a commencé en rappelant que l'informatique représentait une part importante des dépenses des entreprises et que leurs dépenses en ce domaine se partageaient à parts égales entre les services, d'une part, et l'achat de logiciels standards et de machines, d'autre part. Il a situé l'activité de Capgemini dans la branche « services », précisant que cette activité recouvrait aussi le conseil en informatique, l'infogérance et le conseil en organisation et en stratégie, ce qui apparentait Capgemini à Accenture.
Il a souhaité préciser deux points au sujet du marché dans lequel évoluait Capgemini :
- d'une part, le conseil en informatique est une activité concentrée dans les pays développés : en effet, les Etats-Unis représentent 40 % du marché mondial, l'Europe des douze 30 % et le Japon 12 %, la Chine ne constituant que 0,5 % du marché mondial, ce qui, même avec un taux de croissance annuel de 25 %, reste encore très marginal ;
- d'autre part, les acteurs dominants du marché sont essentiellement américains : au premier rang, se trouve la filiale « services » d'IBM ; au second rang, un autre américain, EDS, société texane issue de General Motors depuis 1996 ; au troisième rang, Computer Sciences ; au quatrième, Accenture ; Capgemini occupe le cinquième rang, suivi du japonais Fujitsu, les quatre suivants étant américains. Sur le marché européen, les Français s'en sortent bien, même s'ils ne se lancent pas hors d'Europe, ce qui les distingue de Capgemini, qui est à la première place en Europe. A la deuxième place, on trouve Atos Origin, suivi d'un allemand, puis du français Steria et enfin de l'anglais Logica, qui a récemment absorbé Unilog.
a ensuite présenté son groupe, qui emploie près de 20.000 personnes en France et exerce trois types d'activités :
- l'infogérance, qui consiste en un transfert de tout le système informatique du client vers Capgemini. Le groupe a notamment signé un grand contrat d'infogérance avec Her Majesty's Revenue & Customs en Grande-Bretagne : pour un montant de 800 millions d'euros par an, Capgemini gère les déclarations en ligne, les émissions de rôles et de titres de recouvrement des services fiscaux britanniques. A ce sujet, M. Paul Hermelin a évoqué, pour nourrir la réflexion des sénateurs, le système britannique « Tupe », qui permet à Capgemini d'employer et de gérer comme tels des fonctionnaires britanniques affectés à ces tâches, système d'ailleurs proche de celui existant en droit privé du travail en France, puisque l'article L. 122-12 du code du travail prévoit que lorsqu'une société est cédée, ses salariés gardent leurs avantages et ces avantages s'imposent à leur nouvel employeur ;
- les activités de projets informatiques comme, par exemple, la refonte de l'informatique de gestion de l'Assistance publique ou l'offre de conseil faite à Alcatel et Lucent pour recalibrer leurs activités de services ;
- enfin, sous la marque « Sogeti », marque initiale du groupe, une activité de services de proximité aux entreprises, privilégiant les prestations sur mesure.
a indiqué que le marché sur lequel évoluait Capgemini avait été peu porteur de 2000 à 2004, car les clients des sociétés de services informatiques, par crainte du bug de l'an 2000, avaient remplacé machines, réseaux, serveurs et applicatifs. Présentant l'investissement informatique comme la dérivée de l'économie, il a expliqué que l'activité de services proposée par Capgemini se comportait, quant à elle, comme une dérivée seconde de l'économie dont elle suit les accélérations et les freinages.
Il a ensuite déclaré qu'après cinq ans de diète, le marché donnait des signes de reprise. Il a relevé que l'effectif du groupe Capgemini était de 60.000 avant comme après la crise, soulignant toutefois que cette stabilité apparente dissimulait une considérable recomposition des ressources humaines de l'entreprise, puisque, sur la période, il y avait eu 20.000 licenciements, 20.000 départs liés au « turn over » et, depuis 2005, 20.000 embauches ou intégration, suite à des opérations de croissance externe du groupe. Par ailleurs, si la croissance est là, les salaires, eux, contrairement à ce qui se passait habituellement dans ce type de conjoncture, ne repartent pas à la hausse en raison de l'apparition de l'Inde sur le marché des services informatiques.
