Intervention de Patrick Stefanini

Commission d'enquête sur l'immigration clandestine — Réunion du 22 février 2006 : 1ère réunion
Audition de M. Patrick Stefanini secrétaire général du comité interministériel de contrôle de l'immigration cici

Patrick Stefanini, secrétaire général du Comité interministériel de contrôle de l'immigration (CICI) :

a introduit son propos en rappelant la création récente du CICI, qui résulte d'un décret du 26 mai 2005. L'article premier de ce texte précise les missions du comité, chargé de fixer les orientations de la politique nationale en matière de contrôle des flux migratoires. Présidé par le Premier ministre ou, par délégation, par le ministre de l'intérieur -actuellement le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire- le CICI comprend, en dehors du Premier ministre, huit ministres, d'autres membres du gouvernement pouvant être appelés à participer à ses travaux.

a rappelé que le CICI, installé le 10 juin 2005, s'était réuni le 27 juillet 2005, sous la présidence du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, puis les 29 novembre 2005 et 9 février 2006, sous la présidence du Premier ministre.

Il a indiqué que le secrétariat général du CICI comprenait, outre le secrétaire général, nommé par décret en Conseil des ministres et chargé de préparer les travaux et délibérations du comité, cinq fonctionnaires de catégorie A' mis à disposition par les ministères concernés directement ou indirectement par le contrôle des flux migratoires, et qu'il était doté d'un petit budget.

Il a précisé que le secrétariat général n'avait pas autorité sur les différents services compétents en matière de contrôle de l'immigration, mais qu'il avait un rôle de coordination et d'impulsion et qu'il agissait en fonction des mandats qui lui étaient donnés par le CICI lors de ses réunions.

Il a ensuite exposé les actions menées par le CICI dans le cadre des six mandats qui lui ont été confiés.

Le premier de ces mandats porte sur la politique des visas et la coopération entre les consulats et les préfectures : il s'est traduit par diverses actions en cours de réalisation.

Rappelant que l'immigration irrégulière pouvait résulter soit de l'entrée sans visa soit du maintien sur le territoire au-delà de la limite de validité d'un visa, M. Patrick Stefanini, observant la remarquable stabilité du nombre des délivrances de visas de court ou long séjour, a indiqué qu'avait été mis au point un tableau de bord mensuel des visas délivrés par la France permettant de déceler d'éventuels « dérapages ».

Le comité a ensuite décidé, le 27 juillet 2005, d'étendre avant la fin de 2006 l'expérimentation du visa biométrique, engagée lors de sa création dans cinq consulats, à une trentaine de postes situés dans des pays sources d'immigration -et d'immigration irrégulière- forte.

En troisième lieu, une expérience a été lancée dans une dizaine de postes pour contrôler les retours en faisant obligation aux bénéficiaires de visas de se présenter au consulat.

En ce qui concerne la coopération entre les préfectures et les postes consulaires, M. Patrick Stefanini a fait état de la création entre les unes et les autres d'un réseau de transmission d'informations protégé qui pourra assurer à la fin de cette année la transmission aux préfectures des photographies et des empreintes digitales des détenteurs de visas.

Il a également évoqué l'organisation de stages de formation communs aux personnels des préfectures et des postes : un premier stage s'est déroulé en octobre-novembre 2005 sous l'égide du ministère de l'intérieur, un deuxième doit être organisé en 2006 par le ministère des affaires étrangères.

Enfin, pour améliorer la lutte contre la fraude documentaire, des agents spécialisés de la police aux frontières seront détachés dans les consulats : cinq consulats bénéficiaient à la fin de 2005 de tels détachements, qui seront étendus en 2006 à cinq autres postes.

Le deuxième mandat donné aux CICI porte sur le sujet - substantiel - de la réforme du dispositif d'accueil et d'hébergement des demandeurs d'asile, dont le nombre moyen annuel a été dans la période récente de l'ordre de 60.000.

Soulignant que le taux d'admission moyen était de 10 à 12 %, M. Patrick Stefanini a évoqué le problème de l'éloignement des déboutés du droit d'asile, dont le maintien sur le territoire constitue une modalité importante d'immigration irrégulière.

Observant que ce maintien avait été favorisé par la longueur des délais d'instruction des demandes d'asile, il a insisté sur les efforts entrepris pour réduire ces délais, qui sont aujourd'hui en moyenne de deux mois et demi pour l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et de cinq à six mois pour la commission des recours des réfugiés (CRR).

a noté qu'un effort analogue restait à engager au niveau des préfectures, le délai d'instruction des demandes d'admission au séjour étant très variable et pouvant atteindre deux à trois mois : l'objectif est de ramener ce délai à une durée n'excédant pas 15 jours, en métropole comme outre-mer.

L'équipement des préfectures en bornes EURODAC, qui permettent de vérifier qu'une demande d'asile n'a pas déjà été présentée dans un autre Etat signataire de la convention de Dublin, a également été entrepris.

Enfin, le principe a été arrêté d'une réduction d'un mois à 15 jours du délai de recours devant la CRR, ce qui correspond à un alignement sur les délais généralement pratiqués dans les autres pays.

En ce qui concerne l'accueil des demandeurs d'asile, un effort important a été entrepris pour renforcer le dispositif des centres d'accueil des demandeurs d'asile (CADA) : 2.000 places supplémentaires seront créées en 2006. Parallèlement, le pilotage des CADA a été confié aux préfets de région.

a également évoqué :

- le remplacement, prévu par la loi de finances pour 2006, de l'allocation d'insertion versée aux demandeurs d'asile par une nouvelle allocation temporaire d'attente, qui ne sera servie ni aux demandeurs accueillis en CADA, ni à ceux qui auront refusé de l'être ;

- la création en Guadeloupe d'une antenne de l'OFPRA pour faire face à l'afflux des demandes d'asile de ressortissants d'Haïti ;

- l'adoption en juin 2005, par le conseil d'administration de l'OFPRA, de la liste de 12 pays considérés comme sûrs, ce qui permet le traitement prioritaire des demandes d'asile présentées par leurs ressortissants et leur non-admission au séjour.

En troisième lieu, le CICI s'est préoccupé de mieux lutter contre l'immigration irrégulière en luttant contre les détournements de procédure.

En ce qui concerne les mariages de complaisance, l'essentiel des dispositions législatives prévues à ce titre est contenu dans le projet de loi relatif au contrôle de la validité des mariages adopté en Conseil des ministres le 1er février dernier, mais d'autres mesures seront incluses dans le futur projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration, approuvé par le CICI du 9 février, qui est en cours d'examen par le Conseil d'Etat et devrait être examiné par le Conseil des ministres au début du mois d'avril. A propos de ce dernier texte, M. Patrick Stefanini a rappelé que le Premier ministre avait indiqué, à l'issue de la réunion du CICI, que les propositions et recommandations de la commission d'enquête auraient naturellement vocation à l'enrichir.

Il a indiqué que, dans le cadre de la lutte contre les détournements de procédure, l'avant-projet de loi prévoyait :

- d'allonger les délais d'acquisition par les conjoints de Français de la nationalité française par voie de déclaration ;

- de subordonner l'octroi d'un titre de séjour aux conjoints étrangers de Français à la détention d'un visa de long séjour ou d'un titre de séjour d'au moins un an en cours de validité ;

- de porter à trois ans la durée de vie commune préalable à l'accès à la carte de résident.

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