Intervention de André Ferrand

Réunion du 3 octobre 2006 à 16h15
Adhésion de la bulgarie et de la roumanie à l'union européenne — Adoption d'un projet de loi

Photo de André FerrandAndré Ferrand :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nos amis bulgares voudront bien m'en excuser, je ne parlerai, dans mon intervention, que de la Roumanie. En effet, comme l'ont rappelé M. Blanc et M. Haenel, j'ai eu le privilège d'être désigné, en 2002, comme rapporteur chargé du suivi de la candidature de la Roumanie au sein de la délégation du Sénat pour l'Union européenne.

Durant ces quatre années, j'ai effectué plusieurs déplacements dans ce pays et j'ai rendu compte à intervalles réguliers, devant la délégation, des avancées obtenues par la Roumanie, mais aussi des difficultés qu'elle a rencontrées dans sa marche vers l'Union européenne.

Ma conviction, aujourd'hui, est que ce pays est suffisamment préparé pour entrer dans l'Union européenne au 1er janvier 2007.

Nous savons tous que la Roumanie est partie de beaucoup plus loin que les autres pays d'Europe centrale et orientale. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle elle n'a pas été retenue dans la précédente vague d'élargissement de 2004.

Pendant longtemps, ce pays a même été en retard par rapport à la Bulgarie. Or la situation semble à présent s'être inversée et elle paraît désormais mieux placée.

Pour reprendre l'expression employée par la Commission européenne dans son dernier rapport de suivi en date du 26 septembre 2006, « la Roumanie a déployé des efforts considérables pour parachever ses préparatifs d'adhésion à l'Union européenne ». La Commission en conclut que la Roumanie sera en mesure d'assurer les droits et obligations liés à l'adhésion au 1er janvier 2007.

Pour mesurer les progrès accomplis par ce pays, je ne mentionnerai qu'un seul domaine, celui de la justice.

Depuis 1997, la Commission considère que la Roumanie remplit les critères politiques de l'adhésion, c'est-à-dire la démocratie, l'état de droit, le respect des droits de l'homme et des minorités. Cette appréciation globalement favorable était toutefois assortie de sérieuses réserves dans les précédents rapports de la Commission, en particulier s'agissant de l'indépendance de la justice et de la lutte contre la corruption. Or, dans ces domaines, le gouvernement roumain a accompli d'incontestables progrès ces dernières années.

Ainsi, la Roumanie s'est dotée, à l'été 2005, d'une nouvelle législation qui garantit l'indépendance du système judiciaire. Une École nationale de la magistrature a été créée, ainsi qu'un Conseil supérieur de la magistrature. De nouveaux juges et procureurs ont été recrutés sur concours et un système informatisé d'attribution aléatoire des affaires aux juges a même été introduit.

Toutefois, s'il était un domaine où l'Union européenne attendait de véritables avancées de la part des autorités roumaines, c'était bien celui de la lutte contre la corruption. J'avais d'ailleurs moi-même insisté sur cette question dans le rapport d'information que j'avais présenté en 2003 au nom de la délégation pour l'Union européenne. Or, là aussi, on a pu constater un changement d'attitude de la part des autorités roumaines, qui n'ont pas hésité à mettre en cause des personnalités politiques de premier plan.

On peut également relever, au titre des progrès, la mise en place d'une agence chargée de la répression de la corruption à haut niveau : la Direction nationale anticorruption, qui dépend du parquet.

Les autorités roumaines ont donc réalisé de réels progrès, notamment sous l'impulsion de la ministre de la justice, Mme Monica Macovei, qui mène une politique très volontariste.

Certes, tout n'est pas encore parfait : comme en Bulgarie, des difficultés subsistent en matière de réforme de la justice, de lutte contre la corruption, ou encore dans le secteur agricole. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle la Commission européenne va mettre en place une procédure de suivi, qui s'appliquera au-delà de l'adhésion de ces deux pays à l'Union.

Mais je crois que la Roumanie pourra mieux se réformer et progresser en étant membre de l'Union européenne plutôt qu'en étant maintenue à l'extérieur. La pression des autres pays et l'éventualité de recours en manquement susceptibles de déboucher sur des condamnations devant la Cour de justice des communautés européennes constitueront de sérieuses incitations à évoluer et à combler les lacunes.

À titre d'exemple, le risque de voir la Commission refuser de débloquer des crédits issus du budget communautaire, notamment au titre de la politique agricole commune ou des fonds structurels, dans le cas où ne seraient pas offertes les garanties nécessaires concernant l'utilisation correcte de ces crédits, devrait constituer un excellent moyen d'améliorer les capacités administratives dans ces secteurs.

De plus, le traité d'adhésion contient des clauses de sauvegarde et des mécanismes transitoires, notamment en matière de libre circulation des travailleurs originaires de ces pays.

En outre, un report de l'entrée de la Roumanie dans l'Union européenne pourrait avoir des conséquences désastreuses sur l'opinion publique roumaine, qui a consenti des efforts importants en vue de l'adhésion.

Si l'entrée de la Roumanie est une chance pour ce pays, elle présente aussi de nombreux avantages pour l'Union et, j'en suis convaincu, pour notre pays.

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