Abordant alors la question indienne devant les membres de la future mission parlementaire qui se rendra en Inde début septembre 2006, M. Paul Hermelin, directeur général du groupe Capgemini, a déclaré qu'il avait cru très tôt à ce pays, dont il cherche à utiliser le potentiel. Si le groupe Capgemini, au moment de l'acquisition d'Ernst & Young Consulting en 2000, employait 140 personnes en Inde, il en emploie aujourd'hui 5.000, et y recrute actuellement 300 salariés par mois.
Rappelant que l'Inde avait fait, dès la fin des années 70, un choix résolu d'investissement informatique, il a fait observer qu'aujourd'hui l'industrie du service informatique indien représentait 5 % du PIB et 20 % des exportations, employait un million de personnes et faisait vivre plusieurs îlots de prospérité, comme Bangalore, dont le développement se mesure aux embouteillages de voitures et de motos, Bombay, dont les salles blanches d'informaticiens méritent d'être visitées, et Calcutta.
L'économie indienne a connu une croissance de 8 % en 2005 et, sur le marché du service informatique, s'appuie sur trois grandes sociétés indiennes : Data Consulting, qui emploie autant de personnes que le groupe Capgemini mais pour un chiffre d'affaires trois fois plus faible, Infosys et Wipro, chacune d'elles employant près de 50.000 personnes. Avec ses 5.000 employés en Inde, Capgemini se situe donc loin derrière ces grandes sociétés indiennes, même s'il s'agit du premier groupe européen sur place et que sa croissance a atteint 75 % en 2005 ; il se trouve d'ailleurs devancé par plusieurs groupes américains. M. Paul Hermelin, directeur général du groupe Capgemini, a considéré que Capgemini devait atteindre rapidement un effectif de 20 à 25.000 personnes en Inde.
Il a exprimé avoir le sentiment que les promotions du personnel de Capgemini en Inde n'étaient pas indépendantes de l'appartenance à une caste, confirmant que l'Inde était à la fois très technologique et très traditionnelle. Il lui a été notamment indiqué que, dans certaines entreprises, les membres de la caste des « Intouchables » pouvaient être payés en espèces sans figurer sur la liste des employés. Il a relevé la très grande motivation des employés indiens, en grande partie imputable à leur jeunesse, et s'est dit dynamisé à leur contact. L'énergie des Indiens les conduit à vouloir faire des projets difficiles et innovants plutôt qu'à être des sous-traitants de production bas de gamme.
Evoquant l'organisation géographique du groupe Capgemini, il a distingué entre la délocalisation de proximité -« nearshore »- qui avait conduit à l'implantation de plateformes en Europe de l'est, notamment en Pologne, et la délocalisation nationale -« rightshore »- avec des implantations à Toulouse, Nantes et Clermont-Ferrand. M. Paul Hermelin, directeur général du groupe Capgemini, a estimé que la France devrait promouvoir l'équivalent de Bangalore au Maghreb, ce qui exigerait de déployer un effort de formation sur place. Le Maroc ayant manifesté un intérêt pour ce projet, c'est à Casablanca que Capgemini va ouvrir, sous la houlette d'un Indien d'ailleurs, une implantation susceptible de développer l'emploi informatique au Maroc, ce dont M. Paul Hermelin s'est félicité. Il a jugé que ces divers modes de délocalisation permettaient de faire baisser les prix, mais ne signifiaient pas pour autant une réduction de l'emploi en France, plutôt une modification des emplois destinés à y rester : l'écriture du code informatique partira à Toulouse, Casablanca ou plus loin, tandis que l'intelligence du code et le déploiement du projet resteront l'apanage des employés français.