation continue. Dans le cadre de ce mouvement, les organismes de formation doivent s'adapter à la nouvelle donne que constituent l'individualisation et la personnalisation ;
- les partenaires sociaux ont tenu à distinguer nettement le contrat d'apprentissage, voie de formation initiale à part entière permettant de préparer un diplôme ou un titre, et le contrat de professionnalisation, dont le format est plus ramassé et qui s'adresse aux jeunes sans qualification professionnelle ou souhaitant compléter leur formation initiale ainsi qu'aux demandeurs d'emplois dont la professionnalisation est nécessaire ;
- en ce qui concerne le passage du contrat de qualification au contrat de professionnalisation, il convient de noter que de nombreux contrats de qualification, qui permettaient la poursuite d'études, devraient dorénavant donner lieu à la conclusion de contrats d'apprentissage, que l'approche restrictive de certaines branches concernant la possibilité de poursuivre à travers un contrat de professionnalisation des certifications n'étant pas au coeur du métier de la branche a été élargie à l'initiative des CPNE, et que le CPNFP a mis en place en septembre 2005 une procédure d'examen de 410 « contrats orphelins » qui a permis de demander, si nécessaire, aux OPCA de reconsidérer leurs décisions ;
- l'ANI de décembre 2003 est fondé à la fois sur le rôle des branches professionnelles et sur la dimension territoriale, celle-ci étant assurée par les commissions paritaires interprofessionnelles régionales (Copire) ainsi que par le service de proximité fourni par les branches, par les OPCA de branches et les deux réseaux interprofessionnels de collecte ;
- ces deux réseaux interprofessionnels ont chacun leurs spécificités et sont coordonnés par une instance paritaire nationale de coordination (IPNC). Le Medef et la confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) ne sont pas favorables à leur fusion ;
- le Medef n'est pas favorable à un système de prélèvement national des contributions des entreprises à la formation, car le lien entre l'entreprise et son OPCA doit être maintenu ;
- il est peut-être possible de réduire encore le nombre des OPCA en relevant le seuil minimal de collecte, actuellement fixé à 15 millions d'euros, à condition de tenir compte de la complémentarité et de la cohérence des politiques de branches menées au sein des OPCA. Par ailleurs, les comptes des OPCA sont visés par un commissaire aux comptes et placés sous le contrôle de la délégation générale à l'emploi et à la formation permanente (DGEFP) et de la Cour des comptes ;
- les conseils régionaux, se considérant de plus en plus comme chefs de file en matière de formation, sont tentés de mettre en place leur propre dispositif. Cependant, la formation sous contrat de travail relève des entreprises et la contractualisation avec un conseil régional ne peut avoir lieu que dans le cadre défini par les stipulations conventionnelles ou les dispositions législatives ou réglementaires en vigueur, notamment les contrats d'objectifs et de moyens et les contrats d'objectifs territoriaux. Toute initiative relative à la sécurisation des parcours professionnels doit être appréhendée dans un cadre national. Le Medef n'est donc pas favorable à l'institutionnalisation de conférences de financeurs ;
- il est prématuré de modifier le Dif dont la transférabilité, prévue selon des modalités variées dans un tiers des accords de branches et par différents accords d'entreprises, avait été écartée par la partie patronale lors de la négociation de l'ANI de 2003 afin de ne pas financiariser ce droit et dans la mesure où une transférabilité généralisée nécessiterait le provisionnement du Dif, et grevant ainsi les comptes des entreprises.
En conclusion, M. Francis Da Costa a estimé que les stipulations de l'ANI du 5 décembre 2003 portant sur la formation qualifiante différée méritent une grande attention et précisé que l'ouverture d'une concertation avec les pouvoirs publics sur un abondement financier de ce dispositif est mentionnée dans l'accord.
Il a confirmé que les réflexions en cours sur la sécurisation des parcours professionnels dans le cadre de la délibération sociale lancée par le Medef ou au sein du conseil national pour la formation professionnelle tout au long de la vie pourront avoir une incidence sur la formation professionnelle.
Il a estimé que l'ensemble des OPCA doit fournir un service de proximité selon les modalités les plus appropriées.
Il a souhaité une évaluation attentive des passerelles établies entre le régime d'assurance chômage et la formation professionnelle, et de celles réalisées dans le cadre de l'accord CPNFP-Unedic-ANPE sur le contrat de professionnalisation en faveur des demandeurs d'emplois.