Intervention de Pascal Clément

Réunion du 16 mai 2006 à 10h30
Réforme des successions et des libéralités — Discussion d'un projet de loi

Pascal Clément, garde des sceaux, ministre de la justice :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, vous examinez aujourd'hui le projet de loi portant réforme du droit des successions et des libéralités tel qu'il a été adopté par l'Assemblée nationale le 22 février dernier.

Il s'agit, nul ne l'ignore ici, d'un texte essentiel.

Le droit de la famille connaît, depuis maintenant plus de trois années, une profonde et nécessaire mutation. Après la réforme du droit du divorce, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2005, et celle de la filiation, qui s'appliquera à partir du 1er juillet prochain, le Gouvernement entend, par ce projet de loi, moderniser en profondeur le droit des successions et des libéralités.

Par la force des choses, le droit des successions intéresse tous nos concitoyens. Ce droit a pourtant été peu modifié depuis 1804 et souffre aujourd'hui d'une certaine rigidité, qui n'est plus comprise et que les praticiens ont beaucoup de mal à justifier. Ce droit, pour une grande part obsolète, se révèle ainsi incapable de répondre aux attentes des familles. Je pense autant aux familles qui s'entendent, et qui souhaitent pouvoir organiser en bonne intelligence la transmission du patrimoine, qu'aux familles qui ne s'entendent plus et qui souhaitent surmonter aussi rapidement que possible leurs désaccords.

D'importantes modifications du droit des successions ont déjà été apportées par la loi du 3 décembre 2001 relative aux droits du conjoint survivant. Cette loi avait d'ailleurs été l'occasion pour votre assemblée de marquer l'intérêt tout particulier qu'elle porte à cette question. Vous aviez, à l'époque, mesdames, messieurs les sénateurs, considérablement amélioré le texte de la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale.

Plus important encore, vous aviez formulé le souhait, particulièrement raisonné, de mettre à profit l'examen de cette proposition de loi en procédant à une refonte générale du droit des successions.

Encore aujourd'hui, l'intérêt et la volonté de réformer en profondeur ce droit sont présents. J'en veux pour preuve la grande qualité des travaux menés par la commission des lois du Sénat et l'initiative de son président, Jean-Jacques Hyest, qui a déposé récemment, avec M. Nicolas About, une nouvelle proposition de loi en la matière.

Le texte qui vous est soumis réalise l'objectif tant attendu d'adapter le droit des successions et des libéralités à certaines évolutions importantes de notre société contemporaine.

Ces évolutions sont d'ordre démographique et sociologique. Tout d'abord, avec le vieillissement de la population, on hérite de plus en plus tard. Ensuite, avec les familles recomposées, la configuration des successions devient de plus en plus complexe.

Ces mutations sont également de nature économique : chaque année, près de 10 000 entreprises disparaissent en raison du décès de l'entrepreneur et, dans les dix ans à venir, 450 000 entreprises devront être transmises.

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