Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 3 octobre 2006 à 16h15
Adhésion de la bulgarie et de la roumanie à l'union européenne — Adoption d'un projet de loi

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, la délégation pour l'Union européenne m'a confié il y a six ans le suivi de l'adhésion de la Bulgarie à l'Union européenne. Dans mon esprit, l'adhésion devait et doit s'inscrire dans une stratégie d'engagement « gagnant-gagnant ».

Certes, la Bulgarie a beaucoup à attendre de l'aide de l'Union européenne. Ainsi, les fonds structurels représenteront cette année près de 10 % de ses recettes budgétaires.

L'Union a aussi tout à gagner de l'entrée d'un pays géographiquement et culturellement européen et trait d'union naturel avec la Russie. Sa grande connaissance de la zone si complexe des Balkans constitue un atout majeur. Sa position stratégique sur les bords de la mer Noire en fait une entrée, et donc une sécurité supplémentaire, pour l'approvisionnement de l'Union européenne en hydrocarbures.

Il y a six ans, j'avais noté que les deux obstacles les plus importants rencontrés par ce pays dans son processus d'intégration à l'Union étaient la corruption et la centrale nucléaire de Kozloduy. Ils demeurent d'actualité.

S'agissant de la lutte contre la corruption et la criminalité organisée, certains avaient considéré, en 2000, que mon rapport était sévère. Il n'exprimait en fait qu'une mise en garde résultant d'un examen de la situation. C'est toujours avec le même souci d'objectivité que je suis retourné cette année en Bulgarie et que j'ai pu apprécier les changements intervenus ces cinq dernières années.

Dans le domaine de l'éthique publique, le gouvernement bulgare a pris ces derniers mois de nombreuses mesures qu'il a d'ailleurs renforcées pendant l'été : dispositions concernant les marchés publics, adoption d'un plan d'action pour la réforme du système judiciaire, augmentation du budget de la justice et du nombre d'enquêteurs, adoption d'un code de déontologie pour les fonctionnaires nommés par le gouvernement, publication des déclarations de patrimoine des ministres et des parlementaires, modifications des règles de fonctionnement des banques, augmentation des moyens mis à la disposition de l'agence des renseignements financiers ou mise en place, au sein du ministère de l'intérieur, de services d'enquête spécialisés contre la grande criminalité.

Pour autant, la Bulgarie continuera encore longtemps à rencontrer de sérieuses difficultés sur ce terrain car, dans les faits, un certain nombre de pratiques policières et judiciaires limitent l'efficacité des réformes adoptées. Le risque le plus important serait que, assurées d'entrer dans l'Union européenne au 1er janvier 2007, les autorités ne se démobilisent sur cet aspect extrêmement préoccupant qui a retenu toute l'attention de la Commission européenne comme des États membres.

J'ai cependant acquis la conviction que les autorités bulgares sont parfaitement décidées à procéder aux réformes nécessaires, comme me l'a affirmé le Premier ministre, pour qui « un système judiciaire, transparent et efficace est une nécessité pour la Bulgarie ».

La Bulgarie est aussi un pays de transit avec lequel doivent se développer des coopérations indispensables dans le domaine de la sécurité, s'agissant de la lutte contre la criminalité organisée, le trafic d'êtres humains, le terrorisme et les réseaux d'immigration clandestine. Une Bulgarie non intégrée dans l'Union ne serait pas à même de lutter seule contre cette criminalité et constituerait au flanc de l'Union une zone de fragilité dans la lutte que nous menons contre tous ces trafics.

Pour les autres déficiences montrées du doigt par la Commission européenne, notamment les retards dans la mise en place de l'agence des paiements pour l'agriculture, l'établissement du système d'identification des parcelles agricoles, le respect des normes phytosanitaires, des contrôles réguliers permettront tant à l'Union européenne qu'à la Bulgarie de vérifier la mise en place effective de ces dispositifs afin que les subventions européennes soient utilisées au mieux.

S'agissant de l'énergie, question pratiquement passée sous silence par la Commission européenne dans son rapport, je rappelle que la Bulgarie, grâce à sa production électronucléaire, joue un rôle essentiel dans l'approvisionnement énergétique non seulement de la région des Balkans, mais aussi de l'Europe du sud, Grèce et Italie comprises.

Or, la Commission européenne a exigé la fermeture de quatre des six réacteurs de la centrale nucléaire de Kozloduy sur le Danube. Si la fermeture des réacteurs 1 et 2, de type Tchernobyl, était parfaitement justifiée, en revanche, la fermeture des réacteurs 3 et 4 d'ici à la fin de l'année 2006 l'était moins. Dotés d'une enceinte de confinement, ces deux réacteurs ont été largement modernisés et sécurisés depuis dix ans par des firmes occidentales et ils sont au moins aussi sûrs que les plus anciens des réacteurs en service dans l'Union européenne. L'Agence internationale de l'énergie atomique l'a d'ailleurs confirmé.

La fermeture de cette centrale, qui exporte une partie de sa production vers l'ensemble des Balkans, placera donc cette région en situation de pénurie d'électricité dès le début de l'année 2007, à un moment où le relèvement des prix du pétrole et du gaz va rendre problématique le fonctionnement des centrales thermiques. Il serait donc important que l'Europe participe fortement au financement de la construction de la nouvelle centrale nucléaire de Béléné.

En définitive, l'adhésion de la Bulgarie est une chance non seulement pour ce pays, mais aussi pour l'Union européenne ; c'est surtout une chance de voir renforcée la stabilité dans cette région. C'est pourquoi je voterai, avec une partie des membres de mon groupe, le projet de loi autorisant la ratification du traité relatif à l'adhésion de la République de Bulgarie à l'Union européenne.

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