En ces temps d'inflation législative et d'oubli fréquent du rôle normatif du législateur au profit de textes un peu bavards et conjoncturels, ce projet de loi, empreint de pragmatisme, fait presque figure d'exception. Il nous permet de remettre à jour et d'adapter à une réalité de fond, à savoir l'évolution des structures familiales et l'allongement de la durée de la vie, des mesures datant, pour l'essentiel, de plus de deux cents ans.
C'est dire que ce texte est aujourd'hui très attendu, notamment par les professionnels.
Simplifier, moderniser, dynamiser les successions et la gestion des patrimoines tout en en préservant l'efficacité économique, tels sont quelques-uns des principaux objectifs que je souhaite retenir d'un texte qui va dans le bon sens. Ces objectifs permettent en effet de répondre aux réalités de plus en plus complexes auxquelles doivent faire face les acteurs des successions que sont les héritiers, les notaires, les administrateurs ou autres intervenants.
Alors que le règlement des successions connaît aujourd'hui des blocages fréquents - du fait, par exemple, de la complexité des règles de décision au sein d'une indivision -, les difficultés nouvelles qui sont liées à l'allongement de la durée de la vie, qui conduit logiquement de plus en plus souvent à vouloir transmettre son patrimoine aux petits-enfants plutôt qu'aux enfants, nous obligent également à réformer en profondeur les règles applicables aux libéralités.
Les mesures visant à mieux disposer de son patrimoine et à élargir les droits à gérer sa succession plus librement vont donc aussi dans le bon sens. À cet égard, plusieurs dispositions méritent d'être soulignées : le pacte successoral, les précisions apportées aux actes conservatoires ou encore les innovations apportées par le mandat à titre posthume, qu'il conviendra toutefois de bien encadrer.
Cependant, une mesure nouvelle appelle de ma part les plus grandes réserves. Il s'agit de celle qui prévoit de mentionner la déclaration de PACS en marge de l'acte de naissance des intéressés.
Je suis conscient que la surcharge de travail qu'entraînent pour les greffes des tribunaux civils les centaines de milliers de certificats de non-PACS qui leur sont demandés chaque année pose un véritable problème pour le fonctionnement des juridictions et qu'il est tentant de transférer cette charge aux mairies. Mais outre le fait que cela ne me paraît pas être la bonne réponse au problème du sous-effectif des greffes des tribunaux judiciaires, il y a surtout un énorme risque qu'après cette première mesure on en arrive progressivement à déclarer le PACS directement en mairie. Soyez-en sûr, monsieur le garde des sceaux, une majorité de maires n'est pas prête à accepter cette disposition.
Au-delà de ces quelques remarques, je souhaiterais revenir sur un point particulier du texte : les problèmes liés aux déshérences et aux vacances successorales. Ce sont non pas les articles consacrés au devenir des successions vacantes ou en déshérence que je vise ici, mais les mesures prévues par l'article 23 sexies, qui a été introduit à l'Assemblée nationale sur proposition de la commission des lois.
Cet article vise à encadrer l'activité des généalogistes successoraux, dont le rôle peut se révéler particulièrement important lorsqu'une personne décède sans laisser d'héritier identifié ou lorsque le notaire chargé du règlement de la succession n'est pas certain - et c'est de plus en plus souvent le cas compte tenu de l'éclatement des familles - de connaître l'ensemble des ayants droit. Le rôle de ces professionnels est souvent mal connu, en particulier du fait de la faiblesse de leurs effectifs.
L'idée à l'origine de l'article 23 sexies, qui tend à remédier aux dérives qui ont pu être constatées, me paraît bonne. Sur un sujet aussi sensible que celui d'un partage après décès, il est des pratiques qui ne peuvent pas être admises. Cependant, le texte de cet article, tel qu'il ressort des travaux de l'Assemblée nationale, me semble beaucoup trop restrictif, ...