Intervention de Philippe Duneton

Mission commune d'information sur le Mediator — Réunion du 5 avril 2011 : 1ère réunion
Audition de M. Philippe duNeton ancien directeur général de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé afssaps 1999-2004

Philippe Duneton :

Je n'ai pas fait la bibliographie de l'utilisation du terme d'adjuvant. Je dis qu'il s'entend comme complémentaire à des actions diététiques qui ne semblent pas anormales dans le cadre du diabète. Dans les diabètes gras, un régime nutritionnel est largement conseillé. J'entends vos propos. A la lecture du rapport de l'Igas, il apparaît un certain nombre d'étapes et d'évènements sur ce produit. De manière objective, des travaux ont été effectués sur le plan de l'efficacité. Il existe un retard évident dans la mise en place d'études demandées au laboratoire par l'Europe et par l'agence française sur la mesure de la tolérance et des risques du médicament. Ces études ont été réalisées très tardivement. Une évolution de la réglementation européenne va dans ce sens, mais elle n'est peut-être pas suffisante. Des plans de gestion du risque sont dorénavant compris dans l'évaluation du médicament. Toute demande en matière de sécurité d'un médicament devrait systématiquement être validée, dans le cas national, par la commission de pharmacovigilance et par le directeur général, et dans le cas européen, par le Committee for médicinal products for human use (CHMP) avec des délais conduisant à une décision automatique de suspension en cas de dépassement des délais d'une étude de tolérance. Des pénalités sont prévues si le laboratoire ne fournit pas ses preuves. Il faut aller plus loin. Le rapport de l'Igas montre qu'il y a eu des retards, à l'évidence pas explicables, à des études qui auraient permis de mettre en évidence ce risque de manière plus précoce.

La pharmacovigilance a un problème évident de sous-déclaration. Des efforts doivent être faits. La notification spontanée doit être complétée par des études. Cela pose la question de la responsabilité des laboratoires dans la réalisation des études. Les pouvoirs publics doivent avoir davantage de moyens pour mener des études de sécurité. Aucun laboratoire ne réalisera des études transversales. A la rigueur, un laboratoire pourra y être contraint pour un produit particulier. Lorsque les risques concernent plusieurs classes de médicaments ou, encore pire, plusieurs classes de produits, aucun laboratoire n'est capable de développer ce type d'étude.

Cette évidence n'est pas forcément connue. Il existe un problème de financement pour créer un cercle vertueux de l'expertise. Ce problème a plusieurs fois été souligné. Les experts sont financés par l'industrie. Il apparaît tout à fait légitime que les pouvoirs publics se dotent des moyens pour conduire des investigations. La toxicologie est une profession sinistrée. Il y a très peu de toxicologues aujourd'hui. Dans le domaine public, il n'y en a pratiquement plus.

Je comprends parfaitement l'émotion qui s'attache au Mediator. Il est possible de débattre des structures. Il faut aussi voir les fonctions. Je peux comprendre que nous ayons un débat institutionnel, mais je pense qu'il est beaucoup plus important d'avoir un débat fonctionnel. Les problèmes de notification, d'évaluation et de mise en oeuvre d'études sont essentiels. Sachons tirer un certain nombre de leçons de ce drame. Tel est l'enjeu.

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