Intervention de Jean-Louis Bonnet

Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale — Réunion du 1er avril 2008 : 1ère réunion
Coût de l'hôpital — Audition de M. Jean-Louis Bonnet directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation arh de rhône-alpes président de la conférence des directeurs d'arh

Jean-Louis Bonnet, directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation de Rhône-Alpes :

a d'abord estimé qu'on pouvait porter un bilan circonstancié sur l'activité des agences régionales de l'hospitalisation (ARH) depuis leur création, grâce aux rapports réguliers de la Cour des comptes ou à ceux de l'inspection générale des affaires sociales (Igas), comme par exemple un récent rapport consacré à l'efficience des établissements de santé. Cela dit, il est important de souligner que les missions des ARH ont considérablement évolué depuis leur création. A l'origine, le principal sujet de préoccupation était la recomposition du paysage hospitalier ; aujourd'hui, avec la réforme de la tarification et le passage à la tarification à l'activité (T2A), le rôle des agences s'est sensiblement modifié avec notamment une diminution de leur marge d'intervention financière. Le passage de la T2A à 100 % permettra de connaître immédiatement les variations d'activité positives ou négatives, un peu à l'image de ce qui existait avant le régime des dotations globales avec le système des prix de journée. Il n'y a plus de reprise automatique des excédents ou des déficits, ni de mécanismes de lissage des flux financiers.

Par ailleurs, les ARH portent un intérêt de plus en plus grand à l'organisation, à l'efficience et à la qualité des soins. Cette préoccupation est nouvelle car auparavant l'agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (Anaes) avait un rôle majeur en matière de qualité des soins. Néanmoins, les ARH ont un pouvoir qui se heurte assez vite au principe d'autonomie des établissements. Leurs outils sont globaux, leur contrôle porte sur les moyens financiers ou les décisions d'autorisation mais elles n'ont jamais la possibilité de se substituer à l'établissement dans le processus décisionnel. A cet égard, le dispositif récemment créé d'administration provisoire constitue certes un nouvel outil pour les ARH mais en aucun cas un mode de gestion habituel.

La question de l'efficience est au coeur du débat actuel sur la convergence des coûts mais il s'agit d'un sujet complexe. Un récent rapport de l'Igas a d'ailleurs fait le constat qu'il n'y a pas d'analyse simple et limpide possible sur les écarts de coût et leur justification. Une partie de ces écarts réside néanmoins certainement dans l'organisation même des établissements et dans l'exigence de la permanence des soins, notamment pour les établissements ayant une activité très modeste. Il est impératif de rationnaliser les astreintes que l'on trouve parfois en double ou en triple sur certains territoires. Il va falloir également réfléchir à l'association du secteur privé à la redéfinition des astreintes. Toutefois, l'un des sujets qui bloque pour avancer sur cette question est le problème de l'accès aux soins entre le secteur 1 et le secteur 2. Des exemples témoignent néanmoins que de telles évolutions sont possibles. Ainsi, à Cognac, un hôpital et une clinique disposaient chacun de services de chirurgie complets, surdimensionnés par rapport aux besoins. On est parvenu à réformer ces deux services grâce à un partage des activités et au développement d'une bonne coopération entre les deux établissements. En outre, il a été décidé d'appliquer les honoraires du secteur 1 à tous les patients passés par les urgences de l'un ou l'autre de ces établissements. Dans la plupart des cas, cela n'a pas posé de problème sauf dans certaines circonstances particulières, notamment lorsque la nécessité de l'intervention chirurgicale a été établie par un médecin généraliste plutôt que dans le service d'urgences.

De telles réformes sont possibles dans les villes moyennes ; en revanche, elles sont plus complexes à mener dans les très grandes villes où existe un clivage très net entre ceux qui assurent la permanence des soins et ceux qui n'y participent pas. Les centres hospitaliers universitaires (CHU) sont de gros établissements très lourds dans lesquels il est difficile de « décortiquer » tous les éléments du prix de l'activité quotidienne. Il serait sans doute souhaitable de leur donner un rôle de recours ou de référent pour les cas jugés à risque. Cela signifierait par exemple de ne plus pouvoir pratiquer un accouchement de niveau 1 dans une maternité de niveau 3.

a indiqué que la conférence des directeurs d'ARH partage en grande partie les analyses faites par le rapport de l'Igas sur le retour à l'équilibre financier des hôpitaux. Néanmoins, il faut souligner que les contrats de retour à l'équilibre ont été engagés dans un contexte où les hôpitaux disposaient encore de dotations globales. Le changement de système de tarification fera que, très vite, les projections effectuées ne seront plus pertinentes.

Ainsi, les établissements dont l'activité augmente disposeront des mêmes moyens ; en revanche, si leur activité reste stable ou diminue, ils n'auront plus les mêmes disponibilités financières. Cela signifie que si la croissance retenue est de 1,7 %, on constate en réalité une diminution de 3,7 % des moyens. La baisse d'activité et la baisse des tarifs sont des phénomènes cumulatifs pour les établissements. Si on prend l'exemple de la région Rhône-Alpes qui représente environ 10 % des établissements de santé français, on constatait, au 31 décembre 2006, un équilibre entre les établissements déficitaires et les établissements excédentaires. A la fin de l'année 2007, la situation se détériore, notamment du fait des gros établissements, c'est-à-dire des trois CHU qui couvrent 40 % de l'activité hospitalière de la région et qui ont connu une activité inférieure à ce qui était prévu.

Pour permettre un retour à l'équilibre des établissements, les marges de manoeuvre des ARH sont très faibles car elles ne peuvent intervenir ni sur les activités financées par la T2A, ni sur les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac), mais seulement sur les aides contractuelles. L'idée serait de clarifier et de hiérarchiser les aides prévues dans le cadre du plan hôpital 2012 et de leur redonner un caractère non pérenne.

a considéré que la T2A est indéniablement un élément moteur pour inciter les établissements de santé à améliorer leur organisation et leur gestion, mais cela nécessite au préalable un changement de culture dans les établissements. L'Igas a elle-même dénoncé la « culture du déficit » trop souvent rencontrée à l'hôpital public. De ce point de vue, la tarification à l'activité est souvent un révélateur de la lourdeur des procédures et de la désorganisation dans les établissements. En témoignent les travaux lancés par la mission nationale d'expertise et d'audit hospitaliers (Meah) sur les blocs opératoires dont les conclusions sont très intéressantes. L'une des difficultés récemment rencontrée a été la projection d'activité particulièrement optimiste effectuée par les établissements. Or, certains projets n'ont pas été retenus et on semble avoir atteint les limites de l'optimisation du codage des actes.

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